Depuis fin octobre 2023, une quarantaine de personnes occupent une ancienne unité psychiatrique à Fontaine-lès-Dijon (Côte-d'Or). Ce mercredi 15 novembre, l'affaire était examinée par le tribunal administratif.
Voilà trois semaines qu'une quarantaine de personnes, essentiellement des demandeurs d'asile, dont certains mineurs, occupe les locaux d'une ancienne unité psychiatrique à Fontaine-les-Dijon (Côte-d'Or). La préfecture de Côte-d'Or et le maire de Fontaine-lès-Dijon exigent leur départ. Ce mercredi 15 novembre 2023, le tribunal administratif examinait l'affaire. En parallèle, une manifestation de soutien du collectif Soutien Asile 21 et des riverains de la commune s'est tenue devant le tribunal.
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La mise en demeure de la préfecture est-elle valable ?
À l'intérieur du bâtiment du centre-ville dijonnais, Dominique Clémang. L'avocate, qui représente une vingtaine de squatteurs, explique au président du tribunal pourquoi la mise en demeure des occupants décidée par la préfecture n'est pas valable.
Le 30 octobre, le préfet annonçait en effet que les occupants des lieux devaient les quitter sous 13 jours. Une décision motivée par la plainte du maire de Fontaine-lès-Dijon et de l'EPFL (établissement public foncier local) de Côte-d'Or, propriétaire des lieux. Argument avancé : une trentaine de logements doivent être créés dans ce grand bâtiment abandonné depuis 2019.
Depuis, le collectif Soutien Asile 21 a déposé un recours devant le tribunal administratif, suspendant la procédure d'expulsion annoncée par la préfecture. C'est donc à la justice de décider du sort de ces personnes qui ont déjà occupé d'autres lieux dans la capitale bourguignonne auparavant.
Devant le président, Dominique Clémang avance ses arguments. La préfecture s'appuie sur la récente loi Kasbarian dite "anti-squat" qui permet d'exclure les personnes qui occupent tout local à usage d'habitation. "Évidemment que ce bâtiment n'a jamais été à usage d'habitation. Le cadastre indique que c'est un établissement hospitalier", rétorque l'avocate qui fait remarquer qu'aucuns travaux n'ont été entamés dans cet ancien bâtiment du centre hospitalier La Chartreuse.
"Où en est ce projet gigantesque ? On n'en sait rien !"
"Ces logements sociaux, on en entend parler depuis quatre ans, mais on ne voit rien avancer", souffle avant l'audience Bernard, habitant de Fontaine-lès-Dijon. "Où en est ce projet gigantesque ? On n'en sait rien ! Aucun projet ne s'est concrétisé, aucune démolition n'est prévue dans les prochaines semaines", lance Dominique Clémang tandis que les slogans des manifestants traversent les fenêtres du tribunal administratif.
Autre argument avancé, la non-considération des personnes par les services de la préfecture. "Aucune enquête n'a été faite pour connaître la situation et le sort de ces personnes", avance l'avocate. Derrière elle, une quinzaine de squatteurs écoutent religieusement. "Le fait d'être à la rue, c'est un problème relatif à la dignité humaine", rappelle maître Clémang. D'autant que si le tribunal ne lui donne pas raison, les squatteurs pourront être expulsés manu militari, et ce malgré la trêve hivernale. On vous explique pourquoi dans cet article.
Pour la préfecture, toutes les conditions sont remplies
Après la plaidoirie de l'avocate, le représentant de la préfecture contrecarre ces arguments. Pour lui, toutes les conditions sont réunies pour mettre en demeure les squatteurs. Sur le volet de l'usage d'habitation du lieu, il fait remarquer que le cadastre fait mention d'une "maison de repos" et d'une "maison de retraite" et qu'il s'agit donc d'un lieu à usage d'habitation.
Concernant la considération des occupants des lieux, le président lui demande : "Est-ce que quelqu'un s'est déplacé sur les lieux pour contraster la situation de ces personnes, la composition des familles s'il y en a, l'état de salubrité des lieux ?" En réponse, le représentant de la préfecture assure que le préfet a fait son travail grâce à l'intervention d'un représentant de l'association Coallia.
Après l'audience, un compte-rendu oral a été fait aux riverains et membres du collectif restés dehors, faute de place. "Pourquoi on les expulse au début de l'hiver ?" s'interroge le Fontenois Bernard. "Le bâtiment est vide, donc si on les met dehors, qu'est-ce qu'on en fait ? J'espère que la justice trouvera une solution positive à tout ça." La décision du tribunal sera connue dans les prochains jours.