L’épidémie de Covid-19 pourrait faire d’autres victimes. Des patients atteints de cancer dont le dépistage ne s’est pas fait ou a pris du retard. Explications avec Jean-François Bosset, président de la ligue du cancer Doubs-Besançon.
L’ancien cancérologue a beau avoir pris sa retraite. Il continue à se battre et se soucier comme il dit “ des malades et de ceux qui vont l’être”.
Alors que 2021 débute, la ligue a fait les comptes. Tous les ans en Franche-Comté, 250.000 femmes environ se font dépister du cancer du sein. Avec le Covid, ce chiffre a baissé d’environ 10% en 2020 explique Jean-François Bosset. Sachant que 7,5 mammographies sur 1000 diagnostiquent un cancer, “on est passé à côté de 15 à 18 cancers l’an dernier en Franche-Comté” assure-t-il.
Pour ces femmes, le diagnostic est retardé, elles vont avoir une perte de chances, de possibles mastectomies partielles, des traitements plus lourds, résume l’ancien médecin qui rappelle qu’un cancer du sein détecté dans les temps se guérit à plus de 95%.
Le cancer tue 420 à 450 personnes par jour en France
Pour ces femmes qui ne sont pas venues au dépistage, il est pour l’instant difficile d’expliquer les raisons précises de leurs absences. Peur du Covid sans doute, moral en berne… la ligue contre le cancer a d’ailleurs lancé un questionnaire lors de la deuxième vague pour maintenir le lien et comprendre comment les malades ont été pris en charge.
“Le covid a tout éteint, les moyens ont été mis en priorité sur le virus, il y a eu des déprogrammations” constate le médecin qui comprend que l’épidémie ait été gérée prioritairement. “On ne saura que dans quelques années, les conséquences de tout cela, ce qui est sûr, c’est que le retard ne se rattrapera pas. On s’attend à une surmortalité des cancers dans les années qui viennent” s’inquiète le président de la ligue contre le cancer du Doubs-Besançon.
23% de diagnostics de cancers en moins en France en 2020
Selon le journal Le Monde du 1er février 2020, « entre janvier et juillet 2020, le nombre de nouveaux diagnostics a chuté de 6,8 % » explique le professeur Jean-Yves Blay, président de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer (Unicancer). Les données nationales, elles, sont plus sombres : pour l’ensemble des patients en France, cette chute atteint 23,3 % en 2020.
La fédération Unicancer a estimé début décembre que les retards de prise en charge des patients atteints de cancer lors de la première vague de Covid-19 "se traduiront par un excès de décès de 1.000 à 6.000 patients dans les années à venir".
Côté dons, la crise sanitaire va faire baisser dans le département du Doubs, les recettes récoltées lors d'événements comme octobre rose, mars bleu, assure Jean-François Bosset. 300 à 320.000 euros sont reversés en temps normal par la ligue du Doubs à la recherche contre le cancer. Les legs eux seraient en revanche plutôt à la hausse sur le plan national. La ligue finance 38 millions d’euros par an pour la recherche, rappelle le médecin.