Cette année encore des parents d’écoliers de Besançon (Doubs) n’ont pas pu inscrire leurs enfants à la cantine pour la rentrée scolaire. Même si la situation s’améliore, Besançon est la seule grande ville de Franche-Comté a refuser des enfants à la cantine faute de places suffisantes.
Au mois de juillet, certains parents bisontins guettent particulièrement leur boîte aux lettres. C'est à ce moment là que la mairie de Besançon leur indique si leurs enfants auront bien une place à la cantine. "Cela reste une source d'angoisse pour les parents", raconte Alice Cnockaert, mère de deux enfants et membre du collectif Cantines en colère. "Tant qu'on a pas reçu ce papier, on est pas tranquille, car c'est un vrai problème la cantine."
Des parents bisontins doivent en ce moment se demander comment ils vont faire à la rentrée pour le repas de midi de leurs enfants. En septembre prochain, 179 enfants ne pourront pas aller à la cantine alors que leurs parents en avaient fait la demande. C’est récurrent depuis plusieurs années alors que dans les autres villes de Franche-Comté, les parents n'ont pas de problème pour inscrire leurs enfants à la cantine. Certes, le nombre de repas servis est de l'ordre de la centaine dans ces villes, à Besançon, c'est de l'ordre du millier.
"On a pu constater qu'il y a des efforts qui sont faits avec la nouvelle équipe municipale. On arrive à comprendre que tout ne soit pas résolu mais on reste présent" précise Alice Cnockaert, également membre de l'association de parents d'élèves FCPE. "Il y a encore eu quelques petits couacs administratifs", complète la mère de famille engagée dans le collectif. "On continue à travailler avec la mairie pour que le point de vue des parents soit pris en compte. Maintenant, les courriers d'admission n'arrivent plus au dernier moment, mais au début de l'été" précise-t-elle.
Fin d'une bataille juridique
Les relations entre le collectif et la municipalité ont été bien plus tendues. En 2017, des familles avaient porté l’affaire devant le tribunal administratif de Besançon. Deux ans plus tard, des parents avaient créé le collectif "cantines en colère".
D'après les jugements du tribunal administratif puis de la cour administrative de Nancy, la cantine scolaire était "un droit", la mairie ne pouvait ainsi refuser l’inscription à la cantine. Mais en mars dernier, le Conseil d'Etat a estimé que la collectivité pouvait "légalement refuser" un enfant à la cantine si elle n'avait pas la "capacité" matérielle de l'accueillir.
Même si la justice a tranché en sa faveur, la municipalité s’est donnée comme objectif d’améliorer l’accueil dans les cantines de la ville. Son objectif est de créer 200 à 300 places par an pour qu’à la fin du mandat de l’équipe en place, la capacité d’accueil à la cantine soit de 70% des enfants inscrits à l’école. En 2016/2017, ce taux était de 52%.
Des « verrous» et des solutions
Chaque année, le nombre d’écoliers progresse : ils étaient 4079 en 2016/2017. A cette époque, 496 enfants avaient été refusés. A cette rentrée de septembre, 4861 enfants sont inscrits et 171 n’ont pas pu avoir de place dans une des cantines de la ville.
Pourquoi cela prend autant de temps d’améliorer l’accueil des enfants à la pause méridienne ? « Il y a trois verrous à faire sauter » explique Claudine Caulet, adjointe au maire en charge de l’éducation, des écoles et de la restauration scolaire.
Actuellement, l’équipe de la cuisine centrale municipale peut réaliser jusqu’à 5 500 repas par jour. Pas plus. Cuisinés le matin, livrés encore chauds le midi. Un système de « liaison chaude » qui implique une certaine organisation dans les restaurants scolaires. Pour augmenter le nombre de repas servis, la municipalité fait appel à un prestataire de service extérieur : A.P.I. Restauration. La plupart des sociétés de restauration travaillent en « liaison froide », cela implique une autre organisation des locaux et du personnel pour recevoir les repas à réchauffer. Les locaux d'une école sont faits pour proposer des repas en "liaison chaude" ou en "liaison froide" mais pas les deux en même temps.
Avec les repas servis par ce prestataire, la ville augmente sa capacité de repas servis : Les écoles Dürer et Granvelle (élémentaires) ont adopté ce système. A la rentrée, c’est au tour de l’école des Chaprais d’être livrée par A.P.I Restauration. D'autres écoles pourraient être concernées par ce système de restauration collective. Ce choix implique des aménagements des locaux. Les travaux ne pouvant être réalisés que pendant les vacances, tout cela prend du temps…
L’équipe municipale a prévu de dépenser 600.000 euros par an pendant trois ans pour ces aménagements. La taille des restaurants scolaires et de leurs annexes est le deuxième « verrou à faire sauter ». Dans la plupart des écoles, il y a déjà deux services pour les enfants de primaire. Pour les petits de maternelle, un seul service est prévu pour leur éviter une attente trop longue.
La ville recherche encore 43 animateurs
Le troisième verrou n’est pas purement matériel. Il s’agit, d’après Claudine Caulet, de recruter assez d’animateurs. Pour cette rentrée, sur environ 300 postes, il manque encore 43 jeunes pour encadrer les enfants pendant la pause méridienne.
Reste une question : sur quels critères la commission qui attribue les places en cantine prend ses décisions ? Première priorité : les familles monoparentales. Second critère : l’activité des parents. Avoir un emploi n’est pas considéré comme une priorité, c’est l’activité qui est prise en compte. Être en recherche active de travail, suivre une formation ou un traitement médical en hôpital de jour sont des critères équivalents à celui de travailler. C’est le code de l’éducation, défini légalement au niveau national, qui détermine ces choix. Une prochaine loi devrait prochainement entrer en vigueur dans les cantines : Egalim. Au 1er janvier 2022, les restaurants scolaires devront utilise 50% de « produits de qualité et durables dont 20% de bio » pour la réalisation des repas.