Députés de la majorité ou de l’opposition, ils sont tous confinés et continuent de travailler. L’Assemblée nationale reprend cette semaine une vie presque normale avec seulement 75 députés pour débattre et voter le plan de déconfinement. Et le fameux traçage des téléphones portables.
Depuis le début du confinement, tous les députés communiquent par téléphone, en audioconférences ou visioconférences. Ils travaillent ainsi avec leurs collaborateurs, leurs groupes politiques ou en commission à l’Assemble Nationale. L’opposition se désole de « ne pas contrôler l’action gouvernementale ». La majorité se félicite de faire «des remontées du terrain ».
Tous ces parlementaires restent en relations étroites, plusieurs fois par semaine si nécessaire, avec préfet, ARS (Agence Régionale de Santé), forces de sécurité et bien sûr personnels soignants, Éducation nationale ainsi que les chambres professionnelles et responsables économiques.
Bref, nos députés sont confinés mais ne chôment pas...Et tous disent, également, leurs inquiétudes pour la suite, inquiétudes sanitaires et économiques.
Télétravail, « nouvelles technologies » : le pour, le contre
Annie Genevard, députée LR du Doubs est montée presque toutes les semaines à Paris. C'est l’une des rares députés dans ce cas, mais elle a une bonne excuse : elle est vice-présidente de l’Assemblée Nationale.
Elle reste confinée à Morteau : « Je ne travaille pas moins mais différemment. Il n’y a jamais de relâche, même pas le dimanche. J’ai révisé ma position sur le télétravail. C’est une bonne chose mais ça ne peut pas convenir à tout, notamment pas au travail parlementaire. Rien ne remplace le relationnel que ce soit à Paris ou dans notre circonscription" dit-elle.
Même sentiment pour d’autres parlementaires. « Maintenant, avec cette crise, ces moyens de communication sont entrés dans les mœurs. Mais une visio, ce n’est pas une réunion. Il nous manque l’ambiance» juge Jean-Marie Sermier, député LR jurassien.
Pour l’autre député LR du Jura, Marie-Christine Dalloz, « on ne peut pas rebondir sur un propos, relancer. C’est mieux que rien mais ce n’est pas satisfaisant. »
Christophe Lejeune, député LREM de Haute-Saône constate : « C’est positif, on a plus d'échanges, on est plus réactif mais le contact et le relationnel me manquent. Moi, j’aime les gens ! »
C’est clair pour Fannette Charvier aussi, la députée LREM du Doubs qui n’a « jamais passé autant de temps au téléphone » : «J’ai énormément de retours de la part des habitants de la circonscription. Mon téléphone et ma boîte de messages chauffent. »
Barbara Bessot Ballot députée LREM de Haute-Saône le dit cash : « Je ne perds plus autant de temps dans les transports et surtout dans les événements de représentation. Je brasse moins d’air, je pense que je suis plus efficiente. »
Des ministres ... visibles !
Les députés de la majorité LREM, la république en marche, se réjouissent. Même si c’est en visioconférence, ils n’ont jamais autant « vu » les ministres que ce soit de la santé, de l’économie et tous les autres..
« Je n’ai jamais autant parlé aux ministres depuis le 16 mai et je pense n’avoir jamais été autant écoutée » raconte Daniele Brulebois, députée de la première circonscription du Jura.
Même sensation pour Christophe Lejeune de Haute-Saone ou encore Éric Alauzet du Doubs : «Je n’ai jamais eu autant de relations avec des ministres. On les voit tous régulièrement 2, 3 ou 4 fois par semaine. Jamais nos propositions n’ont reçu autant de réponses favorables. Jamais non plus on a compté aussi peu les milliards : nous sommes passés de 45 à 110 milliards pour le plan de relance économique. »
Une grande partie de leurs activités a d’ailleurs été consacrée à la crise économique qui s’annonce très grave. Ils sont venus en aide aux commerçants, artisans, agriculteurs, chefs d’entreprise et autres indépendants durement touchés par le confinement. Et ils ont également fait remonter auprès des ministres et des services de l’Etat, les besoins et les attentes de ces acteurs économiques.
Michel Zumkeller, députe UDI du Territoire de Belfort, a déposé une proposition de loi visant à interdire aux entreprises de verser des dividendes quand elles ont bénéficié d’aides publiques.
Une Assemblée Nationale vraiment démocratique depuis le confinement ?
Pour des raisons de sécurité sanitaire, puisqu'une vingtaine de députés a été contrôlée positif au coronavirus, seules 25 personnes ont siégé dans l’hémicycle ces dernières semaines. Ce mardi 28 avril, 75 députés débattront et voteront le texte sur le déconfinement qui comprend le dispositif sur le tracking ou traçage des téléphones portables. Cette mesure doit permettre de repérer les personnes contaminées et ainsi protéger les plus fragiles d’entre nous.
Ian Boucard, député LR du Territoire de Belfort, constate avec colère et amertume que l’opposition n’ait pas pu ces dernières semaines « contrôler l’action du gouvernement. »
Joint dimanche par téléphone, il regrettait qu’à 48 heures du vote, « On ne sait rien sur le déconfinement. La loi d’exception, votée par le groupe LR, donne beaucoup de pouvoirs à la majorité et au gouvernement mais ça ne peut pas durer plus longtemps» estime l'élu. D’ailleurs, le président du groupe LR demandait dimanche après-midi 24 heures supplémentaires avant de procéder au vote sur ce texte très attendu.
Annie Genevard joue également son rôle d’opposante : « C’est à notre demande, nous le groupe LR, que nous reprenons les débats à 75 députés. De ce fait, l'activité, sinon d’être normale, sera au moins plus démocratique. Nous sommes montés au créneau pour obtenir un vote, il nous a fallu batailler. »
La majorité joue aussi le sien par la voix de Christophe Lejeune : « Aucun chef de groupe ou de parti ne peut dire qu’il n’a pas été associé aux discussions» estime-t-il.
On attend donc avec impatience que les débats reprennent normalement mardi à 15h quand Édouard Philippe, le premier ministre, présentera son plan de déconfinement. L’opposition qui s’oppose et la majorité qui défend le gouvernement : un schéma qui aura au moins le goût d’une vie revenue à la normale ou presque…