Empoisonnements à Besançon : l'ex-anesthésiste Frédéric Péchier suspecté de 8 nouveaux empoisonnements

La justice soupçonne Frédéric Péchier, ex-anesthésiste de Besançon, de 8 nouveaux cas d’empoisonnements de patients, dont 4 mortels. Il était déjà mis en examen pour 24 empoisonnements volontaires, dont 9 mortels. Détails.

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Au total, le docteur Frédéric Péchier, ancien médecin anesthésiste, est désormais suspecté d'empoisonnements sur 32 personnes, dont 13 personnes décédées. Ce sont les informations dévoilées par Etienne Manteaux, procureur de la République de Besançon ce mardi 27 septembre 2022. Désormais, 8 nouveaux cas, dont 4 mortels concernant des personnes exhumées par la justice, sont ajoutés au dossier. 

À cette heure, le docteur Péchier n'est pas encore mis en examen pour ces 8 cas supplémentaires. Il le sera potentiellement après son audition. "Il y a désormais une perspective claire : d’ici janvier 2023, on aura la totalité des expertises" a tenu à expliquer Etienne Manteaux, après avoir repris la chronologie de ce "dossier hors du commun, mais qui nous oblige", selon ses mots.

"Les délais peuvent apparaître longs"

"Les délais peuvent apparaître longs" a concédé le procureur. "Il nous fallait trouver un médecin assez compétent, totalement impartial donc qui n’a jamais côtoyé monsieur Péchier et qui disposait de suffisamment de temps pour procéder à l'analyse d'un certain nombre de procédures" a justifié Etienne Manteaux. Dans 7 des 8 nouveaux cas dans le viseur de la justice, c'est l'utilisation d'adrénaline, qui n’avait pas été envisagée au départ comme une molécule identifiée, qui pose question. 

Les dates des 8 nouveaux cas suspects sont les suivantes : 25 septembre 2009, 23 mars 2012, 11 décembre 2012, 10 juin 2014, 5 octobre 2015, 28 janvier 2016 et 4 février 2016.

"Un dossier sensible" pour le ministère de la Justice

“Le ministère de la Justice a identifié ce dossier comme un dossier sensible. Il a financé pour 18 mois un poste d’assistant spécialisé. Il s'agit d'un médecin légiste qui accompagne le magistrat instructeur pour l’assister dans la compréhension de ce dossier mais aussi lors de tous les interrogatoires du médecin anesthésiste” a poursuivi Etienne Manteaux, qualifiant cette mesure de "tout a fait inédit[e]".

Seulement deux juridictions en disposent, à Marseille et Paris. On comprend ainsi toute la complexité de cette affaire.

Le magistrat instructeur est donc à cette heure saisi de 32 cas d'empoisonnements dont 13 mortels. 24 cas pour lesquels le docteur Péchier est mis en examen. "Peut-être qu'au terme de ces investigations, il n'y aura que 18-20 cas qui seront vraiment retenus comme empoisonnements à la lumière des expertises. Peut-être 5. Peut-être pas du tout. C'est le magistrat instructeur qui tranchera dans la clôture de l'information judiciaire" a ajouté le procureur.

Le dossier va avancer de manière très significative dans les mois à venir.

Etienne Manteaux, procureur de la République de Besançon

Concernant la liste de cas suspects communiquée à la justice par la direction de la Clinique Saint Vincent, les investigations sont terminées. Beaucoup de cas n’ont pas pu emmener de conclusions décisives et claires. "Il n'y aura plus de saisines supplétives à compter de ce jour. Pour les personnes qui pouvaient être concernées par ces différents cas, je souhaitais être très clair devant vous" a conclu le procureur de la République.

Un "rebondissement" pour les parties civiles, quand la défense attend des preuves

Pour l'avocat du docteur Péchier, ces nouveaux cas ne changent pas fondamentalement le dossier de son client. "J'ai l'impression que l'on empile les cas depuis le début de cette affaire, comme si ajouter des cas apporterait ce qui manque dans ce dossier depuis le début : une seule preuve contre le docteur Péchier. Je vous rappelle qu'on peut mettre en examen en France n'importe qui, avec pas grand chose voire rien. Il est temps, au bout de 6 ans de parler de preuves. Je n'ai toujours pas entendu monsieur le procureur s'exprimer sur ce point le plus essentiel du dossier" a expliqué Me Randall Schwerdorffer, avocat du docteur Péchier, à notre journaliste Emmanuel Rivallain.

Me Frédéric Berna, avocat de victimes dans ce dossier, parle quant a lui d'un "énième rebondissement". "Dans une certaine mesure, je m'interroge pour les clients et les clientes que je représente qui depuis 5 ans suivent cette procédure et qui doivent s'inquiéter du prolongement de cette information judiciaire qui n'a que trop duré. Et dans une autre mesure, je constate que le docteur Péchier n'a fait que réclamer des expertises, et au fur et à mesure que ces expertises rentrent, elles ne font que renforcer l'idée qu'il y a malheureusement quelqu'un qui a commis des crimes en série au sein de ces cliniques. C'est assez vertigineux. J'ai du mal à croire à la théorie du complot développée par la défense du docteur Péchier depuis des années. Pourquoi des dizaines d'enquêteurs, des experts médicaux, des procureurs voudraient absolument faire condamner à tort le docteur Péchier ?" nous a-t-il dit.

Le médecin clame son innocence

En mars 2017, Frédéric Péchier médecin anesthésiste, est mis en examen pour empoisonnement avec préméditation sur sept patients. Deux d’entre sont morts sur la table d’opération alors qu’ils subissaient des interventions bénignes. L’enquête révèle la présence d’anesthésiques locaux en surdose ou de potassium dans les poches de perfusion utilisées au cours des opérations entraînant des arrêts cardiaques. La justice retient parmi d'autres l'hypothèse d'un médecin qui provoquerait volontairement des arrêts cardiaques pour pouvoir venir en "sauveur" réanimer les patients. 

En mai 2019, 17 nouveaux cas d’empoisonnements dont 7 mortels sont versés au dossier. Il est mis en examen pour la seconde fois et reste libre sous contrôle judiciaire avec interdiction de paraître à Besançon, son secteur de résidence. 

Depuis le début de "l'affaire Péchier", le médecin n'a cessé de clamer son innocence. En octobre 2021, ce dernier avait tenté de mettre fin à ses jours en se défenestrant, au domicile de ses parents où il réside depuis le début de l'affaire, dans le département de la Vienne.

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