Ce vendredi 14 octobre, les établissements scolaires ont rendu hommage à Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie de 47 ans, décapité le 16 octobre 2020 par un jeune homme radicalisé qui lui reprochait d'avoir montré des caricatures de Mahomet à ses élèves. À Besançon (Doubs), les élèves du collège Victor Hugo ont observé une minute de silence et ont échangé en classe sur la laïcité.
La mort de Samuel Paty. Cette classe de 6e en parle sans tabou. Ces jeunes connaissent le drame qui s’est noué il y a deux ans, à la sortie d’un collège de Conflans-Sainte-Honorine. Avec leurs mots, ils se souviennent. “Il a été assassiné à cause du terrorisme. C’était à cause des caricatures qu’il avait montrées. À la télé, ils en ont beaucoup parlé” explique Manon. “C’est grave de faire un assassinat, alors j’ai bien aimé qu’on en parle en classe” ajoute Eliott.
Pour cet hommage, dans les écoles, collèges et lycées, le ministère avait laissé le choix de la forme aux équipes éducatives. Dans ce cours d’histoire-géographie, le professeur Valentin Briot est revenu ce matin sur le principe de laïcité lors du cours d'éducation morale et civique (EMC). Pour Rose, le message est passé. “La laïcité, ça veut dire qu’on a chacun le droit d’avoir une religion, mais pas le droit de l’imposer à quelqu’un et d’avoir des signes ostentatoires dans un établissement laïc". “On doit tous se respecter, on ne doit pas se détester, on doit vivre ensemble” conclut Mayan.
Pour l’enseignant, la mort de Samuel Paty reste un drame terrible. “Le moindre événement doit alerter, il faut absolument prendre conscience de ça et on doit s’en servir en classe, montrer que les principes de la République sont à défendre en permanence, ça à mon avis c’est vital” confie ce professeur d’histoire-géographie.
Pour le principal de l’établissement Jean-Jacques Fito, qui fait partie de l’équipe académique des valeurs de la République mise en place après la mort de Samuel Paty, les enfants comprennent les valeurs de la République et le mot laïcité. “Nous avons un trésor, il suffit de le montrer, de l’expliquer et cet héritage que nous avons reçu perdurera parce que nos enfants en comprennent les valeurs. C’est important de rendre cet hommage dans toutes les écoles, car le creuset de la société de demain, c’est l’école” estime Jean-Jacques Fito interrogé par notre journaliste Aline Bilinski.
Une "montée en puissance de signalements pour port de tenues et d'accessoires religieux"
Deux ans après l'assassinat de Samuel Paty, l’inquiétude reste de mise sur le respect de la laïcité, avec une "montée en puissance de signalements pour port de tenues et d'accessoires religieux", selon le ministre de l'Éducation Pap Ndiaye.
Le ministère a publié jeudi 13 octobre les chiffres des atteintes à la laïcité dans les écoles, collèges et lycées pour septembre. Ils montrent une hausse des signalements pour le port de tenues comme les abayas et qamis (vêtements longs traditionnels portés respectivement par les femmes et par les hommes).
Au total, 313 signalements ont été recensés le mois passé et 904 au deuxième trimestre 2022. C'est une hausse par rapport à la moyenne de 627 incidents recensés au premier trimestre 2022.
Les incidents pour "port de signes et de tenues" religieux représentent plus de la moitié des signalements de septembre (54%), contre 41% au deuxième trimestre 2022 et 22% au premier trimestre.
"Il y a objectivement une montée en puissance de signalements pour port de tenues et d'accessoires religieux, que l'on observe depuis un an, avec peut-être une accélération entre-temps. Et donc c'est évidemment sur cette question que nous travaillons", a déclaré le ministre de l'Education Pap Ndiaye en déplacement dans un collège du Val-de-Marne.
"Nous incitons les chefs d'établissements et les académies à remonter tous les signalements. Ne mettons rien sous le tapis", a ajouté le ministre.
"On va lui faire une Samuel Paty"
Ainsi, le parquet d'Evry a ouvert jeudi 13 octobre une enquête concernant les menaces de mort visant un professeur d'histoire-géographie d'un lycée de l'Essonne, auquel une lettre anonyme promet le même sort que Samuel Paty. L'enseignant d'une trentaine d'années a été placé sous protection de la police. Des agents sont postés devant son domicile et devant l'établissement où il enseigne.