À 28 ans, Pascal Letoublon est DJ et producteur de musique électronique à succès. Une carrière provoquée par son titre Friendships, qui l'a fait connaître aux yeux du grand public en réalisant un buzz mondial. De sa Franche-Comté natale, où il vit toujours, jusqu'aux plus grandes scènes électros d'Europe, en passant par ses doutes et sa soudaine médiatisation, il nous raconte son parcours.
Quand un morceau de musique fait basculer une vie. Cette phrase, souvent entendue pour décrire les trajectoires dorées des plus grands musiciens, résonne aujourd'hui comme un cliché. Pourtant, impossible de ne pas l'utiliser quand il s'agit de Pascal Letoublon. Son nom ne vous évoque peut-être rien. Mais vous avez sûrement déjà entendu une de ses créations, sans le savoir.
Posons le CV, d'entrée. Aujourd'hui, Pascal Letoublon vit grâce à sa musique. DJ et producteur de musique électronique depuis quelques années, ses titres cumulent des centaines de millions de vues sur les plateformes. À 28 ans, il a aussi signé chez le label Universal et la maison d'édition Virgin Records, tout en ayant écumé les plus grandes boîtes de nuit et les festivals électroniques d'Europe.
"J'ai tout appris en autodidacte"
Ce parcours rêvé, le Doubiste d'origine le doit à son travail, bien sûr. Mais aussi à un morceau qui a changé sa vie et qui lui colle toujours à la peau aujourd'hui : Friendships, créé dans sa chambre en quelques heures. Après une enfance plutôt marquée "foot et vélo", Pascal s'intéresse à la musique lorsqu’à 12 ans, ses parents lui offrent une guitare. Son premier amour musical n'a d'ailleurs rien à voir avec l'électro. C'est le metal qui attire le jeune Pascal, dans un groupe créé au collège avec ses amis. Et le loisir devient très vite une passion.
"J'ai commencé à me dire : si un jour, j'arrive à vivre de la musique, ce serait vraiment incroyable" explique le DJ. À 18 ans, le jeune homme loupe son bac scientifique. Un peu perdu, il décide de s'inscrire en intérim. "Je prenais tous les petits boulots qui s'offraient à moi. En fromagerie, dans la restauration avec mon frère" décrit-il. "À côté, je continuais la musique, chez moi. Mais je suis vite passé à l'électro. Je pouvais avancer à mon rythme, faire ce que je voulais. Et techniquement, il n'y avait besoin que d'un ordi".
J'ai appris en autodidacte, solo. J'ai bouffé des tutos YouTube, qui m'ont appris à apprendre l'anglais. Je passais ma vie à faire ça, je reproduisais des sons. Je n'avais pas de vie sociale pendant plusieurs années.
Pascal Letoublon
"Au boulot, je pensais à la musique, quand je rentrais chez moi le soir et le week-end, je composais" se souvient-il. Les heures, il ne les compte plus. "Je faisais ce que j'aimais, je kiffais" sourit-il. "Mais j'ai toujours bossé à côté, donc mes parents n’étaient pas trop inquiets". À 21 ans, Pascal décide de passer un cap : l'envoi de démo. "C'était l'époque de la deep house, de l'électro pas très rapide, pas très énergique, qui passe bien sur les vidéos de voyage. Je ne voulais pas percer dans ce style, mais c'était une manière de se faire connaître".
"Je commence à recevoir des messages depuis la Chine"
Pascal décide donc d'envoyer ses morceaux à des chaînes YouTube avec un titre, Friendships, composé en "quelques heures. Il n'y avait aucune intention d'en faire un hit planétaire" confesse le DJ. Et pourtant. Une chaîne bulgare choisit de publier le morceau. Il récolte quelques vues. "J'étais content" s'amuse Pascal. "Mais ça restait anecdotique. Mais quasiment un an après, je commence à recevoir des messages depuis la Chine".
Ils me disent : "trop bien ta musique, elle passe partout". Je comprends pas trop à ce moment là. De jour en jour, cela continue et on m'envoie des liens TikTok sur des danses avec ma musique en fond. Vu que c'était en Chine, les chiffres étaient déjà très gros, dans les millions.
Pascal Letoublon
Très vite, Friendships se retrouve chanson numéro 1 en Chine. "J'étais chez moi, dans le Doubs, et je ne réalise pas trop" continue-t-il. "Quelques jours plus tard, je reçois un message d'une boîte de prod chinoise qui me demande d'aller mixer là-bas". La chance d'une vie, que Pascal prend. "J'avais 22 ans, j'ai pris l'avion. Les seuls lives que j'avais faits, c’étaient des fêtes de la musique. Là, je mixe dans des gros clubs, il y avait des affiches de moi. C'était énorme. Surtout pour moi, de nature introvertie".
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Le jeune homme revient en France avec une certitude : "tout le monde connaissait ma musique, mais personne ne me connaissait moi" se marre-t-il. Sans promotion, Friendships séduit les autres pays asiatiques, puis l'Europe de l'Est, les USA et enfin l'Europe, via les réseaux sociaux. "Pendant deux ans, je voyais que les streams tournaient bien. Mais j'avais commencé à travailler sur des styles de musique différents, que j'aimais bien. Puis un matin, j'ai reçu un coup de fil d'Universal. Ils avaient adoré Friendships et voulaient me rencontrer".
Signature chez Universal, disques d'or et de platine, médiatisation soudaine, rapport au succès, difficulté de se renouveler après un hit planétaire, doutes et envie de tout arrêter, amour de sa Franche-Comté natale. Pendant 40 minutes, Pascal Letoublon a répondu à nos questions lors d'un entretien en longueur, franc et humain.
Une interview préparée par Antoine Comte, avec la complicité de Greg Adnot, Alexis Viloin, Romuald Piniac, Bertrand Poirier, Gaëtan Jeanson, et Joé Gutleben.
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