L'athmosphère est toujours aussi pesante à l'Institut supérieur des Beaux-Arts de Besançon. L'enquête administrative n'a pas encore été rendue publique. Les esprits s'impatientent, alors qu'un collectif apporte son soutien au directeur Laurent Devèze. Explications.
La rentrée 2020-2021 a été fort mouvementée à l'ISBA Besançon, après des dénonciations anonymes visant une partie de l'équipe encadrante (lire notre article). Sexisme, agressions sexuelles, deal de drogue, soirées clandestines... De nombreux abus avaient été mis en lumière à la suite des publications d'un groupe sur les réseaux sociaux : "Balance ton école d'art".
Laurent Devèze, directeur de l'établissement bisontin financé par la Ville de Besançon, avait été pointé du doigt, sans être nommé directement, comme étant l'un des instigateurs d'un système favorisant une certaine frange des étudiants, au détriment des autres. Son nom n'avait d'ailleurs pas été dévoilé officiellement dans la presse et sur les réseaux sociaux mais à l'ISBA, les bruits de couloirs n'en étaient plus depuis plusieurs mois.
Une lettre de soutien au directeur, publiée sur internet sous l'adresse quiveutnoyersonchien.fr et signée d'un collectif anonyme, en date de mars 2021, vient d'être diffusée à la presse. "Nous sommes un collectif constitué autour de l’objectif commun de défendre Laurent Devèze et son administration" écrivent les intéressés, que nous avons contactés mais qui n'ont pas encore donné suite à nos sollicitations. Les rédacteurs de la lettre souhaitent dénoncer ce qui leur apparaît comme "une injustice orchestrée visant à évincer, discréditer et salir le directeur de l’Institut Supérieur des Beaux-Arts par des moyens inacceptables".
De nombreux témoignages ont été recueillis et nous avons aujourd’hui de bonnes raisons de penser que cette enquête n’a produit aucune conclusion corroborant ces dénonciations diffamatoires à l’égard de Laurent Devèze et son administration.
Ces derniers demandent à la maire de Besançon, Anne Vignot, de rendre publiques les conclusions de l'enquête administrative diligentée par la Ville, l'accusant au passage d'être "dans l'incapacité à se dégager de l'influence d'un groupe de pression".
"Nous communiquerons dans quelques jours"
Le climat délétère perdure donc à l'ISBA, établissement de renom, alors que l'enquête administrative, qui devait être rendue publique fin 2020, semble toujours en cours. Il faut dire qu'une majorité d'élèves n'a pas souhaité s'exprimer sur ce sujet. Ce sont des professeurs ainsi que des membres de l'encadrement, visiblement divisés sur la question, qui ont majoritairement participé à l'enquête.
Joint par nos soins, Anne Vignot, maire de Besançon, nous a expliqué que 53 personnes ont été entendues sur ce dossier. "Si sanctions il doit y avoir, elles ne doivent pas être contestables. Vous comprendrez nos exigences dans la procédure" nous expliquait d'ailleurs la maire de Besançon fin décembre, suite à notre relance concernant l'ISBA Besançon.
Le moindre nom qui semble être associé à des choses qui ne devraient pas avoir lieu, fera l'objet d'une sanction administrative. On sera intransigeants, mais on veut être dans une extrême justice. Il ne faudrait pas qu'on commette des erreurs.
La mairie de Besançon nous a indiqué ce lundi 29 mars que les conclusions de l'enquête administrative ont été reçues : "Nous communiquerons dans quelques jours."
"Cette enquête, prétendument objective et impartiale, s’étire douloureusement en longueur et tourne au pugilat" insistent les soutiens au directeur Laurent Devèze, dans leur lettre publiée sur la toile.
Deux groupes s'opposent
Désormais à l'ISBA, deux groupes s'opposent, selon les dires de certains professeurs : les pro et les anti-Devèze. "Sans savoir les noms, on peut se douter qui se cache derrière cette page de soutien au directeur, avec tous les “amis” que Laurent Devèze aide de manière privilégiée depuis plusieurs années et qui ont des intérêts à ce que celui-ci reste encore en place pour bénéficier de ces privilèges" nous confie un professeur de l'ISBA qui a participé à l'enquête administrative, impatient lui aussi d'en connaître les conclusions pour ne plus "avancer à l'aveugle vu le contexte de plus en plus pesant". Et de conclure que de leur côté, "les 230 élèves en ont ras le bol."
Certains d'entre eux ont par ailleurs diffusé un tract répondant au "mot du directeur" apparaissant sur le site internet de l'école, durant la Manifestation pour les droits des femmes qui a eu lieu le 6 mars dernier à Besançon. On peut y lire : "Depuis septembre, aucune mise à pied n’a été exigée par la mairie, alors que les accusés font partie de l’équipe administrative et pédagogique. Comme dans de nombreuses institutions et écoles, l'administration préfère le silence et la passivité au mépris de la parole des victimes. Vous avez failli à votre devoir de nous protéger. Vous avez perdu votre droit d’habiter cette école qui nous est chère."
A l'ISBA, le retour au calme devient très pressant. Tous attendent que l'enquête administrative délivre les esprits de cette guerre froide débutée en septembre 2020. Joint par nos soins concernant le volet judiciaire de cette affaire, Etienne Manteaux, procureur de Besançon, n'a pas donné suite.