VIDEO. Comment le réalisateur Xavier Dolan a remis au gout du jour une pièce de Jean-Luc Lagarce

Jean-Luc Lagarce est l'un des plus grands créateurs de sa génération. L'adaptation de sa pièce de théâtre "Juste la fin du monde" par Xavier Dolan va remettre au gout du jour l'artiste qui s'est éteint en 1995, emporté par le SIDA.

Lorsqu'en 2016, Xavier Dolan reçoit le Grand Prix du Festival de Cannes pour le film Juste la fin du monde, nombre de cinéphiles découvrent le nom de l'auteur à l'origine de la pièce dont s'inspire le jeune prodige montréalais : un certain Jean-Luc Lagarce.

Bien connu des amateurs de théâtre, ce natif d'Héricourt, disparu prématurément en 1995 à l'âge de 38 ans, semble pourtant oublié en dehors des cercles lettrés quand le triomphe du film, qui remportera bientôt trois césars, jette un coup de projecteur mérité sur une œuvre immense et respectée bien au-delà du monde du théâtre francophone.

En effet, la plupart des Bisontins l'ignorent, mais leur ville fut, au tournant des années 80, un des laboratoires où s'inventait le théâtre actuel. Jean-Luc Lagarce apparaît à bon droit comme le catalyseur de cette aventure collective qui perdure aujourd'hui à travers une maison d'édition et d'innombrables mises en scène sur l'ensemble des continents. Car Lagarce demeure, avec Bernard-Marie Koltès, l'un des auteurs français contemporains les plus joués dans le monde.

Malgré une langue parfois déroutante, l'humanité de son propos et la puissante simplicité de ses enjeux alimentent un intérêt qui ne se dément pas. Le succès du film de Dolan en témoignera jusque sur les marches de Cannes. Entré au répertoire de la Comédie Française en 2008, son œuvre aura figuré au programme de l'Agrégation de lettres et est régulièrement étudiée dans la perspective du Baccalauréat. Une reconnaissance éclatante, quoiqu'un peu cruelle au regard du destin d'une de ces trop nombreuses victimes du SIDA, fauchée sur le seuil d'une reconnaissance que son talent, et l'effort de ses proches, impose néanmoins crescendo depuis sa disparition.

Cet épisode de Besançon la Romanesque souligne cependant que résumer la figure de Jean-Luc Lagarce à celle de l'artiste maudit ne saurait rendre justice à celui que la critique et ses pairs avaient déjà salué de son vivant, malgré quelques déconvenues vexatoires. Silhouette familière du Besançon des années 80, dont certains habitants se souviennent avec émotion, Jean-Luc Lagarce aura d'abord été un meneur de troupe théâtrale, et un entrepreneur culturel audacieux, dont le fruit perdure jusqu'à nos jours.

Les solitaires intempestifs, la maison d'édition qu'il contribuera à lancer, est aujourd'hui, et toujours depuis Besançon, une institution incontournable dans le monde du théâtre vivant : son catalogue compte à ce jour plus de six cents textes. Sur les rayons des librairies, sur nos écrans ou sur les planches, Lagarce est partout, et sa postérité, plus vivante que jamais.

En savoir plus 

► Le site de ce monument du théâtre francophone contemporain, les Solitaires intempestifs, éditeur bisontin depuis 1992.
► Sur le site Théâtrecontemporain.net, biographie synthétique de l'auteur français le plus joué depuis le début du XXIᵉ siècle.

Texte d’Alexandre Perret-Gentil (Dans la Boucle productions)
Retrouvez les 10 épisodes de la série Besançon la Romanesque en intégralité sur France.tv.