Quatre semaines de fermeture pour les boîtes de nuit, à compter du 10 décembre. C’est l’annonce faite par le Premier ministre Jean Castex lundi 6 décembre, à la suite de la hausse des contaminations au Covid-19 en France. En Franche-Comté, cette mesure inquiète les patrons de ces établissements. Ils sont déjà éprouvés par les deux autres fermetures subies au cours des première et deuxième vagues.
Rideau sur le monde de la nuit, une fois encore. Dès le vendredi 10 décembre, les boîtes de nuit de France doivent de nouveau fermer pour un mois. La mesure annoncée par le Premier ministre Jean Castex fait suite à l’augmentation des cas de Covid-19 dans le pays. Le Gouvernement estime que ces lieux peuvent contribuer à propager la maladie. En Franche-Comté, les gérants de discothèques sont surpris de cette décision.
On se fait tous avoir. Pendant ce temps, on voit des meetings politiques à plus de 10.000 personnes sans pass sanitaire. Notre profession est la première à avoir appliqué le pass sanitaire
Antonin Borie, gérant de l'Antonnoir à Besançon (Doubs)
Injustice et incompréhension
Antonin Borie est à la tête de l’Antonnoir, établissement de nuit de Besançon. Il ressent à la fois de la colère, mais aussi de l’injustice et de l’incompréhension.
« On se fait tous avoir. On ferme les discothèques : c'est un effet d'annonce facile. Pendant ce temps, on voit des meetings politiques à plus de 10.000 personnes sans pass sanitaire. Notre profession est la première à avoir appliqué le pass sanitaire. La seule à vérifier leur authenticité et surtout la seule à avoir mis en place une traçabilité. De notre côté, on a même mis en place des préventes nominatives, quitte à fâcher certains de nos clients. Par deux fois, ça a permis à l’Assurance-Maladie de retracer les cas contact potentiels. On a même parfois réduit les jauges d’accueil par nous-mêmes, quand il y avait vraiment du monde », regrette le patron du bar-boîte de nuit.
Cette fermeture, il s’y attendait et il estime que ce n’est pas une vraie solution. « Fermer les boîtes de nuit ne fera que déplacer le problème : les jeunes iront dans des fêtes que l’on ne peut pas contrôler. C’est la voie ouverte à des rassemblements sauvages où la maladie peut se propager », estime Antonin Borie.
Il redoute maintenant les conséquences pour les quatre semaines à venir : « Psychologiquement, on est à plat. Il a fallu du temps pour reconstituer une équipe, après les confinements passés. Le fonds de solidarité ne suffit pas pour nous soutenir, car il ne prend pas en compte le manque à gagner. Il faut aussi le retour du chômage partiel. On ferme mais il y a toujours les salaires, les loyers, les prêts à gérer. Pendant les confinements passés, j’ai même dû chercher les économies, en allant même jusqu’à fermer mon abonnement Spotify [NDLR : un fournisseur de musique sur internet] ».
250.000 euros de pertes
Les économies, Frédéric Chapuis va devoir en garder aussi. « Je suis dégoûté. Je n'ai pas de vision sur les quatre prochaines semaines, et je risque de perdre jusqu’à 250.000 euros de chiffre d’affaires », s’indigne le dirigeant de la boîte de nuit 3ème Club aux Fins (Doubs). Le dirigeant avait déjà pris ses dispositions. Il avait d’ores et déjà prévu d’organiser la soirée du Nouvel An, dans son établissement. « 60.000 euros de boissons, et mon prestataire avait prévu de son côté 150.000 euros de stock. Sans compter la quarantaine d’annulations de musiciens qu’il faut gérer », rappelle Frédéric Chapuis.
À présent, le responsable du 3ème Club ne se fait pas de faux espoirs : « Le Gouvernement nous dit qu’il ne s’agit que d’un mois de fermeture. À la première vague, on nous avait déjà tenu ce discours. Ça a duré finalement sept mois. Même chose lors de la deuxième vague, c’était un mois puis ça s’est transformé en neuf mois rideau baissé. Au total, ça a donné un an et demi de fermeture ».
Une réunion des représentants de gérants de boîtes de nuit doit se tenir dans les prochains jours avec Alain Griset, Ministre des petites et moyennes entreprises. Fréderic Chapuis en attend beaucoup : « On ne doit pas avoir juste le choix entre les 10% du chiffre d’affaires ou les 10.000 euros qui sont proposés par le fonds de solidarité. C’est insuffisant et en plus c’est versé tardivement. J’ai le souvenir d’avoir fermé le 13 mars 2020 et de n’avoir touché mes premières aides que le 28 octobre 2020 ».
Le milieu des boîtes de nuit représente en France 1.200 établissements et recourt à près de 30.000 emplois directs et indirects.