Enseigner est un métier. Ces derniers jours plus que tout autre, chaque parent en est intimement convaincu. Depuis le 16 mars, les professeurs ont du se réinventer pour maintenir le lien pédagogique et surtout celui qui les unit à leurs élèves contraits au confinement en raison du coronavirus.
Pour Christelle Rimbert, professeure d'arts plastiques en collège, la journée de classe commence dès 7h. Depuis le 16 mars, c'est son ordinateur qui lui permet de garder le lien avec près de la moitié de ses 380 élèves... des enfants qui vivent pour la plupart en cité et qui "prennent de plein fouet cette fracture numérique. On s'est vite rendu compte que beaucoup n'avaient pas d'ordinateur et utilisaient donc un portable avec des cartes prépayées pour continuer à suivre l'école, ce qui n'est pas gérable sur la durée. Mais la conseillère principale d'éducation (CPE) de l'établissement a fait un travail remarquable en identifiant au plus vite les élèves déjà "largués" et en appelant chaque famille."
Une nouvelle gymnastique intellectuelle
Christelle enseigne depuis 29 ans, pourtant, malgré cette expérience, elle estime que la "charge mentale est très lourde, ce n'es pas la même sollicitation qu'en classe ... là, on gère à la fois l'urgence et le ralentissement du temps, c'est une nouvelle gymnastique intellectuelle. Ca révolutionne notre quotidien et celui des enfants, la distance change tout". Certains de ses collègues avouent même avoir la "nausée" devant leurs écrans. Et puis, il faut aussi gérer son propre quotidien ...
Christelle a deux enfants à la maison et un mari qui ne peut télétravailler, alors il faut naviguer entre vie professionnelle et vie personnelle comme Julie Rousselet, institutrice à Métabief et maman elle aussi de deux adolescents. Julie gère sa classe de 25 élèves de CE2 / CM1 à distance depuis 10 jours. Et cela fonctionne plutôt bien dans cette période qui peut être "anxiogène pour les enfants et pour les parents aussi. On a beaucoup de familles de soignants chez nous, et on sent bien que pour ces enfants, c'est compliqué mais chacun fait au mieux dans la situation".
"On fait le maximum pour garder le contact et continuer la progression même si ce sont surtout des révisions, ce qui compte c'est de les accompagner parce que passée l'euphorie de ne plus aller à l'école, l'angoisse est là pour beaucoup d'enfants ... il faut être indulgent envers eux et envers leurs parents."
Déculpabliser les parents
"On sait bien qu'ils font au mieux" nous confie Julie. Il ne faut pas culpabiliser si on ne peut pas tout faire. "Ce n'est qu'une parenthèse dans notre vie" dit-elle.
Surtout "ne mettez pas la pression à vos enfants" ajoute Christelle Rimbert "et communiquez plus que jamais avec eux pour que leur maison ne devienne pas une prison".
La musique à distance aussi ...
Enseigner la musique à distance peut paraître surréaliste et pourtant cela fonctionne aussi. Hervé Laurent professeur de hautbois au Conservatoire de Besançon a choisi la vidéo pour poursuivre son enseignement."Il faut surtout pouvoir vérifier si les enfants tiennent bien leur instrument, jouent juste... alors ça ne remplace évidemment pas le cours en vrai mais le lien est maintenu".