Témoignages. "Le travail en groupe n'existe plus", les enseignants s'adaptent face au confinement

Publié le Mis à jour le Écrit par Lucie Thiery
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Pour faire face au coronavirus, depuis lundi 16 mars et « jusqu’à nouvel ordre », quelque 210 000 élèves doivent rester chez eux en Franche-Comté. Mais comment  professeurs des écoles et enseignants assurent une continuité pédagogique durant ce confinement ? Ils témoignent.

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Pour enrayer la propagation du virus Covid-19, le président de la République Emmanuel Macron a décidé la fin des regroupements d'élèves dans les écoles, collèges et lycées depuis le 16 mars et jusqu'à nouvel ordre. Le ministre de l'éducation Jean-Michel Blanquer a promis d'assurer la « continuité pédagogique » pour les 12 millions d'élèves en France. En Franche-Comté près de 210 000 élèves devront rester chez eux.

Les quelque 20 000 enseignants doivent donc adapter leurs cours et fournir les ressources à tous leurs élèves. Entre classes virtuelles, cours à distance via les ressources du CNED, serveurs dédiés, courriels, chaque établissement s'organise à sa manière pour assurer une continuité pédagogique. Une situation inédite qui pose parfois des difficultés.

Pour l'instant j'ai des retours positifs des parents et des élèves


Dans la petite école de Chambornay-lès-Pin, en Haute-Saône, par exemple, après concertation, les professeurs ont opté pour l'outil numérique padlet. C'est une solution en ligne pour créer des espaces de travail semblables à des tableaux.
« On a d'abord pensé à créer un blog mais cela risquait de manquer de lisibilité et d'être un peu fouilli », explique Raphaël. Avec ses élèves de trois niveaux (CE2 CM1 CM2), cet instituteur met en place une sorte de classe virtuelle. « Chaque jour je vais leur envoyer par mail un lien qui conduit vers un tableau de bord en ligne sur lequel ils trouveront des documents pédagogiques en format PDF à télécharger et à imprimer pour les exercices », explique-t-il. « Pour l'instant j'ai des retours positifs des parents et des élèves » se rejouit-il.

 



De son côté, l'école primaire de Bethoncourt utilise son site internet pour mettre à disposition des classes virtuelles. "Le directeur de l'établissement a prévenu tous les parents par sms dès vendredi soir" explique un instituteur d'une classe de CE2.

Et pour les élèves qui n'ont pas d'équipements informatiques ?


5 % des élèves ne disposent pas d'équipements numériques. « Quand la question informatique ne pourra être résolue à court terme, ce seront des documents papiers que l'on donnera », a indiqué le Ministre Jean-Michel Blanquer dans une interview à franceinfo. Les établissements scolaires vont rester ouverts au moins une partie de la journée. Ainsi à l'école primaire de Chambornay-lès-Pin, (Haute-Saône), le directeur assure une permanence quotidienne de 8h30 à 10h30 pour donner accès aux documents et exercices imprimés.
 


 

Garder le lien avec l'élève et les parents


Est-ce que les parents joueront le jeu ? « J'ai peur que le suivi ne se fasse pas correctement à long terme, et crains que des inégalités se creusent entre les foyers » s'inquiète un enseignant d'un établissement du réseau d'éducation prioritaire (REP). Parmi ses élèves, certains vivent dans des familles d'origine étrangère qui ne maîtrisent pas parfaitement la langue française.
Dans ce contexte inédit, les établissements s'adaptent donc au jour le jour. « A distance, il sera plus compliqué de personnaliser l'accompagnement des élèves » déplore-t-il. Il organisera une permanence téléphonique à heure fixe pour répondre à toutes les questions de ses élèves et parents. « Avec les autres professeurs, nous réfélchissons à créer un temps d'échange collectif en visioconférence ». Le plus frustrant confie l'instituteur c'est que « les échanges entre élèves, l'entraide, le travail de groupe n'existent plus », des moments pourtant enrichissants.
 


Des inégalités entre lycéens et collégiens


Le premier et second degré ne disposent pas des mêmes outils pour passer au tout numérique.
« Dans le premier degré, les enseignants n'ont pas l'habitude ni les équipements et interfaces nécessaires pour le travail à distance »
alerte Nathalie Faivre, secrétaire académique SNES-FSU du Doubs, syndicat du second degré. Dans le second degré en revanche, il existe un Espace Numérique de Travail (ENT). Sauf que ce lundi matin, les élèves comme les enseignants ont eu le plus grand mal à s'y connecter. En effet, face au très grand nombre de connexions simultanées, le portail n'a pas tenu, saturés, les serveurs ont lâché. Le ministère de l'Éducation nationale assure avoir identifié le problème, qui sera réglé dans les jours à venir.
 



« Ce confinement risque à long terme d'accentuer la fracture sociale et numérique entre les élèves », prévient la représentante syndicale. D'autres questions se posent quant à la tenue des prochaines épreuves de contrôle continu (E3C) prévues fin avril pour les classes de première. « Il me paraît impensable de maintenir ces examens si la situation perdure », avertit Nathalie Faivre du SNES-FSU.


C'est aussi l'occasion d'innover

Pour cette autre enseignante de français dans un établissement privé du Territoire-de-Belfort, ce confinement obligatoire est l'occasion d'amener les élèves à gagner en autonomie. "Ils vont beaucoup apprendre de cette expérience". L'enseignante n'a pas rencontré de difficultés particulières pour adapter le contenu de ses cours.

"Il a fallu faire le deuil de toute la part d’improvisation et de construction participative d’un cours en présentiel. Je donne des activités à faire à mes élèves en amont sous des formes variées, puis je leur transmets ensuite un corrigé enregistré en MP3 afin qu’ils puissent l’écouter et prendre des notes comme bon leur semble, sur ordinateur, tablette, smartphone, ou autre. Je pense que le fil de ma voix les guidera un peu comme en classe et avec ce système ils peuvent travailler à leur rythme et selon leurs moyens".

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