"Le sport a été ma bouée de sauvetage", un an après avoir découvert le volley assis, elle participe aux Jeux Paralympiques de Paris

Un an et demi après son amputation et 12 mois après avoir commencé le volley assis, Séverine Baillot sera aux Jeux Paralympiques de Paris (28 août - 8 septembre). Une ascension fulgurante qui lui permet d’apprendre à vivre avec son handicap.

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C’est un changement de vie radical. Il y a tout juste trois ans, Séverine Baillot n’aurait pas pu imaginer un tel destin. Mais voilà, seulement un an après avoir découvert sa discipline, le volley-ball assis, elle sera avec l’équipe de France féminine aux Jeux Paralympiques de Paris 2024. Une toute jeune équipe qui fera sa première apparition lors de cette édition. 

Mais comment une mère de famille venue du petit village de Saules, près de Besançon dans le Doubs, s’est retrouvée au poste de central dans une équipe nationale, seulement dix mois après avoir découvert la discipline ? 

Une détermination sans faille

En mai 2021, Séverine, voit sa vie bouleversée par un accident de moto. Sévèrement blessée à la jambe, elle refuse d’abord l’amputation, mais après un an et demi de souffrance, elle revient sur sa décision et les médecins lui enlèvent son pied gauche en janvier 2023. Après des complications, elle est finalement amputée juste en dessous du genou. S’ensuit une longue et pénible rééducation.

Cela a fait un an au mois de juin (2024) que j’ai réussi à remarcher

Séverine Baillot

Très vite, Séverine sait que pour se reconstruire, elle va avoir besoin du sport. Elle qui a toujours été une grande sportive, qui a longtemps pratiqué l’équitation et connaît le monde de la compétition. Alors, seulement deux mois après son amputation, elle s’intéresse à l’aviron et passe une journée de para-détection “mon moignon n’était même pas cicatrisé, avec le recul ce n’était peut-être pas la meilleure chose à faire” rit-elle.

Finalement, des complications médicales l’obligent à prendre un peu plus de temps. Alors qu’elle est en centre de rééducation à Nancy, elle entre en contact avec une athlète de volley assis, sur les réseaux sociaux. Elle ne connaît pas encore la discipline, et n’a pas pratiqué le volley depuis le collège, mais sa volonté prend le dessus. Au début du mois d’août 2023, Séverine sort du centre de rééducation, elle est alors invitée à se rendre au CREPS (Centres de ressources, d'expertise et de performance sportive) de Vichy pour passer quatre jours avec l’équipe de France féminine de volley assis et découvrir la discipline. 

Quand Séverine raconte ce premier contact avec son tout nouveau sport, sa détermination sans faille transparaît dans son regard et sa voix ne laisse aucune place à l’interprétation : la réussite était la seule et unique option.

Le but, c'était de chercher le truc le plus improbable, un défi, je m’étais juré d’entrer partout, là où les portes s’ouvriraient, et de ne reculer devant rien.

Séverine Baillot

“Le sport a été ma bouée de sauvetage, c’est ce qui me permettait de me projeter, de pas me sentir trop diminuée” ajoute-t-elle.

Et puis tout s’enchaîne 

À son arrivée au CREPS, Séverine Baillot se donne à fond, mais reste limitée par son handicap : “On a plus le même corps qu’avant, il faut tout se réapproprier, on marche plus comme quelqu’un d’ordinaire, j’avais plus de muscles ni rien, c’était vraiment recommencer de moins un” raconte l’athlète.

En plus du rapport au sport dans son ensemble, il y a l’apprentissage du volley assis. Une discipline qui demande force et technique. Le sport se pratique assis sur le sol d’un terrain de volley, sans prothèse, le terrain est réduit (10 mètres par 6 mètres) et le filet est plus bas, il est 1,05 m pour les filles, 1,15 m pour les garçons, 1,10 m en mixte. Mis à part ces particularités, les règles sont sensiblement les mêmes qu’au volley.

Les premiers jours sont difficiles pour Séverine, qui a du mal à être conciliante et patiente envers elle-même. 

C’était compliqué d’accepter de tout recommencer à zéro, de voir les autres réussir et pas soi, on ne m’avait pas mis d’ultimatum, mais bon, moi, je n’aime pas vraiment l’échec.

Séverine Baillot

À l’issue de ces quatre jours, le ciel lui tombe sur la tête, le staff lui propose de rejoindre l’équipe et de participer aux championnats d’Europe de volley assis, au début du mois d’octobre, soit à peine cinq semaines après avoir découvert la discipline. “Au départ, j'ai éclaté de rire, je leur ai dit ‘elle est bien sympa votre blague, mais je ne sais pas jouer, je n'ai pas envie d’être ridicule” se souvient-elle. “Ils m’ont répondu que ce n’était pas mon problème, qu’ils étaient là pour m’apprendre, et qu'ils avaient besoin de moi pour tout le reste, alors j’ai dit, on y va, on verra bien”. 

"Il y a un an, on espérait surtout qu’elle arrive à remarcher"

Séverine sort du CREPS le 22 août, elle doit alors trouver un club de volley assis avant la fin du mois pour pouvoir s’entraîner et participer aux Championnats d’Europe. Cette discipline est peu connue et le nombre de clubs particulièrement réduit. La sportive tente le tout pour le tout, elle contacte les deux clubs de volley de Besançon par mail et leur raconte son histoire. Le président de l’ASPPT Besançon volley-ball, Eric Talfer, la rappelle immédiatement : “j’ai été un peu interpellé, son histoire était complètement folle, je lui ai dit laisse-moi un peu de temps pour m’organiser, une heure après, je la rappelais et on se lançait dans l’aventure.” témoigne l’entraîneur. 

Plusieurs fois par semaine, Séverine se rend donc à Besançon pour s’entraîner avec Eric. 

Ce qui était très intéressant, c'était d’entraîner quelqu’un qui avait une motivation sans faille, elle n'était jamais fatiguée, jamais démotivée

Eric Talfer

Entraîneur et président de l'ASPTT volley-ball

En plus de ses entraînements à Besançon, le gymnase d’Ornans, un bourg près de la capitale comtoise et de son village, lui met aussi à disposition des créneaux pour qu’elle puisse s’exercer plus près de chez elle.

Au mois d’octobre, elle découvre la compétition de volley assis, avec le Championnat d’Europe. “C’était une aventure incroyable, je pensais qu’ils allaient me laisser sur le banc, mais finalement, ils m’ont mis sur le terrain dès le départ" se remémore l’athlète. “J’ai fait ce que j’ai pu, et je pense que je n'ai pas trop mal fait mon taf pour une débutante” complète-t-elle. 

Si Séverine a pu se lancer dans cette aventure, c'est grâce à sa force de caractère, mais aussi au soutien sans faille de ses proches. Son mari, Raphaël, n’en revient toujours pas de ce changement de vie : “C’est quelque chose d’extraordinaire, et complètement inattendu. Il y a un an, on espérait surtout qu’elle arrive à remarcher et puis à vivre le plus normalement possible. Ce qui s’est passé en un an, c'est irréel”, confie-t-il. Avant d’ajouter : “Il y a des moments, il faut qu’on se pince un coup pour réaliser que ce n’est pas juste un film, parce que ce n’est pas quelque chose qui parait à portée de main pour le commun des mortels. Ce qu’elle arrive à faire maintenant par rapport à il y a un an, c'est absolument fou”.

Et finalement, les Jeux Paralympiques

Durant tout l’hiver, Séverine va s’entraîner très dur, et s’investir pleinement en participant à plusieurs compétitions. Au mois de juillet 2024, c’est la consécration, l’équipe de France féminine de volley assis apprend qu’elle va participer aux Jeux Paralympiques de Paris. “C’est un truc de dingue, certains s’entraînent pendant 20 ans pour ça” s’exclame-t-elle. “J’avais toujours eu les Jeux en tête, mais dans ma discipline (l’équitation) ça aurait été trop compliqué donc je me suis dit là, il faut tout donner pour pas avoir de regret”. Et après avoir tant souffert ces dernières années, cette opportunité représente beaucoup pour la famille Baillot dans son ensemble.

C’est peut-être aussi un retour des choses par rapport à tout ce qu’on a vécu de négatif.

Raphaël

Mari de Séverine Baillot

L’équipe de France est une toute jeune équipe, et la concurrence est rude, mais Séverine et ses coéquipières vont tout donner pour montrer leur savoir-faire et aussi donner un coup de projecteur à cette discipline méconnue. “On va affronter en poule les trois meilleures équipes, l’Italie, la Chine et les USA. J’espère surtout pouvoir réduire les écarts de points, les gagner ça va être très dur, mais pourquoi pas gagner un set” rêve Séverine. “Ce qui est sur ce qu’on ne sera pas là juste pour faire beau”.

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Entourée par sa famille et son entraîneur, Séverine va probablement vivre le rêve d’une vie dans les prochains jours. Un rêve encore inimaginable il y a quelques mois et qui lui a permis de se reconstruire après un accident venu bouleverser sa vie. Une histoire extraordinaire qui montre l’impact que le sport peut avoir. Séverine va profiter pleinement de ce moment historique. Puis dans les prochains mois et les prochaines années, elle va continuer de s’entraîner, de mettre en avant la discipline. Avec, pourquoi pas, les Jeux Paralympique de Los Angeles 2028 en ligne de mire.

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