VIDEO. "On a perdu notre lac", à Villers-le-Lac, la sécheresse a métamorphosé les paysages du Haut-Doubs

Comme évaporé. Disparu. Une partie des bassins du Doubs, et le lac de Chaillexon dans le Haut-Doubs ne sont plus que sédiments et champs d'une verdure inquiétante. Un paysage à la fois mystérieux et grave, qui devient une habitude. Déjà en 2018, le secteur avait été au régime sec. 

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"Il n'y a quasiment plus rien" explique Nassim Bendadi qui a pu photographier le secteur ces jours-ci. Au milieu du lac de Chaillexon, coule un mince filet d'eau. Tout ce qu'il reste du Doubs à cet endroit.
 


Le lit de la rivière, où l'on vient patiner les hivers les plus froids, est désormais marqué par d'immenses fissures. La végétation a repris son droit, tapissant le lac d'une moquette verte. 

 
 


"Moi, je vois cela avec un oeil artistique, mais oui, à Villers-le-Lac, les gens sont tristes, ils se demandent si on a perdu le lac. C'était déjà arrivé en 2018, mais là c'est de plus en plus tôt" ajoute Nassim.

Dès la mi-juillet, les bassins du Doubs ont commencé à manquer d'eau. "Les gens disent qu'il y a des problèmes de failles, mais je pense que c'est un tout, les constructions, l'agriculture, le climat..." résume le vidéaste amateur.

   


"Cela fait de la peine de voir le Doub si bas"

A Villers-le-Lac, la navigation touristique reste encore possible sur la partie supérieure du bassin qui mène vers le fameux saut du Doubs. Les compagnies ont repoussé leurs pontons d'embarquement là où il reste encore de l'eau. 
Les touristes de septembre découvrent les paysages avec plaisir, mais peine quand ils voient les conséquences de la sécheresse. "C'est un beau paysage, mais le niveau d'eau n'est pas très beau à voir" confie un touriste. "On nous a dit qu'il y avait 8 mètres de moins qu'en temps normal" précise une dame. 
Pour la capitaine de la compagnie du saut du Doubs, la sécheresse n'est pas la seule responsable. "On a ici deux résurgences, à 30 mètres de profondeur, il y a un trou qui s'est élargi sans doute avec un petit tremblement de terre, et l'eau ressort sous la cascade du saut du Doubs. Et il y a d'autres failles qui aspirent l'eau" précise le capitaine.

Un espoir pour l'avenir ? Mettre des bâches sur cet éboulement pour maintenir un niveau normal aux bassins du Doubs et au lac de Chaillexon appelé aussi lac des Brenets côté suisse. 

 


Un déficit pluviométrique depuis la mi-mars 


Dans le Doubs, la sécheresse de l'été 2020 a commencé en fait dès la mi-mars. Si l'on regarde les précicipations tombées à Besançon, on stagne en cette mi-septembre à 560 mm de pluies depuis le début de l'année. "En moyenne, nous devrions être à 730 mm", explique Brigitte Delsalle prévisionniste à Météo-France Besançon. "Déjà en 2019, l'été et l'automne avaient été secs, on avait retrouvé des pluies en novembre. Fin 2019, on était en déficit de précicipitations. Au printemps 2020, nous n'avons pas comblé ce déficit" ajoute la prévisionniste. Et l'été 2020 est venu encore noircir le tableau de la sécheresse.

 

La pluie appelle la pluie, la sécheresse appelle la sécheresse

Bruno Vermot-Desroches, directeur Météo-France Besançon



Une sécheresse récurente. A Villers-le-Lac, le scénario pourrait bien se répéter les étés prochains. "Quand il fait chaud avec du vent, comme cet été, on perd 5 à 10 mm du niveau d'eau par jour" explique Bruno Vermot-Desroches. "Le taux d'humidité des sols est actuellement très bas, on est proche des records" ajoute-t-il. Pas de pluies, pas d'humidité dans l'air, pas d'eau qui se transforme en nuages, c'est le cercle vicieux.

"On tend vers une fréquence de sécheresses plus rapprochée si on a la température qui favorise l'évapotranspiration...Même s'il pleut autant qu'avant, on aura cette évapotranspiration. Ce n'est pas qu'une question de pluies" résumé le météorologue. "Tous les étés, même si on a 100 mm d'eau dans le mois, on est en déficit hydrique" conclut-il.

Sec, beau, chaud, vent : le cocktail apprécié par les vacanciers, n'est pas celui qui convient aux lacs et rivières de Franche-Comté.

Depuis le début de l'année, il manque 30% de précipitations en gros pour atteindre en Franche-Comté, une année moyenne de précipitations. "Depuis mi-2018 sans doute, sur un cumul de deux ans, on n'a pas trouvé aussi sec en Franche-Comté" estime Bruno-Vermot Desroches. 

 


Pluie, quand reviendras-tu ?


Pour l'instant, l'été sec semble jouer les prolongations. On pourrait même battre des recors de chaleur ce lundi 14 septembre à Besançon. "Le précédent record remonte au 14 septembre 1947, on avait eu 31,5 degrés à Besançon" explique Brigitte Delsalle, prévisionniste à Besançon. "On pourait avoir 32 à 33 aujourd'hui" ajoute-t-elle. Le record pour un mois de septembre remonte à 1895, il avait fait alors 33,5 degrés le 6 septembre à Besançon.

Les prévisionnistes ne voient pas de pluies venir humidifier les sols cette semaine. Rien sans doute avant le 22 septembre. Le déficit pluviométrique sera-t-il rattrapé cet automne ? Pas si sûr, même si on peut très vite basculer de la sécheresse aux inondations. C'est un peu la particularité de cette année 2020, marquée début mars par de fortes pluies, un mois d'avril confiné ensoleillé, une mi-mai et début juin pluvieuses, puis une nouvelle phase de temps sec. 

Pour l'instant, le département du Doubs est en sécheresse niveau crise. Même arroser son potager est désormais interdit sauf si vous disposez d'eau de récupération. 

 
 
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