Des pêcheurs du Territoire-de-Belfort et de Haute-Saône se mobilisent pour sauver les poissons des rivières asséchées précocement en raison de la sécheresse. Dans le Doubs, les pêcheurs du Cusancin demande la fermeture de la pêche. Ce collectif SOS Loue et rivières comtoises recommande aux pêcheurs de ne pas pêcher les salmonidés si l'eau est trop chaude.
Les pêcheurs sont arrivés trop tard. Tous les poissons étaient morts. Vendredi 17 juin, la fédération de pêche du Territoire-de-Belfort a voulu sauver les poissons à la confluence du Rhôme. Un important assec a coûté la vie à des poissons.
En temps normal, la fédération organise des pêches de sauvegarde mais, cette année, la sécheresse a été tellement précoce qu'ils n'ont pas eu le temps d'intervenir sur ce ruisseau.
Heureusement, les pêcheurs du Territoire-de-Belfort ont eu plus de chance à Lepuix. Le même jour, ils ont pu sauver mille truites prisonnières dans les trous d'eau de la Savoureuse en les déplaçant plus en aval, là où la rivière coule encore.
Un phénomène de sécheresse précoce
Habituellement, ce phénomène d'assec a plutôt lieu en plein milieu de l'été mais cet année, les rivières et les ruisseaux se sont asséchées très rapidement. Les pêches de sauvegarde permettent de déplacer les poissons dans des cours d'eau du même bassin versant.
D'autres ruisseaux du Territoire-de-Belfort devraient aussi s'assécher cette semaine dans les bassins versants du Saint-Nicolas et du Margrabant.
Sur le site de l'Etat Hydroreel, on voit bien que les cours d'eau sont au plus bas. Prenons le Saint-Nicolas, le graphique nous montre que son débit est réduit au néant.
Que faire ? Faut-il fermer la pêche dans ces secteurs où les ruisseaux et rivières, souvent de première catégorie, ne peuvent plus héberger les salmonidés ?
Le président de la Fédération de pêche du Doubs, Philippe Grosso, indique que l'APPMA de Baume les Dames demande la fermeture de la pêche dans le Cusancin, une rivière particulièrement meurtrie par ces rudes conditions climatiques.
Mais le représentant de la fédération du Doubs n'est pas favorable à cette fermeture, il faut selon lui, rester proches des cours d'eau. Quant aux pêches de sauvegarde, Philippe Grosso estime que "c'est voué à l'échec".
Les pêches de sauvegarde donnent bonne conscience mais nous ne sommes pas sûr que cela fonctionne
Philippe Grosso, Président de la Fédération de pêche du Doubs
Dans le Territoire-de-Belfort, la décision n'est pas encore prise. En Haute-Saône, un département où des cours d'eau sont aussi touchés par la sécheresse, il n'est pas question non plus de fermer la pêche.
Prendre des mesures de fermeture implique qu'il n'y ait plus personne pour surveiller. Les pêcheurs sont les gardiens des rivières.
Daniel Bonnard, Président de l'AAPPMA de Fougerolles (70)
La Fédération de pêche de Haute-Saône a justement prévu des pêches de sauvetage sur des affluents du Breuchin et du Rahin. Des ruisseaux de première catégorie appréciés, jusqu'à présent par les truites.
25°, une température létale pour les truites
Les salmonidés sont aussi victimes d'un autre phénomène lié au réchauffement climatique. La température des cours d'eau augmentent. D'après un article de Jean-Pierre Hérold publié sur le site de France Nature Environnement 25-90, depuis les années 80, on estime que la température moyenne de l’eau de la Loue a augmenté de 1 à 2 degrés.
A 18°, la truite et ses cousines des salmonidés sont stressées, à 25° ces poissons meurent. Les effets cumulés de la canicule et de la baisse du niveau des rivières en raison de l'absence de pluie sont dévastateurs.
Sur son site, le collectif SOS Loue et rivières comtoises invite les pécheurs à prendre la température de l'eau avant de déballer son matériel.
Au même titre que vous allez vérifier votre matériel avant de pêcher, il devient primordial de prendre la température de l’eau avant de pêcher lorsque le soleil se fait trop présent, et la sécheresse se manifeste avec des étiages importants. La raison est que les truites, au-delà d’une certaine température de l’eau passe dans un mode « survie ». Il est donc nécessaire de respecter les poissons adultes qui restent présents dans nos rivières comtoises, ne pas les pêcher dès que la température de l’eau dépasse 18°.
Jean-Pierre HéroldCollectif SOS Loue et rivières comtoises
"Canne au ratelier"
Sur son blog, le pêcheur jurassien Nicolas Germain le rappelle. C'est décidé, il laissera sa "canne au ratelier".
Je pense qu'il est indispensable de lever le pied. Le débit à ras les pâquerettes, la température de la flotte déjà bien élevée, la canicule...Trop c'est trop. J'avais déjà stoppé une semaine au premier coup de chaud de mai, mais là, vu les températures annoncées en journée et la nuit, c'est d'un tout autre niveau. Les truites auront besoin de toutes leurs forces pour tenter de passer l'épisode même si je ne me fais pas d'illusion. Pour la pêche, il reste les parcours amonts, mais comme nous allons tous avoir la même idée, cela risque de bouchonner...Pas simple de nos jours quand même.
Nicolas GermainBlog Nicolas 39
La fédération de pêche du Jura n'a pas encore pris de décision mais réfléchit à ce délicat problème qui devient récurrent au fil des ans. Pourquoi prendre une carte de pêche si c'est pour laisser sa canne au ratelier ? Et pourtant, les fédérations n'ont jamais eu autant besoin de financements pour restaurer les milieux humides.
Daniel Bonnard, président de l'AAPPMA de Fougerolles en Haute-Saône, le rappelle avec justesse. La ressource en eau devient rare. Les pêcheurs de Haute-Saône le rappelle en publiant sur leur page facebook les recommandations de la préfecture qui a pris un arrête de restriction des usages de l'eau :
Les pompages dans les milieux aquatiques, pour alimenter la population en eau potable ou pour d'autres besoins, peuvent mettre en péril l'or bleu. "La préservation des zones humides est plus que nécessaire " rappelle le pêcheur. Ces ruisseaux victimes d'assec ne paient pas de mine et pourtant ils contribuent au bon fonctionnement de tout un écosystème en abritant également tout une ribambelle d'insectes dont les truites sont friandes.