La police cantonale vaudoise a recruté un "eCop", un policier sur internet, qui a pour mission de faire de la prévention en ligne, notamment auprès des 13-16 ans. Depuis un peu plus d'un an, cet ancien inspecteur réalise et publie des vidéos humoristiques sur les réseaux sociaux.
C'est la nouvelle arme de la Police cantonale vaudoise. Un drôle de policier qui patrouille tous les jours sur les réseaux sociaux. Cet ancien inspecteur judiciaire de 47 ans est devenu le premier "eCop" de Suisse romande. François Nanchen a enfilé son nouvel uniforme le 1er mai 2022 et depuis, il se met en scène, se dédouble, se déguise.
Chaque semaine, il réalise et dégaine ses vidéos sur TikTok et Instagram pour faire passer, avec humour, des messages de prévention, notamment auprès des 13-16 ans, mais pas seulement. Arnaques sur internet, mails frauduleux, harcèlement en ligne, escroqueries, vols, cambriolages, dangers sur la route ou trottinettes électriques, "eCop François" a désormais l'œil partout ou presque !
Réduire la distance
Pour Olivia Cutruzzolà, celle qui l'a recruté, il s'agissait avant tout de réduire la distance entre la police et les jeunes. De réussir à nouer le dialogue avec ceux qui n'osent souvent pas pousser la porte d'un commissariat. "On constate que les agressions et les cambriolages diminuent, mais que les infractions sur internet augmentent, en particulier le harcèlement, les intimidations, les atteintes sexuelles, explique la cheffe de la section prévention criminelle de la police cantonale vaudoise. Mais c'est un terrain qu'on a plus de mal à occuper. Il fallait absolument être présent là où les gens sont et créer un contact." Et ce n'est pas seulement pour ses qualités de vidéaste amateur qu'elle a choisi l'inspecteur Nanchen.
On voulait un policier auquel le public puisse s'identifier, quelqu'un qui maîtrise le langage et les codes des réseaux sociaux pour pouvoir toucher nos publics cibles et d'abord les plus jeunes.
Olivia Cutruzzolà, cheffe de la section prévention criminelle de la police vaudoise
"Avant tout un policier"
Pour Olivia Cutruzzolà, il était également impératif de confier cette mission pas comme les autres à un policier et à un policier expérimenté surtout. Question de crédibilité. François Nanchen a travaillé pendant 20 ans à la police de sûreté, l'équivalent de la police judiciaire en France. Il a été longtemps affecté à la brigade des stupéfiants. Il a aussi passé six ans au sein de la cellule cyberpédocriminalité. Et contrairement à son personnage, il prend son nouveau rôle très au sérieux.
Je ne suis pas un inspecteur gadget, je suis d'abord et avant tout un policier. Et je prends ma mission très à cœur. Chaque victime est une victime de trop.
François Nanchen, alias "eCop François"
Interventions dans les collèges
Un rôle qui ne se limite pas à alimenter les réseaux sociaux car eCop François reste un homme de terrain qui multiplie les interventions IRL ("In Real Life", dans la vie réelle en Français) dans les collèges du canton, dans les classes de 8e (niveau qui correspond à la 6e en France) auprès des 11-12 ans. "Ce n'est pas un policier virtuel", sourit sa supérieure. Il voit chaque année des milliers d'enfants et d'adolescents qui le retrouvent ensuite sur internet."
Avec 46 000 abonnés désormais sur TikTok, presque 5000 sur Instagram, eCop François s'est fait un nom et une (bonne) image. "En fait, on touche une population très large, de tous âges et toutes origines", constate Olivia Cutruzzolà. Ses collègues des autres brigades n'hésitent pas à le solliciter directement pour leurs messages de prévention. Ses voisins de la police neuchâteloise relaient même ses vidéos sur leurs propres réseaux.
Mais pas de quoi s'emballer pour autant. "C'est une notoriété toute relative, tempère François Nanchen. Le plus gros compte TikTok de Lausanne compte 27 millions de followers, j'en suis encore très loin ! J'aimerais surtout que les victimes me fassent suffisamment confiance pour s'adresser directement à moi, qu'ils osent enfin affronter leurs peurs et demandent de l'aide."
En attendant, il ne manque pas de travail. "Il y a tous les jours de nouvelles arnaques sur internet, constate-t-il. C'est pourtant très facile de ne pas se faire piéger." Au point qu'il ne détesterait pas un peu de renfort. La police cantonale vaudoise réfléchit justement aujourd'hui à lui trouver un coéquipier.