Clément Turpin est arbitre international de football. L'homme originaire de Saône-et-Loire était le seul arbitre central français retenu pour la dernière Coupe du monde de football. Interview.
• Vous étiez le seul arbitre français à la Coupe du monde. Comment l'avez-vous vécue ?
Clément Turpin : "Je n'étais pas le seul, puisque j'étais accompagné de mes deux arbitres assistants qu'on oublie trop souvent à mon goût. Ça reste quand même le résultat d'une équipe, avec Nicolas Danos et Cyril Gringore.
Après, cette qualification c'était évidemment beaucoup de fierté. Représenter son pays, son arbitrage national, sur la plus belle des compétitions mondiales, c'est évidemment beaucoup de fierté."
• Vous avez également supervisé l'assistance vidéo. Que change cet "arbitrage" vidéo ?
"La vidéo a permis deux choses à mon sens. La première, d'amener de la justice sportive en cas d'erreur claire et manifeste.
La deuxième chose que l'assistance vidéo à l'arbitrage a permis, c'est d'apaiser. D'apaiser les relations qu'on pouvait avoir avec les joueurs, avec les coachs. C'est le premier bilan qu'on tire après un gros tiers de championnat."
• Est-ce que la vidéo enlève un peu de pression à l'arbitre central ?
"Quand on est arbitre, avec ou sans la vidéo, notre objectif est de produire la meilleure prestation possible. Sauf qu'aujourd'hui, on a la possibilité en cas d'erreur grossière de pouvoir rectifier cette décision."
• Comment êtes-vous devenu arbitre de football ?
"Tout simplement, j'étais un jeune éducateur. Quand j'avais 15 ou 16 ans, je m'occupais de débutants. Évidemment, le week-end, il n'y a jamais d'arbitre pour arbitrer les matchs des tout petits. C'est souvent un papa, une maman ou le jeune éducateur qui prend le sifflet, c'était mon cas.
Après six mois d'arbitrage, les dirigeants du club m'ont demandé si je voulais officialiser la chose. J'ai dit pourquoi pas. J'ai sans doute pris la plus belle décision sportive de ma vie."
• Cela fait onze ans que vous arbitrez en Ligue 1. Est-ce que vous ressentez parfois un peu de lassitude ?
"Une lassitude ? Quand on rentre sur un terrain devant 40 000, 60 000 personnes, il n'y a jamais de lassitude ! Le jour où il y aura une once de lassitude, je crois qu'il sera temps de s'arrêter. Mais ce n'est pas encore venu."
• Vous avez pu prendre des décisions impopulaires, commettre des erreurs d'arbitrage. Comment gérez-vous la situation dans ces cas-là ?
"Ça fait partie de la vie d'arbitre de prendre des décisions bonnes, aussi de temps en temps fausses. Il faut savoir rebondir, reconnaître et puis avancer. Tout simplement."
• Vous formez des jeunes qui veulent devenir arbitres. Qu'est-ce que vous leur apprenez ?
"On leur apprend l'art de la relation avec les joueurs. Évidemment, on parle un peu de technique, de prise de décision, mais surtout d'échanges.
Parce qu'être arbitre, c'est être en interaction avec les joueurs dans un petit espace, celui du terrain de foot Prendre des décisions, évidemment c'est une chose. Mais créer de la confiance, les faire accepter, c'est ce qu'il me plaît le plus."
• Est-ce que vous formez des arbitres femmes ?
"On a la chance en Bourgogne-Franche-Comté d'avoir un effectif de 40 arbitres féminines. Elles officient en priorité sur les rencontres féminines mais également les rencontres de garçons."
• Les joueurs arbitrés par des femmes se comportent-ils différemment ?
"La relation, en tout cas au début de la rencontre, est un petit peu différente. Il y a une prise de recul, un respect supplémentaire. Néanmoins, quand les coups de chaud arrivent, que ce soit une fille ou un garçon, la relation devient exactement la même."
Clément Turpin était l'invité de Pascal Gervaise dans l'émission 9h50 le matin en Bourgogne-Franche-Comté. Retrouvez son interview en intégralité.