En 1981, Martial Deschaseaux était le premier enfant du monde à bénéficier d'une greffe du foie. 41 ans plus tard, à l’occasion de la journée mondiale du don d’organes et de la greffe, le doyen des transplantés du foie en France, un habitant du Territoire de Belfort, témoigne de son parcours singulier.
C’est un message d'espoir que veut transmettre Martial Deschaseaux, 53 ans. Il y a 41 ans, ce Franc-Comtois alors tout juste âgé de 11 ans devient le premier enfant au monde à être transplanté d’un foie adulte réduit en taille par les médecins. C’est le professeur Henri Bismuth, qui l’opère, en 1981, à l'hôpital Paul Brousse de Villejuif dans le Val-de-Marne. Une première mondiale.
Son opération, ouvre la voie à de nombreuses autres transplantations et surtout, à d’autres enfants malades. “Je me dis, si je n’avais pas tenté, vous [le professeur Bismuth] n’auriez pas tenté, on ne se serait pas tous lancés et on ne pourrait même pas se parler à l’heure actuelle” se félicite l’homme, en ligne avec celui qui lui a sauvé la vie, lors du tournage d’un reportage réalisé par nos journalistes Emmanuel Rivallain et Jean-Stéphane Maurice.
“Votre fils est perdu. La meilleure chose que vous puissiez faire, c’est de refaire un enfant.”
Quand on lui annonce qu’il est atteint du syndrome de Byler (anomalie de la formation de la bile), Martial Deschaseaux, 8 ans, est condamné. “Un spécialiste était allé jusqu’à dire à ses parents : “Votre fils est perdu. La meilleure chose que vous puissiez faire, c’est de refaire un enfant” précise Claire Lorentz-Augier, biographe en Bourgogne-Franche-Comté, qui co-écrit actuellement le récit de Martial Deschaseaux. “ Je ne sais pas si j’allais avoir un avenir” se souvient l’homme.
Le teint jaune, l’allure chétive, le garçon se rend alors au cabinet du docteur Henri Bismuth, chirurgien spécialiste des transplantations hépatiques. Ce dernier se souvient : “Il était tellement pitoyable, avec sa famille qui baissait les yeux, qui n’y croyait pas. Lui m’a forcé, avec son regard dans les yeux, ses yeux jaunes. Il m’a dit “je vous en prie docteur, il faut m’opérer”. On craque. Alors j’ai dit oui.” Il lui promet droit dans les yeux “Martial, il y a une chance sur un million d’y arriver, mais je vais la tenter. Je te sauverai” . L'opération est une réussite et sauve le jeune terrifortain d’une mort assurée.
Un message d’espoir après 18 interventions chirurgicales
Malgré cela, la vie du premier enfant transplanté du foie n’est pas un long fleuve tranquille. Après cette première greffe en 1981, il y en a eu une seconde en 1984. Au total, Martial a subi 18 interventions chirurgicales. Après avoir longtemps mis de côté son histoire compliquée, ce grand amoureux de la vie est aujourd’hui déterminé à témoigner. Pour cela, il a fait appel à Claire Lorentz-Augier, écrivaine biographe en Bourgogne-Franche-Comté. Dans un livre à paraître, ils y racontent sa vie difficile mais toujours pleine d’espoir.
“La vie est un miracle. Venir au monde, c’est déjà un miracle”.
Martial Deschaseaux
Claire Lorentz-Augier écrit : “Martial m'apparaît comme un homme profondément lumineux ; un amoureux de la vie et du vivant. “Les épreuves nous font grandir, affirme-t-il dans un sourire. La nuit fait ressortir la clarté du jour”. Il ose même ajouter : “Si c’était à refaire, je le referais.” . L’homme, après 35 ans dans l’industrie, se reconvertit actuellement à la photographie .
Martial Deschaseaux se dit à jamais reconnaissant envers le professeur Henri Bismuth et envers ce ou cette donneur(se) d’organe, un ou une inconnu(e), sans qui il ne serait plus là pour témoigner.
Donner ses organes pour sauver des vies
En France, le don d’organe repose sur trois règles établies par la loi du 22 décembre 1976 : le consentement présumé (toute personne peut devenir donneur d’organes à moins qu’elle n’ait exprimé son refus de son vivant), la gratuité (toute rémunération ou avantage équivalent en contrepartie du don d’organes est interdit et sanctionné) et l’ anonymat mutuel du donneur et du receveur. En 2021, 5 276 personnes ont bénéficié d’une greffe. 27 802 personnes étaient en attente d’une greffe.