Protocoles sanitaires covid-19 sans cesse modifiés, non remplacements des absents, manque de masques...les raisons de la colère des enseignants du premier et du second degré sont nombreuses. Mais au-delà, c'est vraiment le sentiment de ne pas être considérés et soutenus par le gouvernement qui motive les professeurs après deux ans de pandémie.
"L'annonce du nouveau protocole sanitaire le dimanche 2 janvier, à la veille de la rentrée, a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase !, explique Karine Laurent, co-secrétaire du syndicat SNUipp - FSU (professeurs des écoles) pour le Doubs. Au-delà de la question des purificateurs d’air ou des capteurs de CO2, il s’agit vraiment d’un ras-le-bol généralisé. Nous avons vraiment le sentiment que l’école n’est pas considérée… »
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Des protocoles trop nombreux et changeants
Du reste, ce sont avant tout les protocoles sanitaires multiples et la gestion des cas positifs, cas contacts et retour de tests qui monopolisent les enseignants. « Les protocoles changent tous les trois jours, sont incohérents, poursuit Karine Laurent. On se retrouve à gérer (en plus de notre enseignement en classe) les cas contacts. Il faut prévenir tout le monde, gérer ceux qui partent, ceux qui reviennent, vérifier les attestations…On ne tient plus ! Les parents se retrouvent à la porte des écoles et on comprend leur colère. »
Les enseignants réclament donc un retour aux protocoles précédents : un cas positif dans une classe la fait fermer pour une semaine.
« Ce n’est pas satisfaisant non plus mais cela est davantage gérable, explique Stéphane Faucogney, secrétaire académique SE-Unsa Franche-Comté. On fait le point sur une journée pas toute la semaine. On aimerait aussi le retour des brigades mobiles de l’Agence Régionale de Santé qui faisait des tests salivaires sur une journée pour toute une classe. Les tests étaient à la charge de l’ARS et non pas des parents. Cela existait en mai et juin, mais elles ont complètement disparu !»
Dans le secondaire (collèges et lycées), le SNES-FSU compte un tiers d'élèves absents de façon perlée, car ce ne sont pas les mêmes et ils se succèdent. Les professeurs aussi tombent malades. La secrétaire générale du syndicat pour le Doubs, Nathalie Faivre raconte :" Nous nous sentons vraiment seuls face à l'épidémie. Nous en sommes au 49ème protocole sanitaire, mais ils sont de plus en plus incohérents. Plus personne ne comprend rien aux cas contacts. Nous n'avons ni tests, ni masques, ni détecteurs de CO2 pour savoir quand aérer, ni purificateurs d'air quand ce n'est pas possible. Or nous les réclamons depuis un an ! Nous, ce que nous souhaiterions, c'est qu'on n'attende pas des cas positifs pour tester les élèves. Il faudrait un test hebdomadaire par classe pour enrayer les contaminations. Et puis il y a beaucoup d'angles morts...Quid des internats ? de la cantine où les élèves sont démasqués durant un long moment ? Nous restons sans réponse."
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Le recrutement de personnel enseignant supplémentaire
Depuis plusieurs mois, le gouvernement privilégie le remplacement des professeurs malades ou cas contact, par des enseignants retraités ou des contractuels, quand il y en a. Les syndicats réclament, eux, l’embauche de personnes ayant participé au concours de professeur des écoles et se trouvant sur liste d’attente.
Ainsi l’exprime la lettre ouverte de la Fédération Syndicale Unitaire de Haute-Saône à la Directrice Académique : « Nous exigeons le recrutement immédiat de personnels par intégration d’enseignant·es d’autres départements qui souhaitent venir en Haute-Saône et par le recours aux candidats inscrit·es sur les listes complémentaires des concours du professorat. Nous refusons le recours aux contractuel.les et aux retraité·es. La continuité du service public d’éducation doit être une réalité. Nous exigeons des consignes claires et écrites à destination des personnels et des parents d’élèves lorsqu’un·e enseignant·e absent·e n’est pas remplacé·e. »
« Les contractuels ne sont pas forcément formés pour gérer des groupes de 26 élèves. Ils sont mal payés, précaires et à la fin de leur mission, on leur dit au-revoir et puis c’est tout, explique Karine Laurent. "Si l’Etat embauche des personnes inscrites sur les listes complémentaires des concours de professorat, elles deviendront fonctionnaires, devront suivre une formation à l’Inspé. C’est sûr cela coûte plus cher mais d’autres pays européens ont fait ce choix au bout de six mois, lorsqu’on a su que cette crise allait durer ! »
« Déjà hors épidémie de Covid, les remplacements dans le premier et second degrés ne sont pas assurés", précise Stéphane Faucogney, secrétaire académique SE-Unsa Franche-Comté. "Les enseignant se voient refuser des départs en formation, des classes de collège et lycées restent des mois sans professeurs…Alors évidemment, nous ne pouvons pas nous satisfaire d’annonces postées à Pole Emploi ou sur le Bon Coin. »
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La fourniture de matériel de protection et purification
Equipés en masques en tissu lorsqu’ils ont été disponibles, les enseignants à travers leurs syndicats réclament aujourd’hui des équipements plus protecteurs pour ceux qui les demandent.
Ainsi le précise la lettre ouverte de la Fédération Syndicale Unitaire de Haute-Saône : « Nous souhaitons que l’État finance l’équipement immédiat de toutes les classes en capteurs de CO2, qu’il fournisse des autotests et des masques FFP2 à tous les personnels qui le demandent ainsi que du gel hydro alcoolique et des masques gratuits pour tout nos élèves. Nous demandons le recrutement de personnels de santé scolaire actuellement en nombre très insuffisant. »
Pour Stéphane Faucogney, l’urgence concerne surtout les masques chirurgicaux. « Cela fait bien longtemps que les collègues qui en ont les moyens s’achètent des masques chirurgicaux pour se présenter devant les élèves, puisque les masques en tissus fournis par l’Education Nationale ont été jugés inefficaces par l’Agence Régionale de Santé (en septembre 2020). Mais il en faudrait pour tout le monde."
L’appel à la grève ce jeudi 13 janvier a été lancé par toutes les organisations syndicales majoritaires des premier et du second degré, le syndicat des inspecteurs d’académie (SIEN-Unsa) ainsi que par celui des chefs d’établissements (SNPDEN-Unsa) même si en pratique ces derniers ne peuvent pas faire grève, car ils se doivent d’être présents dans leurs murs, il s’agit alors plutôt d’une grève administrative.
Dans le Doubs, rendez-vous a été donné aux grévistes et leurs soutiens à 14h place de la Révolution à Besançon. Le cortège devrait ensuite passer devant le rectorat, la préfecture pour finir place Granvelle.