L'association Médecin pour demain appelle les médecins à porter un brassard noir en décembre 2024. Un symbole, mais pas que. L'objectif est de montrer la colère de toute une profession et dénoncer les dernières directives gouvernementales concernant la santé.
Si vous allez chez le médecin au cours du mois de décembre, il se peut que vous voyiez un brassard noir au bras de votre praticien. Pour cause, "décembre noir", un appel à la mobilisation lancé par l’association Médecins pour demain pour défendre la médecine de proximité, jugée comme étant une profession en danger. "L’exercice médical est muselé par les décisions politiques actuelles, fragilisant l’attractivité du métier et l'engagement des médecins auprès de leurs patients", dénonce l'association.
"Les déserts médicaux sont désertés par l'État"
Thomas Paricaud est médecin généraliste à Noidans-lès-Vesoul (Haute-Saône). Installé depuis huit ans, il est lassé des “attaques” dont la profession fait l’objet. Récemment, le décret Barnier fait grincer des dents.
Justifier nos prescriptions directement sur l’ordonnance, pour nous cela constitue une violation du secret médical.
Thomas Paricaud, médecin généraliste à Noidans-lès-Vesoul
Un secret médical pourtant inscrit dans le code de déontologie de la profession. Si c'était là le seul obstacle mis sur la route des médecins libéraux. Mais le praticien revient également sur l’obligation des jeunes médecins à s’installer dans les déserts médicaux les deux années qui suivent l’obtention de leur diplôme.
“Ça me semble beaucoup d'obliger quelqu'un qui a fait dix ans d'étude, qui arrive à 28, 29, 30 ans, à s'installer dans un désert alors qu'il a déjà peut-être une conjointe, des enfants, met-il en évidence. "Ils ne pourront peut-être pas trouver ce qu'il leur faut sur place : un travail pour la conjointe, des activités pour les enfants..."
Les déserts médicaux, ce sont des déserts tout court. Des endroits qui ont été désertés par l'État.
Thomas Paricaud, médecin généraliste à Noidans-lès-Vesoul
Non, l'État ne paye pas les études de médecine
Un argument souvent utilisé pour justifier cette obligation d’installation : l’État paye les études de médecine. Une vérité que le Dr Paricaud souhaite rétablir. “Certes, l'État paye les études. Mais derrière, on travaille d'abord comme externe pour une bouchée de pain à mi-temps à l'hôpital, puis comme interne avec un salaire qui est assez faible. Pendant toutes ces années, l'État récupère largement son investissement”, assure-t-il.
Il évoque également le manque d’attractivité de la profession, marquée par les nombreuses contraintes. Finalement, ces mesures sont jugées inefficaces et le chiffre le prouve : seulement un médecin sur deux s’installe à la sortie de ses études.
“Le problème, c'est que l'on veut nous contraindre à nous installer à la campagne, on revalorise à peine les consultations, on ne donne pas de moyens supplémentaires, on a une surcharge de travail administratif… Tout ça n’incite pas les jeunes médecins à s’installer.” Pourtant, une chose est sûre : si s’installer devient trop risqué et contraignant pour les jeunes médecins, les médecins en activité partant en retraite ne seront pas remplacés.
Huit ans après son installation, Thomas Paricaud s’interroge sur l’avenir. “Je commence à me préparer à changer de profession tellement j'en ai marre de tout ce que l'on nous impose. Je commence à avoir une forme de lassitude”, lâche-t-il, enfoncé dans son siège de bureau, las.