DIAPORAMA SONORE. Paroles de quartiers : "Faire plus d'efforts que les autres", au cœur de la cité Montmarin à Vesoul

À l'occasion des Municipales 2020, France 3 Franche-Comté a souhaité donner la parole aux habitants de quartiers populaires francs-comtois. Nous vous faisons découvrir le quartier du Montmarin à Vesoul, à travers la parole de ses habitants et de ses acteurs locaux. Reportage. 

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La cité du Montmarin est le quartier le plus peuplé de Vesoul. Classé "Quartier prioritaire de la politique de la ville" (anciennement Zone urbaine sensible), il rassemble environ 3 000 habitants. Comme dans tous les grands ensembles français, la population y est plus jeune que dans d'autres zones géographiques même si elle tend à vieillir depuis les années 2000.

Organisé autour de la place du commerce, où se trouvent bureau de tabac, boulangerie, pharmacie, salon de coiffure, bureau de poste ou encore fast-foods, le quartier Montmarin compte plusieurs grandes tours de 16 étages, installées cours Montaigne. Tout autour, des bâtiments moins hauts se partagent l'espace, entourés de parking et d'espaces verts plus ou moins bien entretenus. 
  

"Beaucoup de gens ont quitté le quartier"


À Montmarin, on trouve également une large gamme d'établissements scolaires : deux lycées dont un professionnel, un collège et des écoles primaires ainsi que des équipements sportifs. Beaucoup d'associations sont implantées sur le quartier. En quelques années, le quartier a bien changé, de l'avis de tous les gens rencontrés. "On reloge les gens hors des tours qui ont été détruites pour certaines, donc beaucoup de gens ont quitté le quartier. C'est un quartier comme un autre, avec des points positifs et des points négatifs, mais les gens disent s'y sentir plutôt bien" nous explique Manuel, éducateur spécialisé en poste depuis 1993 au sein du Club de prévention spécialisée.

Cette structure compte trois éducateurs sur le quartier Montmarin et a à charge un local baptisé "La cabane", accessible aux jeunes entre 9h et 19h la semaine. L'association travaillant en liens étroits avec la municipalité a pour mission d'aller à la rencontre des ados dans leur milieu de vie, au pied des immeubles, dans les commerces, autour des terrains de foot. Le but étant de permettre aux adolescents, notamment ceux en décrochage scolaire, de bénéficier d'un accompagnement, avec leur consentement. "Les choses qui ont changé, c'est surtout l'âge des adolescents qu'on accompagne. Ils sont de plus en plus jeunes. Avant, on avait surtout des jeunes de 3ème. Désormais, on en a aussi beaucoup qui sont en 6ème. Et je pense que d'ici quelques années, on interviendra même sur des enfants en primaire" détaille Manuel, entouré de Gaël et Romain, également éducateurs spécialisés. Au total, environ 80 jeunes, en grande majorité des garçons, sont suivis de manière plus ou moins régulière par les trois professionnels. 

Découvrez le quartier Montmarin et ses habitants :
 

"Pourtant, il y en a des gens diplômés"


À l'abri de la pluie, postés sous une avancée vitrée située devant une auto-école, on fait la connaissance d'un groupe de jeunes. Rapidement, ils nous livrent la vision qu'ils ont du quartier qui les a vu grandir. Pour eux, le principal problème des gens à Montmarin, c'est leur manque de perspectives professionnelles. "Ici, il n'y a pas de travail. À Vesoul, le seul truc possible pour les jeunes comme nous c'est Peugeot. Super" lance Ryane, rapidement rejoint par ses amis qui acquiescent. "Je voulais faire un apprentissage en coiffure. J'ai fait les 32 salons de coiffure de Vesoul, je vous jure ! Ils m'ont tous dit non. Tous ! Ben je fais quoi ? Ben j'abandonne !" lance-t-il, visiblement désabusé par la situation. 

Comme la plupart des quartiers populaires français, Montmarin souffre d'une image négative. Dans la presse, rares sont les allusions faites au quartier en dehors des pages fait-divers. En 1990, le quartier affichait un taux de chômage de près de 35 %, ce qui était à l'époque l'un des plus importants de la région. Depuis, les choses se sont un peu améliorées, mais la crainte de ne pas trouver de travail est toujours pesante. Cela reste l'une des principales préoccupations des habitants de Montmarin. Les difficultés pour obtenir un emploi sont bien plus prégnantes pour les jeunes de quartier, issus en partie de familles immigrées. "Nous on doit toujours faire plus d'efforts que les autres. C'est pas juste. Regardez au Super U, juste à côté, ou même dans les commerces de la place ou au centre Villon. Pas un mec ou une fille de ce quartier y travaille. Pourtant, il y en a des gens diplômés. Le seul qui a embauché quelqu'un du quartier c'est Mehdi, dans son Kebab" poursuit Ryane. 
 

Mehdi, c'est un peu l'un des piliers de Montmarin. Le jeune homme de 35 ans tient un kebab sur la place centrale. Il est aussi le président du club de football du Montmarin, baptisé Association sportive Vesoul Nord et créé en 1991. Son quartier, il le connaît "par cœur". Lui aussi pointe du doigt le manque de dynamisme de sa cité, qui s'endort depuis quelques années. "Avant, il y avait beaucoup de choses faites au niveau culturel et éducatif sur le quartier, comme la fête de quartier. Ils l'ont supprimée, mais elle était très importante pour les jeunes d'ici" explique-t-il. "Je me souviens, la fête de quartier, quand j'étais petit, j'attendais ça toute l'année ! On avait même des aides pour organiser nos vacances, il y avait des camps, des sorties..." détaille Semih, âgé de 27 ans, et visiblement nostalgique d'une époque révolue. 
 

"On joue un rôle social"


Lui et les trois autres bénévoles de l'association ne perdent pas espoir de voir la situation s'améliorer, notamment pour le club de football qui fait office de véritable acteur social sur le quartier. Il bénéficie d'ailleurs, comme d'autres associations du quartier, d'un petit local un peu vétuste au pied d'une tour. "Tous les soirs, on est des dizaines de jeunes à venir dans ce local. On ne fait pas que du football, on joue un rôle social. On est le cœur du quartier. Mais malheureusement, sans financement et sans aide on ne peut pas faire plus" explique Mehdi, qui espère voir naître un véritable projet de développement de la structure avec la municipalité. Le club de football du Montmarin ne dispose pour l'instant d'aucune subvention, même si leur terrain synthétique a été entièrement refait. Pour les déplacements, les frais de gestion, la situation est à flux tendu. "On se débrouille, des fois on paie les arbitres de notre poche. En plus, ils nous ont mis dans le seul groupe avec des déplacements qui nous obligent à faire 180 km aller-retour, alors qu'on joue en district... Comment voulez-vous qu'on fasse ?" s'interrogent les jeunes bénévoles. 
 

La Haute-Saône est le département le plus rural de la région. C'est aussi l'un des départements où l'on a le plus voté Front National en 2017. "C'est déjà pas simple d'être jeune de quartier en France, mais alors en Haute-Saône, c'est encore pire ! Il y a beaucoup de racistes, on le voit le dimanche quand on se déplace dans les patelins, on nous prend pour des extraterrestres" ironise Semih, habitué aux regards méfiants des clubs voisins.

Dans les cités, peu de gens se déplacent aux urnes lors des élections. Lors du premier tour des municipales 2014, le taux d'abstention sur les deux bureaux de vote du Montmarin était d'environ 52%. Mais Mehdi a bien l'intention d'œuvrer pour que les jeunes s'y mettent. Pour lui, c'est l'un des seuls moyens qu'il existe pour faire entendre la voix des quartiers. 
 
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