Jouer dehors, quitter ce confinement encore présent dans la tête et ne plus avoir peur de la maladie. C'est le souhait formulé pour les enfants par l'Association Française de Pédiatrie Ambulatoire, la FCPE du Doubs et l'association Graine Bourgogne-Franche-Comté.
Le sentiment d'urgence est palpable. Urgence à rétablir la sérénité dans la tête des enfants. Selon ces pédiatres et spécialistes de l'éducation qui s'expriment ensemble dans un communiqué ces deux mois de confinement sont en train de laisser chez beaucoup d'enfants des stigmates qu'il va être difficile de résorber.Voici un extrait de leur communiqué :
Et pourtant, deux mois plus tôt, les parents du monde entier étaient avertis de l'impérieuse nécessité de confiner des enfants qui, s'ils ne développaient pas de formes graves de maladie, étaient de "redoutables" porteurs sains pouvant transmettre aux grands le virus."Les enfants auront vécu confinés deux mois, et certains le sont encore.
Deux mois à manquer d’air et d’espace pour la plupart d’entre eux, deux mois aussi à regarder les écrans plus que d’ordinaire.
Ils étaient déjà trop sédentaires selon l’OMS. Les voilà maintenant quasi immobiles.
Ils étaient en quête d’autonomie et voilà qu’ils ne se sentent en sécurité qu’à la maison, certains hésitent encore à sortir de chez eux, faute de lieux et de personnes tiers.
Les peurs des adultes les contaminent alors même que le coronavirus semble les préserver (les moins de 10 ans sont très peu malades, peu porteurs, peu contagieux).
Pire, le confinement a pu parfois être traumatisant. Ce stress sera difficile à dépasser."
"Ce sont les adultes qui contaminent les enfants. Pas l'inverse !"
La signataire régionale du communiqué pour l'Association Française de Pédiatrie Ambulatoire, la pédiatre Pascale Vurpillat-Almanza a bien conscience du téléscopage des discours à ce sujet, elle le regrette mais l'argumente.
"Prises de court au début, les sociétés de médecin ont joué la prudence. On ne connaissait pas ce virus, on partait donc du postulat que l'enfant allait être un vecteur de contagion, exactement comme la grippe. Cela, c'était avant d'avoir les chiffres venant du monde entier.
Ceux-ci montrent clairement que l'enfant est peu touché par le virus, avec un taux de 1% d'enfants de moins de 10 ans touchés, et qu'il développe très rarement une forme grave du coronavirus (3 enfants morts en France sur les 28 000 décès).
Et, c'est le plus important, que contrairement à la grippe, l'enfant a peu de virus en lui et ne peut le transmettre en toussant. Ce sont les adultes qui contaminent les enfants. Pas l'inverse !"
La pédiatre reçoit en permanence à son cabinet des enfants en bonne santé, mais qui portent en eux une angoisse liée à la pandémie. Des enfants qui collent leurs parents, qui coupent la parole à tout bout de chant pour réclamer de l'attention, qui ont été imprégnés des peurs (compréhensibles) des parents.
"Les enfants sont les oubliés du Covid-19. On les a enfermé deux mois, certains ne sont pas sortis du tout de leur appartement, cela a exacerbé les différences sociales de santé, avec des familles démunies face à la peur de contracter le virus."
Sans vouloir rentrer dans le débat politique, la pédiatre ne comprend pas la décision, à Besançon, de ne pas remettre à l'école rapidement les enfants de CE1, CE2 et CM1. "La conséquence de cette décision ferme, c'est que l'intérêt supérieur de l'enfant est bafoué par cette règle ! C'est pourquoi nous demandons que les familles fassent sortir un maximum leurs enfants !
Les parents ne peuvent pas tout apprendre à leur enfant. Le fait de jouer dehors, d'être en relation avec ses pairs, de grimper aux arbres...on apprend un tas de choses à ce moment-là, on se connecte à notre environnement."
La pédiatre va plus loin, en estimant que, dans les cours de récréation, il faut laisser les enfants jouer entre eux, en leur demandant juste de respecter les gestes barrières.
Les signataires réclament aussi d'autres mesures pour les enfants dont la réouverture des parcs :
"Nous, les pédiatres de l’AFPA, les parents de la FCPE ainsi que le GRAINE BFC, sommes alertés au plus haut point par les conséquences du confinement sur les enfants et appelons à les laisser reprendre le chemin de l’école et se reconnecter avec la nature.
Pour cela et en premier lieu nous appelons en urgence :
- à la réouverture des parcs dans les espaces urbains ; au besoin, l’accès aux parcs pourrait être réservé aux enfants et à leurs accompagnants ;
- à prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant pour rouvrir les écoles à tous les enfants y compris ceux en situation de handicap ;
- à donner toutes facilités aux adultes en charge des enfants à pouvoir sortir dans un espace végétalisé à proximité de l’école, la crèche, etc.
Enfin, nous appelons toutes les bonnes volontés à nous rejoindre pour faire avancer une idée toute simple, un besoin fondamental et un droit de l’enfant : aller dehors.
Dr Pascale Vurpillat-Almanza, Déléguée Régionale Bourgogne-Franche-Comté de l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire.
Sandrine Claude, Coordinatrice de la FCPE de l’Académie de Besançon.
Bénédicte Bonnet, Présidente de la FCPE du Doubs
GRAINE Bourgogne-Franche-Comté, Isabelle Lépeule, co-présidente.
Avec le soutien de Sarah Wauquiez, enseignante et psychologue, auteure de Les enfants des bois et L’école à ciel ouvert.