La pénurie de professionnels de santé est particulièrement importante dans le secteur des urgences. "Plus d'un tiers" des postes n'est pas occupé en Bourgogne-Franche-Comté, contraignant l'Agence régionale de santé à réorganiser le fonctionnement de nombreux services d'urgences.
C'est un des chiffres chocs du plan régional de santé, présenté par l'Agence régionale de santé lundi 2 juillet 2018.
Il manque "140 à 220 équivalents temps plein pour assurer les lignes existantes" des services d'accueil des urgences, des Smur et des centres 15.
Un déficit lourd puisqu'aujourd'hui travaillent en Bourgogne-Franche-Comté 250 urgentistes, 330 en comptant les contractuels.
Pourquoi une telle carence ?
Le directeur de l'Agence régionale de santé, Pierre Pribile, en convient: il manque "plus d'un tiers" des effectifs d'urgentistes en Bourgogne-Franche-Comté. Aujourd'hui, ceux qui travaillent multiplient les heures supplémentaires "de manière déraisonnable", et les recours aux remplacements se multiplient, "de manière déraisonnable" également.La situation ne date pas d'hier, évidemment, mais elle tend à s'aggraver. La surcharge de travail incite certains urgentistes à changer de spécialité, alimentant à leur tour la pénurie. Le tout dans un contexte global de manque de professionnels de santé au niveau régional.
Il y a en Bourgogne-Franche-Comté 96 médecins généralistes libéraux pour 100.000 habitants, c'est 104 au niveau national. Les perspectives sont négatives, car près de la moitié de ces médecins ont plus de 55 ans.
Le déficit est encore plus important pour les spécialistes: ils sont 150 pour 100.000 habitants en Bourgogne-Franche-Comté, contre 185 au niveau national.
Reportage de Jérémy Chevreuil, Jean-Lousi Saintain et Rémy Bolard. Avec Pierre Pribile, directeur général de l'agence régionale de santé, Norbert Marteau, de la CFDT Bourgogne-Franche-Comté, et Olivier Obrecht, directeur général adjoint de l'ARS
Comment assurer les urgences avec autant de personnels en moins ?
Pour l'Agence régionale de santé, il faut réorganiser les services d'urgences.Si l'ARS assure qu'aucune fermeture totale n'est envisagée, elle souligne qu'un site comportant un Smur et un service d'urgences 24h/24 mobilise à tout instant deux urgentistes, soit 11 équivalents temps plein au total.
L'ARS veut s'appuyer sur la réussite des groupements hospitaliers de territoire (collaboration entre hôpitaux jadis concurrents, avec partage de médecins parfois) pour créer des équipes territoriales d'urgentistes.
Par ailleurs, les cinq hélicoptères d'intervention seront davantage sollicités. Ils sont aujourd'hui basés à Besançon (2), Dijon, Auxerre et Chalon-sur-Saône.
15% de la population à plus de 30 mn d'un service d'urgences
C'était une des promesses du président de la République François Hollande: aucun Français ne devait se trouver à plus d'une demi-heure d'un service d'urgences.Aujourd'hui en Bourgogne-Franche-Comté, plus d'un habitant sur six est pourtant à plus de 30 mn d'un service d'urgences ou d'une antenne du Smur. 12% de la population est située entre 30 et 45mn (en orange sur la carte), 1,5% à plus de 45 mn. Dans ces zones (en rouge sur la carte), sur le plateau de Maîche-Morteau et dans le Morvan, des médecins pompiers ou des médecins de ville sont formés pour prendre en charge les urgences vitales en attendant l'arrivée du Smur.