La Convention de Berne, qui assure la protection de la faune en Europe, a approuvé ce mardi 3 décembre un déclassement du statut de protection du loup, qui va passer d'espèce "strictement protégée" à "protégée". Colère des associations de défense de la nature.
La décision était redoutée. Elle est tombée comme un brutal couperet ce matin pour les associations de protection de la nature.
Les 49 États membres de la Convention de Berne, réunis à Strasbourg, ont approuvé une proposition de l'Union européenne, qui cherche à mieux protéger le bétail dans un contexte d'augmentation de la population des loups, a indiqué dans un communiqué le Conseil de l'Europe. Le statut du loup est rabaissé d'un niveau.
Dans le Jura, Patrice Raydelet, président du pôle grands prédateurs ne trouve plus les mots, atterré par l’annonce de cette décision. “On va continuer à massacrer les loups, une espèce indispensable à l’équilibre des écosystèmes. On sait tous que l’élevage contribue à l’augmentation des gaz à effet de serre, on sait que la production de Comté dans notre région pollue depuis des années les rivières. En maintenant le focus sur la gêne occasionnée par le loup, on met de côté tous ces autres sujets."
Patrice Raydelet, craint une hausse drastique des autorisations de tirs contre les loups, alors que les principaux syndicats agricoles ne veulent pas entendre, selon lui, parler de protection des troupeaux.
Si on n’est pas capable d’avoir la chance de revivre une deuxième fois avec les loups, c’est pas la peine d’aller plus loin. Là, on reconduit un processus de destruction.
Patrice Raydelet, président du pôle grands prédateurs
Selon lui, l'Europe et la France devraient faire d'autres choix. "On nous donne des subventions pour aller dans les écoles parler du loup, et au niveau politique, on fait tout le contraire !" dénonce-t-il.
One Voice a également réagi à l’annonce de ce déclassement du loup
“Malgré un consensus scientifique, le Comité permanent de la Convention de Berne vient de voter peu ou prou la mort des loups en Europe cédant aux lobbys agricoles et aux chasseurs.5 pays se sont opposés au déclassement : Royaume-Uni, Monaco, Monténégro, Albanie et Bosnie-Herzégovine. 2 se sont abstenus : Tunisie et Turquie. Tous les autres ont choisi d’abaisser le statut de protection des loups, les passant d’espèce «strictement protégée» à «protégée. Avec nos partenaires internationaux, nous étudions tous les recours possibles” écrit One Voice.
"Les éleveurs sont exaspérés, cette mesure ne changera rien"
Thierry Chalmin, président de la chambre d'agriculture de Haute-Saône avait courant septembre 2024, dans une lettre adressée à 1500 éleveurs à "sortir armés et à "taper" un loup" s'ils en voient un. Ce matin, il accueille la décision de la Convention de Berne sans tambour, ni fanfare. "Le déclassement du loup, c'est peut-être une bonne nouvelle, je ne sais pas. Moi, je suis convaincu que ça ne changera rien pour les éleveurs" dit-il à notre journaliste Clément Jeannin.
Depuis 30 ans, on parle, on parle sur le loup, et je vois que les populations ne font qu'augmenter, les prédations ne font qu'augmenter, et les éleveurs sont exaspérés.
Thierry Chalmin, président de la chambre d'agriculture de Haute-Saône
L’abaissement de la protection du loup pourrait entrer en vigueur dans trois mois
"La modification entrera en vigueur dans trois mois, sauf si au moins un tiers des parties à la Convention de Berne (17) s'y oppose", a précisé ce mardi matin le Conseil de l'Europe.
"Si moins d'un tiers des parties s'y oppose, la décision entrera en vigueur uniquement pour les parties qui n'ont pas formulé d'objections", a-t-il ajouté.
La population de loups a pratiquement doublé en Europe en l'espace de 10 ans, pour atteindre 20.300 individus en 2023. Les défenseurs du loup estiment que loup n’occasionne pas tant de dégâts. Selon le directeur des programmes du WWF-France, Yann Laurans, "le prélèvement des loups sur les troupeaux est en réalité négligeable, de l'ordre d'un pour cent" du total des attaques en Europe, d'autres animaux s'en prenant aussi au bétail.
Combien de loups en France ?
L'estimation du nombre de loups en France en 2023 s'était établie à 1.003 individus, en baisse de 9 % sur un an. Environ 20 % de la population est abattue chaque année. Le quota d'abattage de loups autorisé en 2024 en France, s'établit à 209 loups. Au 1ᵉʳ décembre, 201 ont été tués, selon la page Facebook Non au loup qui relaie régulièrement la voix des agriculteurs.