La fraude fiscale coûterait près de 60 milliards d'euros par an à l'Etat. C’est l'équivalent du déficit public français. Le gouvernement prépare un projet de loi pour récupérer une partie de ces sommes colossales.
Recours accru au renseignement, création d'un service d'enquête spécialisé, dénonciation publique des tricheurs : un projet de loi contre la fraude fiscale est en préparation. Il sera présenté en Conseil des ministres par le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin mercredi 28 mars 2018. Le texte sera débattu avant l'été au parlement, en vue d'une adoption définitive au début de l'automne.
"Il est difficile de savoir combien coûte la fraude. Ce qui est sûr, c'est qu'elle coûte beaucoup et que la France ne fait pas assez pour récupérer l'argent qui devrait être dans les caisses" de l'Etat, estime Gérald Darmanin.
Des sanctions contre les professions qui favorisent l'évasion fiscale
Plusieurs mesures qui figureront dans le texte de loi ont déjà été annoncées : ainsi, des sanctions seront mises en place pour les intermédiaires, comme les cabinets d'avocat, qui favorisent l'évasion fiscale. "Nous allons pénaliser ceux qui proposent des montages frauduleux pour échapper à l'impôt", explique Gérald Darmanin. Selon Bercy, les pénalités administratives pourraient aller de 10 000 euros à 50 % des honoraires perçus.Le texte de loi prévoit aussi la création d'un service d'enquête spécialisé, au sein même de Bercy. Ce service, dit de "police fiscale", pourra être saisi par le parquet national financier (PNF) dans le cas de dossiers nécessitant une expertise fiscale pointue.
Une procédure de plaider coupable sera créée pour les fraudeurs poursuivis au pénal et disposés à reconnaître leurs torts. Ils pourront ainsi s'éviter un procès en acceptant la peine proposée par le parquet.
Le projet de loi permettra enfin d'accroître l'usage du "data mining" (c'est-à-dire l’exploration de données) pour détecter les dossiers à risques et renforcer la liste française des paradis fiscaux, en prenant en compte d'autres critères que les seuls "échanges d'informations".
"Faire honte aux fraudeurs"
"Aujourd'hui, il y a des gros fraudeurs et nous ne les avons pas assez pourchassés", insiste Gérald Darmanin. Le ministre veut faire jouer "la réputation" des entreprises reconnues coupables de fraude en rendant publiques les sanctions.Cette pratique, dite du "name and shame" ("nommer et faire honte"), deviendra obligatoire en cas de condamnation pénale, sauf décision expresse du juge. Elle sera également possible pour certaines fraudes sanctionnées par l'administration.
Selon Bercy, plusieurs mesures seront par ailleurs adoptées par voie réglementaire d'ici à l'été, parallèlement au projet de loi. A commencer par la création d'un guichet censé faciliter les démarches de régularisation engagées par les entreprises de bonne foi.