Le corps sans vie d'un lynx a été découvert le 25 octobre dans les Franches-Montagnes à proximité du Doubs. L'autopsie vient de rendre ses conclusions. Il s'agit d'un acte de braconnage à l'arme à feu. De chaque côtés de la frontière, les défenseurs du lynx condamnent des actes trop souvent répétés.
Un lynx gît sur l'herbe non loin de l'étang des Royes sur la commune de Le Bémont dans le Canton du Jura (Suisse). Selon les premières constatations, il s'agit d'une jeune femelle. Le garde faune sur place constate des plaies apparentes. Le corps du félin est envoyé au Centre pour la médecine des animaux sauvages de Berne pour une autopsie. La radiographie a révélé que le lynx était criblé d'une vingtaine de plombs de chasse. Il s'agit donc bien d'un acte de braconnage volontaire, et il confirme les premières observations faites par les autorités locales. L'animal est mort sur le coup et n'avait aucune chance d'échapper à ce tir.
On compte aujourd'hui 100 lynx dans le massif jurassien suisse. L'Office de l'environnement du Canton du Jura condamne fermement cet acte de braconnage, car le félin est une espèce strictement protégée par la Convention de Berne. Habituellement, les actes de braconnage concernent surtout la partie alpine de la Suisse et notamment le canton du Valais où les grands prédateurs sont régulièrement visés. Il n'y avait pas eu de tels actes dans le canton du Jura depuis vingt ans. Avec l'abattage de cette jeune femelle, c'est l'avenir de l'espèce qui est une nouvelle fois fragilisé. Une enquête pénale a été ouverte afin d'identifier l'auteur des faits.
Pour Gilles Moyne, directeur du Centre Athénas spécialisé dans le soins des animaux sauvages près de Lons-le-Saunier, ce tir à l'arme de chasse sur un lynx est un problème récurrent. En mars 2020, au début du confinement en France, le cadavre d'un lynx éventré avait été découvert dans un éboulis à Ivrey (39). L'autopsie a mis en évidence un acte de braconnage par arme à feu. La fédération de chasse du Jura a condamné la destruction illégale d'un lynx. Néanmoins, face aux restrictions draconiennes de circulation, les chasseurs bénéficiaient d'une autorisation de circulation. Elle leur a été enlevée face à la vague de protestation de la population.Un lynx chasse environ cinquante chevreuils par an, et certains chasseurs voient en lui un concurrent. Ils ne vont pas l'abattre pour le trophée car c'est beaucoup trop risqué. Non, ils vont lui tirer dessus dans le but de l'éliminer et dissimuler son cadavre.
Nous savons par experience que si en période de confinement, les seuls autorisés à être dans les bois sont les chasseurs, il y a des risques potentiels pour le lynx. Je ne les mets pas tous dans dans le même sac, mais nous craignons que les contrôles de l'Office français de la Biodiversité (OFB) soient plus limités à cause du contexte pandémique. Certains chasseurs malveillants pourraient en profiter s'ils croisent le chemin d'un lynx.
Neil Villard, photographe naturaliste suisse, est un des grands spécialiste du lynx. Durant plusieurs années, il a capté parmi les plus beaux clichés de l'animal pour son livre "Lynx, une ombre en lumiere". Lorsqu'il a été informé de cet acte de braconnage, il a ressenti un profond dégoût. "Tout s'arrête pour cette jeune femelle lynx. Imaginez si elle avait eu des petits, ils auraient sans aucun doute suivi le même sort que leur mère" nous explique le photographe que nous avons pu joindre alors qu'il partait en Russie pour un nouveau projet photographique.
Je ne trouve plus les mots, je suis fatigué de tous ces actes stupides perpétrés par des imbéciles qui ne connaissent rien.
En effet, les grands prédateurs occupent une place importante dans la gestion de la biodiversité. "L'homme n'est que peu réceptif à comprendre comment fonctionne ces rouages extrêmement complexes. Le problème aujourd'hui en Suisse est que, mêlé à la bêtise et à l'ignorance qui était déjà de mise avant, on peut ajouter la haine et la frustration du résultat des dernières votations sur la révision des lois de la chasse. Pour limiter le braconnage, il faudrait des peines plus conséquentes et des retraits à vie du permis de chasse" nous explique Neil Villard.
Vincent Munier, l'un des plus célèbre photographe animalier au monde a dénoncé en 2018 le braconnage des lynx au travers d'une vidéo coup de poing. La découverte de la mort par saturnisme d'un lynx mâle qu'il avait filmé avec sa femelle l'avait profondément marqué. Le corps de l'animal était criblé d'une centaine de plombs de chasse.