Fabien Bazin sera élu président du conseil départemental de la Nièvre jeudi 1er juillet. Jusqu'ici maire de Lormes, le socialiste succèdera à Alain Lassus, le président sortant qui ne se représentait pas. Mais qui est le nouvel homme fort du département ? Portrait.
Fabien Bazin n’est pas un novice en politique. Loin de là ! Maire de Lormes depuis 20 ans, conseiller départemental depuis 2004, aujourd'hui vice-président de la collectivité, il a fait ses débuts comme assistant parlementaire de Christian Paul, ancien député-maire (PS) de Lormes dans les années 90. "C’est un élu de terrain, un défenseur de la ruralité et un brillant orateur" note Jocelyne Guérin, la maire socialiste de Luzy.
Une expérience que revendique l'élu et qu'il compte mettre à profit. "Le fait d’avoir pendant 20 ans pratiqué très concrètement le travail avec tous les habitants, sans sectarisme, en étant dans la posture d’écoute, le dialogue permanent, cela donne un modèle que l’on veut essayer d’élargir à la Nièvre toute entière." Durant deux décennies, l’élu a fait de sa commune de 1300 habitants le laboratoire d’une ruralité innovante. "Lormes, petite ville du futur" a vu arriver la fibre, un Fablab et une mission numérique. Bazin Bazin était d'ailleurs président de Nièvre numérique, l’organisme chargé du déploiement du réseau dans le département. Il défend aujourd'hui l'extension du dispositif Territoire zéro chômeur à toute la Nièvre.
"C’est un homme en recherche de modernité politique. Il est tout le temps en train d’essayer d’être dans l’innovation", remarque Alain Lassus, le président sortant du conseil départemental qui ne se représentait pas. "'Le bouclier rural', c’était lui ! Il est dans la réflexion politique et la recherche d’innovation sociale" complète celui auquel Fabien Bazin succèdera sans suspens jeudi 1er juillet.
A l'issue du second tour des élections départementales dans la Nièvre, la majorité de gauche a remporté 20 de 34 sièges et est assurée de conserver la présidence du département.
"Un côté Ségolène Royal"
Une succession "pour assurer la continuité de ce qui a été mis en place" veut croire Alain Lassus. "Il est peut-être bien placé pour leur donner de l’ampleur intellectuelle" ajoute-t-il. Fabien Bazin, un intellectuel ? "Il l’est plus que moi" répond le président sortant, médecin de profession. "J’étais un peu bucheron" sourit-il.
"C'est un intellectuel qui ne se contente pas du minimum" confirme Jean-Sébastien Halliez, maire socialiste de Brassy, autre commune rurale du Morvan, à 12 kilomètres de Lormes. Il connait Fabien Bazin "depuis 25 ans". "C'est quelqu’un de très opiniâtre, qui n’a pas peur de relancer quand les dossiers n’avancent pas. Il ne se contente pas du minimum ou d'une méthode simple. Cela a forcément des inconvénients."
Jean-Sébastien Halliez décrit le futur président du département comme un homme intuitif qui peut préférer l'objectif aux détails techniques, avec "une vision moderne de la politique". Il ose une comparaison. "Il fait confiance à sa vision. Il a un côté Ségolène Royal". "Il sait embarquer les citoyens en leur donnant une vision" se contente son homologue à la mairie de Luzy.
Profession politique
Tous deux socialistes, Fabien Bazin et Alain Lassus s’étaient porté candidats à la présidence du département en novembre 2017 pour succéder à Patrice Joly élu sénateur de la Nièvre. C’est "le seul désaccord qu’il y a eu" note Alain Lassus. "Pas un conflit, une opposition" précise le président sortant. "C’est un homme avec lequel j’ai des rapports très courtois, avec lequel j’ai plaisir à travailler" ajoute-t-il. "Seule chose qui nous sépare, je suis un professionnel de santé qui fait de la politique. Lui, son métier, c’est de faire de la politique. Ce n’est ni un défaut, ni une qualité et ce n'est pas un reproche. C’est bien qu’il arrive à ce niveau, parce qu’il le mérite" estime l'ancien maire de Decize.
Le futur président du conseil départemental revendique en tout cas une méthode : "Le dialogue direct, tout le temps. Être à l'écoute. Ecouter, c'est la base solide pour construire un projet pour le département" promet Fabien Bazin. Après une élection marquée par la crise sanitaire, une campagne réduite et l'absence de réunions politiques, il veut, dès septembre, "partir à la rencontre de tous les Nivernais" pour avoir un "dialogue direct" dans chacun des cantons. "On sait parfaitement qu’on ne pourra plus faire comme avant. On ne gouverne pas la Nièvre depuis le conseil départemental. On fabrique avec les Nivernais un avenir au département", plaide le nouveau patron de l'exécutif départemental.
"Fabien Bazin, on l’écoute sur France Inter."
Le dialogue jusqu'à en abuser ? "Il est dans la recherche du consensus. Des fois trop à mon gout, reconnait Alain Lassus. C’est son mode de fonctionnement, mais de temps en temps, je pense que le conflit est inévitable". Un point de vue que ne partage pas forcément Jean-Sébastien Halliez. "Il lui arrive d'avoir des arbitrages personnels. Quelques fois, il veut aller plus vite. Cela peut être déconcertant" juge le maire de Brassy.
L'élu de terrain est en tous cas un habile communicant. "Bouclier rural", "village du futur", l'élu sait trouver les slogans pour promouvoir une ruralité heureuse. En juin 2019, le maire de Lormes accueille une délégation d'élus européens pour présenter sa commune en exemple de lutte contre la dévitalisation des zones rurales. "Il a une notoriété certaine, même un peu parisienne, s'amuse son prédécesseur. Fabien Bazin, on l’écoute sur France Inter."
Partenaire actif de l'opération "Essayez la Nièvre" l'été dernier, l'homme veut voir rayonner sa commune et aime mettre en avant ses nouveaux arrivants. Du sculpteur néerlandais qui vient d'emménager, au couple qui quitte Paris pour reprendre un bar-tabac en passant par les New-Yorkais qui développent un concept-bar, tous ont droit à leur portrait dans la publication municipale. Fabien Bazin en est convaincu, l’exode rural est terminé. L’exode urbain a commencé. Lormes et la Nièvre ont tout à y gagner.