La maire de Decize (Nièvre), Justine Guyot, a pris un arrêté interdisant à ses administrés... de tomber malades. Cette décision vise à alerter sur la situation des urgences de la ville, de nouveau régulées les 2 et 3 octobre derniers. D'autres communes l'ont rejoint dans cet acte symbolique.
La décision, qui date du 8 octobre, peut faire sourire. Son titre est clair : "arrêté relatif à l'interdiction de tomber malade sur le territoire de la commune de Decize (Nièvre)". Et il fait réagir au-delà du territoire. "J'étais à Champvoux et à La Charité-sur-Loire. Les gens croisés m'ont juré qu'ils n'étaient pas malades," explique, en riant, Justine Guyot, la maire (PS) de la ville.
Pourtant, l'arrêté témoigne d'un réel mal-être sur le territoire : celui de l'accès aux soins. Actuellement, la Nièvre compte quatre services d'urgence pour un peu moins de 200 000 habitants. De nombreuses fermetures et régulations y sont observées. Comme à Decize. En décembre 2023, l'accès a dû être régulé pour les fêtes de fin d'année. Puis, en février 2024, le service a été fermé pendant 24 heures.
Dernier épisode en date : du 2 au 3 octobre dernier, l'accueil des urgences a de nouveau été régulé "en raison d’un manque temporaire de ressources médicales". Les habitants souhaitant accéder à ce service devaient d'abord composer le 15 ou le 18. Pour Justine Guyot, c'est la régulation de trop.
"Je me suis dit qu'il fallait faire réagir, explique-t-elle. En prenant cet arrêté, je me moque des gens qui se moquent de nous". Dans le département, les urgences de Decize ne sont pas les seules à avoir été dégradées. L'été dernier, l'hôpital de Nevers a aussi dû réguler l'accès à ce service. Conséquence directe : de nombreux habitants du territoire devaient faire 45 minutes de voiture pour se rendre dans le sud du département.
D'autres communes ont pris cet arrêté
Montigny-aux-Amognes a été l'une des communes impactées par cette régulation. Après Nevers, le service d'urgence le plus proche de la commune est celui de Decize, situé à 36 kilomètres. Son maire, Christian Perceau, a donc pris le même arrêté que sa collègue. "Je l'ai trouvé ironique, mais il représente bien la situation catastrophique dans laquelle nous sommes."
D'autres communes situées dans le sud du département, comme Tresnay ou Devay, ont pris cette décision. C'est aussi le cas de Saint-Léger-des-Vignes. Son maire, Christophe Fragny, explique qu'entre "les urgences et la délocalisation du centre 15 à Dijon, c'est un trop-plein. " Il ajoute : "beaucoup d'habitants du Sud Nivernais doivent aller jusqu'à Fourchambault pour voir un médecin."
Il va même plus loin : "Si un accident grave devait avoir lieu sur l'un des trois axes qui traversent ma commune, je ne sais pas comment cela se passerait. Je serais extrêmement inquiet." Donc, que faire pour la suite ? Les deux élus contactés ne s'opposent pas à ce que d'autres choses soient mises en place. "Il faut que l'on en discute," expliquent-ils à l'unisson.
La maire de Decize est plus catégorique. Elle veut mener d'autres actions coup de poing. Elle estime que l'on "ne peut pas laisser les gens sans accès aux soins !" Ce vendredi 11 octobre, elle a d'ailleurs remis une valise sanitaire à l'ancien préfet de la Nièvre, Michaël Galy, comprenant les arrêtés, les articles de presse détaillant la situation aux urgences, et un courrier pour la ministre de la Santé.