Un printemps chaud après un hiver qui n'en a pas été un. Dans le nord de la Haute-Saône, l'Office National des Forêts et les maires des communes forestières constatent que l'insecte a déjà commencé à faire de nouveaux ravages sur les épicéas.
Sur la commune de Fresse en Haute-Saône située au pied des Vosges, le petit insecte a commencé son travail. Des petits trous visibles à l'œil nu dans les épicéas. Une fine sciure. Et des arbres qui périssent.
Chaleur, sécheresse, tout pour plaire aux scolytes
Le scolyte n'est pas un petit nouveau ici. "Le scolyte, c'est une famille d'insectes, on en compte environ 150 espèces en France. Chaque scolyte est inféodé à un arbre. Les attaques de typographe, une espèce de scolyte sont des attaques que l'on connaît depuis une centaine d'années" explique Eike Wilmsmeier, directeur de l'ONF Nord Franche-Comté. "Les années chaudes et sèches sont suivies d'un fort développement de cet insecte. Ce n'est pas nouveau. Par contre, l'ampleur de l'attaque de cette année, et celle de 2019, nous font craindre que nous ne soyons dans un cycle que nous avons connu par le passé" s'inquiète le responsable forestier.
Avec des étés chauds en 2015, 2017, 2018, 2019 et un printemps 2020 sec et ensoleillé, tous les ingrédients sont là pour que les scolytes fassent de gros ravages.
Un scolyte adulte pond 1000 œufs
La sécheresse a affaibli les épicéas et en fait des proies faciles pour le scolyte. "L'année 2019 a fini par un hiver qui n'en était pas un, peu de gelées, peu de neige. Une bonne partie des insectes adultes qui hibernent dans la litière, a survécu. On craint que l'attaque cette année soit très violente", lance Eike Wilmsmeier. Un scolyte adulte pond 1000 œufs. Si tous arrivent à maturité, la génération suivante, faites le calcul, ce sont 1000 scolytes x 1000 !. "Plus le printemps sera chaud et l'été chaud, plus les larves vont se reproduire" dit-il.
Des attaques de scolytes qui touchent le quart nord-est et une partie de l'Europe
Selon Eike Wilmsmeier, directeur de l'ONF Nord Franche-Comté, c'est aujourd'hui tout le quart nord-est de la France qui est touché par ces attaques de scolytes. De la frontière belge, allemande ou suisse. Une partie de la région Rhône-Alpes est touchée. Ainsi que des voisins européens comme l'Allemagne, la Suisse ou l'Autriche ou la République Tchèque. "Ce dépérissement est massif à l'échelle européenne" constate le forestier.
Pour vendre de l'épicéa, il faut trouver des marchés plus loin
Résultat, des marchés qui s'effondrent saturés par une offre de bois trop importante. "Le marché s'est complétement effondré, on n'arrive plus à vendre du bois" précise Eike Wilmsmeier. En 2019, il a fallu exporter vers la Chine ou l'Asie ou sortir les bois du marché local pour les amener vers les scieries de l'ouest de la France qui avaient encore des capacités pour scier et acheter cette marchandise.
Un manque à gagner pour les communes forestières
À Fresse, Alain Dague, le maire de la commune constate que sa forêt communale a changé de visage. "Ici, il y a trois ans, on avait un arbre tous les 10, 15 mètres. Là, on n'a plus rien" déplore l'élu. La forêt communale de Fresse, c'est près de 700 hectares. Les finances de la commune vont s'en ressentir. Les ventes de bois permettaient à ces communes de faire des projets. "En 2019, avec les attaques, les ventes de bois auraient dû nous rapporter entre 500.000 et 600.000 euros" précise Alain Dague. "Mais cela nous a rapporté à peine 100.000 euros, cet argent va nous manquer dans le futur, on ne va pas pouvoir faire des projets."
Selon l'ONF, à terme, les épicéas ravagés par les scolytes et le réchauffement climatique pourraient disparaître de ces zones de moyenne montagne.