Etre présent au Salon de l'Agriculture est l'occasion pour les agriculteurs d'être vus. Et ça peut coûter très cher, jusqu'à 20 000 euros la semaine. Pour aider les petits producteurs, certaines régions comme la Bourgogne-Franche-Comté, n'hésitent pas financer certains stands. Décryptage.
Pendant 9 jours, du samedi 23 février au dimanche 3 mars 2019, le parc des expositions de Paris devient la vitrine de l’agriculture française. 945 exposants, 7 halls, environ 700 000 visiteurs, c’est une véritable vitrine pour ceux qui sont présents Porte de Versailles.Certains agriculteurs n'hésitent pas à dépenser beaucoup d'énergie pour participer à cet événement, incontournable. Partir à l'aube, traverser la France avec leur bétail en camion , laisser leur exploitation pendant une semaine, trouver un logement, se nourrir... Et souvent y consacrer un gros budget. Car tout cela peut avoir un coût, qui peut être élevé ! Et pour un même stand, tous ne paient pas le même prix !
Dans le hall 3, là où se retrouvent toutes les régions de France, la Bourgogne a sa place : 415 m2 réservés aux exposants et 120 m2 pour l’espace du Conseil Régional. Un espace, composé de 31 stands, reconnaissable à sa couleur, le jaune.
L’espace Bourgogne-Franche-Comté a été acheté par la Chambre régionale d’Agriculture de la région. C’est elle qui a mis en place la logistique, passé un contrat avec un "aménageur" pour la décoration, ce qui permet une unité.
Des stands qu'elle va louer directement aux exposants Bourguignons et Francs-Comtois.
♦ Il y a ceux qui paient le prix fort
Sans aides particulières, un stand de 9 m2 carré revient à environ 4 500 euros pour la semaine. A cela, il faudra ajouter les dépenses particulières, comme par exemple les frais d’électricité nécessaire à un frigo…
Au salon de l’agriculture on ne se gare pas gratuitement. Les frais de parking vont de 150 à 400 euros la semaine. Et quand on ajoute le déplacement, le logement et la nourriture, la facture grimpe.
Une semaine qui revient vite très chère, mais qui attire tout de même des producteurs.
C’est le cas de de Julien Maire, éleveur et producteur de lait, à les Fins dans le Haut-Doubs. Avec une quinzaine d’autres exploitations, il appartient à une coopérative ou des fromagers salariés fabriquent et affinent des fromages régionaux : comté, morbier. Des produits de qualité vendus dans leur propre magasin et dans des boutiques et grandes surfaces de la région.
Cela fait 18 ans que la Fruitière des Suchaux vient au salon de l’agriculture. Une présence coûteuse : 10 000 euros de location (stand, frigo, parking), 3 000 euros de frais d’hôtel, 1 000 euros de train, 1 500 euros de location de véhicule. Et à cela il ne faut pas manquer d’ajouter l’argent pour les vivres de la semaine.
Nous sommes de bons vivants et cela a aussi un coût. Julien Maire, agriculteur
♦ Il y a ceux qui bénéficient d’espaces à des prix abordables
Pour permettre à des petites structures de s’exposer au Salon de l’Agriculture pendant 1 à 3 jours , la Chambre régionale d’Agriculture a prévu deux espaces collectifs.
Cela permet des prix plus intéressants et des forfaits à la journée.
• La première possibilité est celle offerte aux agriculteurs membres du réseau Bienvenue à la ferme, un réseau de vente directe et de tourisme à la ferme. Là, les chiffres défient toute concurrence, un forfait de 40 euros la journée. Une formule qui permet à de petits producteurs, n’en n’ayant pas les moyens, de venir se faire connaître.
Martine Ferret est viticultrice avec son mari, en Saône-et-Loire, à Serrières. Pour venir, Ils ont quitté leur exploitation très tôt ce matin et rejoint Paris pour la journée, le coffre chargé de bouteilles afin de livrer des clients.
Grâce à ce forfait elle vient chaque année pour promouvoir ces produits mais aussi ceux du réseau Bienvenue à la ferme.
Pour elle, ce salon permet de rencontrer des gens de toute la France ainsi que d’autres pays. Cette année, elle a déjà vendu ses vins à des Ecossais, des Belges. Elle a aussi créé un contact avec un japonais intéressé par ses vins rouges.
Un salon ce n’est jamais négatif ! C’est toujours l’occasion de créer un contact et peut-être qu’un jour mes vins seront vendus au Japon. Martine Ferret, viticultrice
• Le deuxième espace collectif est "En direct du domaine". Il est réservé aux viticulteurs récoltants qui peuvent louer un stand pour un forfait de 120 euros par jour.
♦ Il y a ceux qui ne bénéficient plus d’aides
Dominique Choppin et son époux sont apiculteurs dans le Morvan, à Château-Chinon (Campagne). Depuis 1977, ils sont à la tête d’une petite entreprise, les Ruchers du Morvan. Ils emploient une douzaine de salariés qui récoltent le miel, fabriquent le pain d’épices, les bonbons… Une véritable ruche !
Ils sont présents sur le salon de l’agriculture depuis 27 ans et sont les premiers à avoir pu vendre des produits solides.
Lors de leur première venue, en 1992, pour faire la promotion des produits du Morvan, ils partageaient un stand de 9 m2 avec 6 autres producteurs. Aujourd’hui ils ont une surface de 18 m2 pour eux seul, ce qui leur revient à 12 000 euros pour la semaine. Si on ajoute les autres frais, ils devront débourser 18 000 euros pour cette édition 2019, soit 6 000 euros de plus qu’en 2018. En effet, jusqu’à l’an dernier, le Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté qui prenait en charge 50% des frais de location de stand, a arrêté son aide.
Une dépense qui n’empêche pas Dominique Coppin de trouver que cet événement lui offre une jolie boutique et une belle clientèle. Elle n'aimerait pas les abandonner.
C’est une véritable vitrine qui nous offre une communication à moindre coût. Dominique Choppin, les Ruchers du Morvan
♦ Il y a ceux qui sont là gratuitement
Le Conseil Régional de Bourgogne Franche-Comté a son propre espace sur le salon de l’agriculture. Dans le hall 3, il est ouvert au 8 départements de la région, même si en 2019 il n’y en que 2 qui ont répondu à l’appel.
Ce lieu permet aussi à la Région de mettre en valeur des petits producteurs régionaux en leur offrant de s'exposer gracieusement pendant un ou deux jours.
C’est là que s’est installé, pour 2 jours,Terres du Pays d’Othe. Ce collectif de 5 agriculteurs céréaliers valorise leurs céréales biologiques et fabriquent de nombreux produits alimentaires: huile de chanvre, huile de cameline, lentilles, pâtes…
Une présence qui n’amortit pas toujours les frais de déplacement.
les ventes ne couvrent pas les frais de déplacement, car ce que nous vendons ne se consomme pas immédiatement, mais cela nous fait connaître. Jérôme Forgeot, agriculteur céréalier à Cerisiers dans l’Yonne
Être présent au Salon de l'agriculture n'est donc pas accessible à tous. Il a ceux qui ont les reins solides pour débourser environ 20 000 euros. Pour les autres, les espaces collectifs leur donnent une possibilité d'être présents, mais les places sont peu nombreuses. Un événement qui ne présente au grand public qu'une partie de la diversité de l'agriculture française.