Bourgogne : un vigneron bio sera jugé cette semaine pour avoir refusé de traiter ses vignes

Le vigneron Thibault Liger-Belair, comparaît mardi 17 novembre devant la justice pour avoir refusé de traiter ses vignes contre la flavescence dorée. Le procès se déroule sur fond de débats sur l'usage des pesticides.

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Un an après la relaxe d'un premier vigneron bourguignon, un deuxième, Thibault Liger-Belair, viticulteur à Nuits-Saint-Georges et exploitant de vignes dans le Beaujolais, sera jugé par le tribunal correctionnel de Villefranche-sur-Saône pour avoir refusé d'utiliser des produits chimiques pour traiter ses vignes contre la flavescence dorée comme l'avait demandé la préfecture de Saône-et-Loire.

Le traitement concernait des vignes à Moulin-à-Vent

Thibault Liger-Belair a repris il y a une quinzaine d'années le domaine familial à Nuits-Saint-Georges, en Côte-d'Or. En 2008, il décide de se développer dans le Beaujolais, à Moulin-à-Vent. Très respecté dans le milieu, il élève ses vignes en biodynamie. "C'est un vigneron très très qualitatif, qui jouit d'une très belle image en Bourgogne", confirme Jean Bourjade, délégué général d'Inter-Beaujolais.
Ce sont ses vignes dans le Beaujolais qui lui valent des poursuites aujourd'hui devant le tribunal correctionnel de Villefranche-sur-Saône. La flavescence est une jaunisse de la vigne incurable. Pour lutter contre sa progression, il faut lutter contre l'insecte qui la propage, la cicadelle. En 2012, la maladie se propage sur le Mâconnais et la Saône-et-Loire devient le département le plus touché de Bourgogne. En 2013, il est alors décidé d'imposer "une lutte obligatoire en attendant une cartographie plus précise des zones à risque", rappelle Jocelyn Dureuil-Trojanowski, à la Chambre d'agriculture de ce département.

La décision de traiter était illogique selon le vigneron

Thibault Liger-Belair refuse d'appliquer ces traitements. Il ne s'en cache pas et en 2013 un contrôle fait remonter ce refus, qui entraînera des poursuites deux ans plus tard. "Qu'est-ce qui m'a poussé à ne pas traiter ? D'abord une aberration administrative car mon domaine à Moulin-à-Vent se situe à cheval entre la Saône-et-Loire et le Rhône. D'un côté j'avais l'obligation de traiter, de l'autre pas", explique-t-il en montrant la route, en contrebas de ses vignes, qui sépare les deux départements. "Cette barrière administrative n'est pas agronomique", martèle-t-il en réclamant plus de logique dans les décisions prises en préfecture. Mais derrière ce refus, il y a également une forte conviction. "On a un métier de passeur, on doit donner ce qu'on a mais en meilleur état" et l'usage de ces insecticides abîme la faune, supprime des insectes utiles et crée des déséquilibres. "En 2013, nous avons vu réapparaître dans les zones traitées des dégâts provoqués par l'araignée rouge", souligne le viticulteur.

Le vigneron n'est pas un cas isolé

Depuis sa convocation devant le tribunal en mai, Thibault Liger-Belair a multiplié les interventions pour expliquer sa démarche et une pétition de soutien sur le site Avaaz.org a recueilli environ 223.500 signatures. Car le vigneron n'est pas un cas isolé dans la région. Bien évidemment, certains sont en désaccord total avec lui, estimant que la lutte contre la flavescence doit être collective. Mais ils sont de plus en plus nombreux aussi à contester ces obligations de traitement. Guillaume Bodin, vigneron-cinéaste, leur a récemment donné la parole dans un documentaire en forme de manifeste: "Insecticide, mon amour".

Une lutte qui s'est avérée efficace selon la préfecture

La préfecture de Saône-et-Loire n'a pas souhaité commenter l'affaire avant la décision de justice. Néanmoins, dans une lettre adressée aux signataires de la pétition de soutien au vigneron et que l'AFP a pu consulter, la préfecture reconnaît que la "lutte contre cette maladie est compliquée du fait du délai d'au moins une année entre la contamination et l'apparition des symptômes". Mais elle assure en même temps que la décision d'étendre en 2013 "le périmètre de lutte à l'ensemble du département" s'est avérée "efficace". Effectivement, en 2014 et 2015, les zones de traitements obligatoires ont été réduites face au recul de la progression de la maladie. Des traitements ciblés qui sont d'ailleurs plus en phase avec l'approche de viticulteurs comme Thibault Liger-Belair ou Emmanuel Giboulot, relaxé en appel pour le même motif en Côte-d'Or, fin 2014. Mais elle n'a pas disparu pour autant: quelques foyers subsistent en Saône-et-Loire et d'autres ont été découverts dans le Rhône, selon la Chambre d'agriculture.
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