"Une décision scandaleuse" : à Paray-le-Monial, la maison Saint-Vincent-de-Paul menacée de fermeture dès le 31 décembre

La maison Saint-Vincent-de-Paul à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire) pourrait fermer en 2024. Ce centre d'hébergement de secours associatif est visé par une loi qui veut prioriser les établissements professionnels dès le 31 décembre. Faute de subventions, les bénévoles craignent de ne plus pouvoir accueillir des personnes en difficulté encore longtemps.

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Les aimants rouges sont tous posés sur les cases "occupées" des chambres numérotées. Ce mardi soir encore, la maison Saint-Vincent-de-Paul à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire) est complète. Cet hébergement d'urgence géré par une association menace de fermer ses portes. La faute à une loi visant à arrêter les subventions pour les centres d'accueil non-professionnels, dès le 1er janvier 2024.

La maison Saint-Vincent-de-Paul fait de la résistance

Bernard Comte est président de l'association depuis 13 ans. Pour lui, la démarche est difficile à comprendre : "Qu’on professionnalise, je comprends qu’il y ait des gens plus diplômés pour s’occuper de ces gens-là. Des professionnels venaient déjà deux fois par semaine pour s’occuper des gens, mais ils ne les logeaient pas, maintenant ils vont tout faire apparemment."

La logique des choses voudrait que ces établissements ferment dès le 31 décembre, mais la maison Saint-Vincent-de-Paul ne cédera pas, du moins pas tout de suite. L'objectif pour l'association est de continuer à fonctionner jusqu'à l'été 2024 grâce à des fonds propres. "On avait quand même quelques économies et on n’a pas toujours tout dépensé, donc on peut, pendant quelque temps, vivre sur nos fonds propres", explique le président au micro d'Alexandre Baudrand et Anthony Borlot. Ainsi, l’État contribuait à hauteur de 42 % du budget du centre. À cela s'ajoutaient les subventions communales de Paray-le-Monial, des autres communes aux alentours et des dons des particuliers.

Malgré la perspective d’engager sa propre responsabilité dans la continuité de l’hébergement, Bernard Comte ne veut pas se résigner : "Je ne pouvais pas fermer cette maison en quelques jours, c’est nous qui avons tout aménagé, on a des contrats pour beaucoup de choses. On ne peut pas fermer une maison comme la nôtre en quelques jours. Je pense que le 115 nous enverra encore des personnes parce qu’ils nous l’ont expliqué."

"On trouve ça un peu dur"

Même si cet hébergement de secours devrait limiter la casse pendant quelques mois, c'est l'inquiétude qui domine les 41 bénévoles. Monique Fayard vient régulièrement depuis 17 ans. Pour elle, c'est la manière qui fait mal. "[Apprendre ça] c’était un peu dur", commence-t-elle au bord des larmes. "Parce que quand on vient depuis des années, de quitter comme ça… Tout ça, ça va se terminer, enfin on pense. Si j’étais partie d’une autre manière, ça n’aurait pas fait le même effet." En plus des bénévoles, ce sont aussi deux salariés de nuit, en charge de la sécurité et des repas, qui vont devoir quitter les lieux.

Même constat pour Bernard Comte, le délai depuis septembre est trop court pour espérer se retourner. "Ces dernières années on a assuré entre 1 500 et 1 600 nuitées", rappelle-t-il. "Quand on a autant de bénévoles dévoués et qu’on s’est investi dans cette maison avec des travaux et d’autres choses, on trouve ça dur. Surtout qu’on nous prévient en septembre pour normalement fermer au 31 décembre."

"Des gens vont se retrouver à la rue"

Évidemment, les grands perdants restent les bénéficiaires de ce centre d'accueil provisoire. Andy est là depuis trois semaines, "juste de quoi se remettre le pied à l'étrier". Il n'ose pas imaginer comment il aurait dû faire s'il n'y avait pas eu la maison de Saint-Vincent-de-Paul. "Ça me dépanne bien, parce que je n’ai pas d’endroit où dormir", regrette-t-il. "J’ai engagé une procédure de demande de papiers pour toucher pôle emploi et en ce moment je n’ai pas d’autre choix que de venir dormir ici."

Bernard Compte l'assure, "des gens vont se retrouver à la rue" sans cet hébergement de secours. Il explique que le 115, le numéro d'urgence pour les sans-abri, lui envoie encore régulièrement des personnes en difficulté pour les loger. 

Du côté des pouvoirs publics non plus, ça ne sonne absolument pas comme une bonne nouvelle. Jean-Marc Nesme, le maire de Paray-le-Monial (DVD) ne mâche pas ses mots : "Je trouve que c’est une décision absolument scandaleuse. Vous avez une quarantaine de bénévoles qui se dévouent corps et âme pour accueillir des sans-domiciles fixes, ou d’autres personnes de Paray-le-Monial et de sa région pour X raisons. L’État a décidé, à partir du 1er janvier 2024, de supprimer sa subvention. C’est scandaleux, parce que l’association rend un très grand service à la population locale et régionale." 

Au-delà de ça, il oscille entre interrogation et inquiétude au moment d'imaginer l'avenir sans subventions pour ce service associatif. "Que va-t-on faire de toutes ces personnes dorénavant ? Les gens vont se retrouver à la rue. Ils ne vont pouvoir recevoir personne, parce que ce sont des bénévoles."

En tout cas, le maire de Paray-le-Monial le confirme : "Ça ne peut pas être une commune qui décide d’agréer une structure d’accueil, juridiquement, ce n’est pas possible." Combien de temps la maison Saint-Vincent-de-Paul pourra-t-elle subsister sans subventions ? C'est toute la question.

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