Le projet de fusion des activités ferroviaire entre le géant français Alstom et son homologue allemand Siemens est au point mort. Le ministre de l'économie a redit son soutien à cette union et rencontrera la commissaire européenne chargée de la concurrence lundi 21 janvier.
Alors qu'Alstom et Siemens commencent à faire le deuil du projet de fusion de leurs activités ferroviaires, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a réaffirmé son soutien dans un entretien au Journal du Dimanche.
"Oui, les conditions sont remplies pour que cette fusion soit réussie, a-t-il assuré. Nous partageons cette vision avec mon homologue allemand Peter Altmaier". Le ministre est un défenseur de longue date de cette opération, au nom de la lutte contre les ambitions chinoises dans ce secteur.
"Refuser la fusion entre Alstom et Siemens serait une erreur économique et une faute politique", a ajouté Bruno Le Maire, reprenant les propos du porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux. Qu'elle soit autorisée par la Commission européenne est dans "l'intérêt de la France et de l'Allemagne. C'est l'intérêt de l'Europe", a-t-il martelé.
Les doutes qui planent sur la fusion
"Je veux avoir confiance dans le sens de l'intérêt général européen de la Commission européenne", a encore dit le ministre, alors que cette instance a exigé des concessions de la part des deux entreprises pour autoriser leur fusion. Bruxelles a jusqu'au 18 février pour approuver ou non le projet d'union de l'allemand Siemens et du constructeur français Alstom.
Or, tant Siemens qu'Alstom ont affiché leurs doutes ces derniers jours sur la faisabilité de ces concessions. "Il n'y aura plus de concessions (...). Nous sommes devant un mur trop haut", a déclaré une source au sein de Siemens, très pessimiste sur les chances de voir aboutir les noces annoncées en fanfare en septembre 2017.
"Nous continuons à nous battre. (...) Mais aujourd'hui il n'y a pas de certitude que le contenu de cette proposition sera suffisante", a estimé de son côté le patron d'Alstom, Henri Poupart-Lafarge, en marge de ses résultats trimestriels.
Pourquoi la fusion pose problème à Bruxelles
Bruxelles est chargée de veiller à ce que le redécoupage du secteur du train en Europe n'écrase pas les plus petits groupes ou ne menace les prix. Mais l'Europe s'inquiète de la position dominante que le nouvel ensemble aurait dans la signalisation ferroviaire et les trains à grande vitesse.
Les autorités de la Concurrence britannique, néerlandaise, belge et espagnole ont fait part de leurs doutes sur ce projet de fusion auprès de la Commission européenne. L'institution avait dit craindre que cette "concentration ne réduise la concurrence pour la fourniture de plusieurs types de trains et de systèmes de signalisation".
La commissaire européenne chargée de la concurrence, Margrethe Vestager, "a apporté la preuve de son courage en imposant des amendes très significatives à de très grandes entreprises comme les géants du digital. Je la verrai à nouveau demain (lundi) matin pour discuter de la politique de concurrence et redire à quel point la France est attachée à cette fusion", a promis le ministre de l'Economie.
Les syndicats aussi ont exprimé leurs réserves sur ce projet de fusion : "on n'en veut pas parce qu'elle n'est pas juste, elle n'est pas bonne, c'est juste une histoire d'argent, résume Pascal Novellin, délégué CGT Alstom Belfort. Si cette fusion se fait, les actionnaires vont empocher 3 milliards d'euros et l'industrie n'y gagne rien du tout".
La fusion entre Alstom et Siemens ferait naître un nouveau géant européen du rail, présent dans 60 pays avec un chiffre d'affaires annuel de 15,6 milliards d'euros. Elle doit permettre aux deux entreprises de tenir tête à CRRC et au canadien Bombardier.