Celui qui accompagna de ses notes de piano teintées de jazz Barbara, Bécaud et Aznavour s'est éteint ce samedi au Mittan à Montbéliard, après des années de lutte contre le cancer. Il avait 82 ans. Et une des plus belles carrières de la musique comtoise.
Pour écrire cet article, on a commencé par chercher une photo de lui. On voulait en trouver une belle. En noir et blanc. De la grande époque. Celle où il accompagna dans le monde entier Barbara, Aznavour et, surtout, Bécaud. Mais impossible de dénicher un tel portrait.
On a quand même réussit, avec l'aide de notre documentaliste, à dénicher cette pépite dans les archives de l'INA. Gilbert Sigrist accompagnant Bécaud, en 1976, dans la célèbre émission "Numéro 1".
Gilbert Sigrist aura été un musicien de l'ombre, un héros très discret. Et ça, c'est Laurent, son fils qui nous l'a confirmé au téléphone, la voix étouffée par la tristesse : " mon papa était quelqu'un de très humble, de très discret, pour tout ce qu'il faisait dans la vie, mais donc aussi à propos de sa carrière. Il n'a jamais eu la grosse tête"
Laurent, contrebassiste, avec qui il aura joué quasiment trente ans, continuant de parcourir le monde au sein du « Gilbert Sigrist Trio », se produisant dans les plus grands festivals de jazz. "Il adorait le jazz, il l'avait un peu mis de côté pendant ses années d'accompagnement des grands artistes, mais c'était le style musical qu'il préférait"
Au commencement, il y a Peugeot..puis Barbara
Gilbert Sigrist nait à Belfort en 1938. Son enfance se passe dans le quartier des Pépinières, ses parents sont épiciers. Le garçon apprend le piano, obtient le premier prix du conservatoire puis monte à Paris.
Sa première musique ? Elle sera pour la publicité de la 404. Barbara recherche un pianiste pour partir en tournée. Ce sera lui.
"Mon père est le pianiste qui aura réalisé les premiers enregistrements de "Dis, quand reviendras-tu" de Barbara. Mais la composition dont il était le plus fier, c'est pour Gilbert Bécaud qu'il l'avait écrite."
Cette chanson est "C'est en septembre". Gilbert Sigrist avait composé et réalisé les arrangement de ce tube de Monsieur 100 000 volts au début des années 70.
Le député européen Christophe Grudler avait noué depuis 20 ans une vraie complicité avec Gilbert Sigrist, qui partageait sa vie entre Paris et Belfort. "Gilbert m'expliquait que lors des tournées avec Bécaud en Amérique Latine, son nom était écrit en plus gros que celui du chanteur sur les affiches des spectacles. Dans ces pays, il y a beaucoup d'admiration pour les musiciens"
L'homme politique nous avoue au téléphone que sa fonction le "blinde" depuis des années mais que le décès de Sigrist le touche beaucoup. "Gilbert était comme un grand enfant, il avait, pour tout, les yeux qui pétillaient, c'est pour moi une perte assez douloureuse...je ne sais pas vraiment comment vous l'expliquer, il avait cette foi en la vie qui était communicative."
Sur Facebook, Christophe Grudler a rendu hommage à son ami
Les deux hommes avaient entrepris il y a deux ans l'écriture d'un livre de mémoires sur sa carrière hors-normes. Christophe Grudler souhaite le terminer pour le sortir en hommage à la fin de l'année.
Il y aura aussi de longs passages sur Nathalie, la célèbre guide de Moscou que Gilbert Sigrist aura connu en même temps que Bécaud pendant les 15 années que le chanteur et le pianiste auront passées l'un devant et l'autre derrière le piano. Et puis, aussi, les années auprès d'Aznavour, de 1995 à 2000. C'est d'ailleurs Gilbert Bécaud qui avait présenté le belfortain au grand Charles.
Une première partie de carrière dans l'ombre des plus grands avant donc de passer en mode jazzy avec son fils Laurent au début des années 2000. Gilbert Sigrist aura profité de cette deuxième période pour se faire un vrai nom dans l'univers du jazz.
Depuis samedi, les hommages se succèdent sur les réseaux sociaux. Musiciens, mélomanes et élus saluent la mémoire de l'artiste. Damien Meslot, le maire de Belfort, a posté ce message avec cette belle photo.