Vaccination obligatoire des soignants : la méfiance de certains "n'est pas spécifique au vaccin contre le Covid"

La vaccination des soignants contre le Covid-19 pourrait être rendue obligatoire. Le gouvernement y réfléchit et pourrait prochainement présenter un projet de loi. L'hypothèse est diversement accueillie par les représentants syndicaux que nous avons interrogés.

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Le gouvernement envisage de rendre obligatoire la vaccination pour les personnels soignants. Une hypothèse diversement accueillie par les principaux concernés. "Ce débat, on l'a aujourd'hui. On devrait malgré tout ne pas l'avoir. Les vaccinations ne sont pas forcément à rendre obligatoires, sauf à constater que les moyens de traiter en cas d'infection sont insuffisants. Et là, c'est bien le cas", indique ce vendredi 2 juillet François Thibaut, secrétaire général adjoint CGT au sein du centre hospitalier universitaire de Dijon (Côte-d'Or).

"Si on avait tenu un peu plus compte des alertes, on ne serait pas dans cette situation où on est obligé de restreindre les libertés, de confiner ou de penser à une obligation vaccinale pour pallier le manque de capacité hospitalière."

Selon le représentant CGT, une meilleure couverture vaccinale de la population générale serait plus efficace qu'une obligation pour les personnels soignants. "Il y a encore aujourd'hui parmi les personnes vulnérables une couverture vaccinale qui n'est pas au plus haut de ce qu'on pourrait espérer", affirme-t-il. "La plupart des soignants à l'hôpital ne sont pas forcément dans les catégories de ceux qu'on risque de retrouver en hospitalisation ou en réanimation."

Au sein de l'hôpital dijonnais à l'heure actuelle, "entre 60 et 70 % du personnel est vacciné", précise François Thibaut. Comme ailleurs, les médecins sont davantage vaccinés que les infirmiers ou les aide-soignants. Les récalcitrants mettent notamment en avant la technologie nouvelle utilisée sur les vaccins à ARN messager de Moderna et Pfizer. "De jeunes collègues féminines disaient ne pas connaître les répercutions sur le long terme des vaccins qui sont innovants, sur la fécondité, sur la maternité…"

Bien sûr que si ça devient obligatoire, ils le feront […] mais sans obligation, ce sont des gens qui sont campés sur leurs positions.

François Thibaut (CGT) - Hôpital de Dijon

Mais selon l'élu syndical, les réticences ne sont pas plus importantes que pour d'autres vaccins. "On est sur les mêmes taux de personnels vaccinés en fonction de leur profession que pour le vaccin de la grippe par exemple. Ce n'est pas une position de méfiance qui est spécifique au vaccin contre le Covid. C'est une position plutôt générale sur les vaccins."

"Le vaccin ne devait pas être obligatoire et le devient de plus en plus"

Gérald Defief, secrétaire général FO au centre hospitalier d'Auxerre (Yonne), regrette de son côté les changements que la campagne vaccinale a subi. "Ce que je reproche au gouvernement, c'est qu'il n'est pas en phase avec les propositions qui ont été faites au départ. Le vaccin ne devait pas être obligatoire et le devient de plus en plus, notamment au niveau des soignants", indique-t-il.

Chacun est libre de se faire vacciner ou pas. Obliger les soignants à se faire vacciner, je pense que c'est anti-démocratique.

Gérald Defief (FO) - Hôpital d'Auxerre

 

"Les soignants travaillaient dans des conditions terribles au départ de la première vague […] Maintenant, ils ont des masques, du gel, des gants, des surblouses. La contamination est moindre", ajoute Gérald Defief.

Au sein du centre hospitalier d'Auxerre, "à peu près la moitié du personnel est vacciné", selon le représentant syndical. Là aussi, les inquiétudes viennent de la nouveauté des vaccins. "Certaines personnes disent qu'elles ne se feront pas vacciner parce qu'il n'y a pas assez de recul".

Les personnels des hôpitaux et des Ehpad doivent déjà obligatoirement être vaccinés contre quatre maladies : la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et l'hépatite B. La vaccination obligatoire contre la grippe est également dans la loi depuis 2005, mais a été suspendue par décret en 2006, après l'avis du Conseil supérieur d'hygiène publique. Il estimait qu'elle "risquerait d'altérer l'adhésion des professionnels".

Selon un sondage Odaxa Backbone-consulting pour franceinfo et Le Figaro dévoilé ce vendredi 2 juillet, 81 % des Français sont désormais prêts à se faire vacciner (ou le sont déjà). Ils sont 72 % à être favorables à une vaccination obligatoire des soignants et 58 % favorables à une vaccination obligatoire de l'ensemble de la population.

Une possible annonce avant septembre

Un projet de loi est en préparation selon une source gouvernementale, même si une telle obligation n'est pas simple à mettre en œuvre. Une consultation sur le sujet va être lancée "dans les jours qui viennent" avec les associations d'élus locaux et les présidents de groupes parlementaires, annonçait mercredi le Premier ministre Jean Castex.

"La question du calendrier" y sera abordée, a développé jeudi sur LCI le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. Il estime possible une annonce avant septembre, sous la menace d'une quatrième vague épidémique due au variant Delta.

"Je suis, comme toutes les Françaises et tous les Français, choqué […] quand on voit l'épidémie se réintroduire […] par l'entremise de celles et ceux dont c'est la vocation de protéger et de soigner. Ça n'est pas admissible", tonnait Jean Castex au Sénat mercredi, en évoquant le récent foyer d'infection dans un Ehpad des Landes.

Si "au moins 80%" des personnels ne sont pas vaccinés d'ici septembre, "nous ouvrirons la voie d'une obligation vaccinale pour les professionnels de santé", préviennent les ministres de la Santé Olivier Véran et de l'Autonomie Brigitte Bourguignon, dans un courrier aux directeurs d'hôpitaux et de maisons de retraite daté de lundi 28 juin.

Cette vaccination obligatoire ciblée est désormais prônée par le Conseil d'orientation de la stratégie vaccinale mis en place par le gouvernement et présidé par l'immunologue Alain Fischer. "L'accès volontaire aux vaccins, option choisie en première intention, n'a pas amené à ce jour les résultats escomptés", reconnaît cette instance dans un avis daté du 24 juin (PDF). De son côté, la Haute autorité de santé (HAS) "considère toujours que l'incitation et la conviction sont les approches les plus pertinentes". Mais si la couverture vaccinale des professionnels de santé ne progresse pas "rapidement", "la question de l'obligation vaccinale devra être rapidement posée", prévient-elle dans un communiqué daté de jeudi 1er juillet.


* Enquête réalisée auprès d’un échantillon de Français interrogés par internet les 30 juin et 1er juillet 2021 de 1 005 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.  La représentativité de l'échantillon est assurée par la méthode des quotas appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, niveau de diplôme et profession de l'interviewé après stratification par région et catégorie d'agglomération.

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