Lors du dernier conseil municipal d'Auxerre qui s'est tenu le jeudi 25 mars, les élus de l'opposition ont estimé que la position de Crescent Marault en tant que maire est "intenable" suite à sa garde à vue dans le cadre d'une enquête pour prise illégale d'intérêt. Certains ont quitté la séance.
Cela fait quinze jours que Crescent Marault débat dans cette affaire et au lendemain d’un conseil municipal tendu, il maintient qu’il ne démissionnera pas. "Il y a une majorité qui s'exprime, qui travaille et elle me soutient. Je ne vois pas où il y a une fragilité" a réagit ce matin le maire LR d'Auxerre. "Ce n'est que de la politique politicienne. L’opposition s’oppose. On est à la veille d'échéances électorales départementales et régionales donc ça permet aussi à certains d’avoir une certaine visibilité médiatique et d'avoir une occasion d'exister. Mais cela ne me dévie pas de ma voie."
Une journée mouvementée pour le maire et président de l'Auxerrois
La veille, Crescent Marault a vécu une une journée très compliqué dès le conseil communautaire. En séance du conseil de la communauté d'agglomération de l'Auxerrois, des élus ont évoqué la situation du président de l'Auxerrois après son placement en garde à vue, demandant sa démission ou sa mise en retrait.
L'élu d'opposition, Florence Loury, la première, a évoqué un "devoir d’exemplarité" puis a exprimé le souhait que Crescent Marault "organise" sa démission. Le maire d'Augy et conseiller au transport aérien et développement durable, Nicolas Briolland, normalement proche du maire d'Auxerre, lui a exprimé de son côté "l’idée que la collectivité est affaiblie". "En reconnaissant clairement les faits par le biais de ton avocat, tu me rends un peu complice" a-t-il lancé à Crescent Marault.
Un conseil municipal sous tension
Suite à un conseil communautaire compliquée, Crescent Marault a dû faire face à la fronde des élus d'opposition au conseil muncipal organisé en visioconférence hier soir.
D'une même voix, les élus du groupe d’opposition de gauche "L’Assurance d’une transition sereine" ont décidé de ne pas participer au conseil municipal d'Auxerre, ce jeudi 25 mars. Une décision qui fait notamment suite à la garde à vue du maire Les Républicains Crescent Marault, une semaine plus tôt, dans le cadre d’une enquête pour "prise illégale d’intérêt" alors qu’il était maire de Saint-Georges-sur-Baulche.
En tant que maire d’Auxerre, votre position devient intenable."
Avant la présentation de l'ordre du jour, les élus d'opposition ont sollicité la parole. C'est Mani Cambefort, élu PS d'opposition qui s'est exprimé en premier. "Nous estimons nécessaire de tirer les enseignements de la procédure judiciaire parce qu’elle vous concerne et qu’elle affecte le fonctionnement de notre collectivité" a d'abord déclaré l'élu.
"Vous avez reconnu les faits, ce qui signifie que vous avez sollicité le suffrage des Auxerrois en ayant conscience d’avoir commis un acte grave passible de poursuites", a ensuite lancé Mani Cambefort. "Nous considérons que la confiance qui vous unissait aux Auxerrois est brisée. En tant que maire d’Auxerre, votre position devient intenable."
"Aujourd’hui, monsieur le maire, comment avoir confiance en vous?" a alors poursuivi l'élue d'opposition Maud Navarre (EELV), en mettant notamment l'accent sur "la probité, l'intégrité et l'honnêteté" citées dans la charte de l'élu local présentée en juillet 2020.
Nous vous savons responsable monsieur le Maire. C’est pourquoi il nous semblerait plus adapté qu’en ces temps perturbés, vous preniez vos distances avec vos mandats, voire que vous passiez la main temporairement à des personnes de confiance."
Au nom de son groupe d'opposition, Maud Navarre a par la suite demandé au maire d'Auxerre "de se mettre en retrait le temps que cette affaire soit réglée. Nous, élus d'opposition, ne pouvant cautionner cette situation (...) nous n'assisterons pas à ce conseil municipal".
Suite à ces prise de parole, les sept élus du groupe d'opposition "l'Assurance d'une transition sereine" ont donc pris la décision de se déconnecter et de ne pas assister à la suite du conseil municipal. "Ce qu’on souhaitait c’était marquer le coup avec un geste symbolique mais qui pourrait frapper les personnes qui nous regardent" explique Maud Navarre. "Et on avait la volonté par ce geste d'exprimer qu’on ne cautionnait pas ce qu’a fait Crescent Marault. On ne pouvait pas rester sans rien dire, sans rien faire."
Présent au conseil municipal, l'élue d'opposition écologiste, Florence Loury, a également demandé au nom de son groupe "Auxerre Écologie - La Ville envie" le départ du maire. Pour elle, Crescent Marault ne peut rester aux affaires comme si de rien n'était. "La confiance est rompue, nous souhaitons que vous organisiez votre démission et le passage de témoin à une personne de votre majorité."
Crescent Marault contre-attaque
Face à ces attaques de l'opposition, Crescent Marault s'est d'abord dit "très surpris que ces élus se réveillent d'un seul coup" en rappelant que tout les élus étaient au courant de cette affaire depuis plus d'un an. Le maire d'Auxerre a d'ailleurs évoqué plusieurs affaires qui concerneraient une partie de ses opposants politiques.
"Quand on se permet de faire la morale aux autres, il faut un peu balayer devant sa porte. Vous vous faites l'écho d'une affaire mais quand il y a une perquisition à la ville d'Auxerre au mois de février sur un marché public qui met en cause la précédente mandature, personne ne s'en fait l'écho" a notamment rétorqué l'élu LR.
Au moment venu, quand elles rendront leur avis, je saurai prendre mes responsabilités.
Suite à ces déclarations, Crescent Marault a réitéré sa volonté de ne pas démissionner de ses mandats de maire et de président de la communauté de l'Auxerrois tant que l'affaire judiciaire est toujours en cours, rappelant qu'il n'a pas été pour l'instant mis en examen. "Je vais laisser faire le travail des personnes qui sont chargées de le faire et au moment venu, quand elles rendront leur avis, je saurai prendre mes responsabilités s’il fallait que je les prenne."
Rappel des faits
A l'origine de ces attaques, le marché public de l'aménagement de la médiathèque de Saint-Georges-sur-Baulche, une commune voisine à Auxerre dont Crescent Marault a été le maire de 2010 à 2020 avant d'être élu à la mairie d'Auxerre. Un marché public, d'un montant de près de 55 000 euros, attribué en 2018 à une première entreprise d'Appoigny qui s'était désistée.
C'est finalement Equip'Buro, la société dirigée par Crescent Marault, qui a livré les meubles. La justice reproche à l'élu d'avoir fait réaliser ces travaux par sa propre société alors qu'il était maire de Saint-Georges-sur-Baulche.
Aujourd'hui, il reconnaît cette erreur et s'en défend. Il n'y a pas eu, selon lui, d'enrichissement personnel. "Je suis comme tout le monde, je prends des responsabilités et je les assume. Quand je fais des erreurs, je les assume aussi" reconnaît l'élu. "Aujourd'hui, il y a une instruction en cours. C'est aux gens dont c'est le métier de dire clairement ce qu'il en est. Pour le moment, je continue à travailler."