Porte-parole du Rassemblement National, le député de la 3ème circonscription de l'Yonne enchaîne les interventions médiatiques, notamment sur les chaînes d'information. Durant l'été, il a été invité 37 fois à la télévision et à la radio.
"Vacances j’oublie tout, j’ai rien à faire du tout" ? Pas vraiment. CNews, Europe 1, BFM TV... durant l’été, Julien Odoul a au contraire joué les prolongations sur les plateaux et continué d'occuper l’espace médiatique. Une hyperactivité qui répond à une stratégie décidée au sein du Rassemblement National : faire émerger de nouvelles voix pour peser dans le jeu politique.
Entre juillet et août dernier, le député de la 3ème circonscription de l’Yonne est alors intervenu à 37 reprises dans les médias. Des prises de parole savamment relayées sur les réseaux sociaux à coup de petits extraits vidéos "best-of".
37 interventions dans les médias, dont 19 sur CNews.
S’il s’est éloigné des chaînes d’information durant le mois d’août, Julien Odoul n’a pas totalement déconnecté. En atteste sa présence le 15 août dernier dans la matinale de la chaîne info appartenant au Groupe Canal. Contacté par France 3 Bourgogne, l'élu de l'Yonne assure qu'il ne ressent aucune forme d'addiction pour l'exercice médiatique et qu'il a été moins présent cet été.
"Le 15 août, j'étais de passage à Paris et il y avait un actualité chargée notamment sur le volet sécuritaire. Non, non, non, il n'y a pas d'addiction. Quand vous regardez mes taux de présence sur le terrain dans l'Yonne, c'est beaucoup plus important que les heures d'antenne que je peux faire".
Au cours des dernières années, le conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté s’est imposé comme une figure de son parti, devenant même l’un de ses porte-paroles en juillet 2021. À tel point qu’à CNews, chaîne à la ligne éditoriale conservatrice où il réalise la majorité de ses interventions médiatiques, Julien Odoul "a son rond de serviette", nous confie une salariée de la rédaction.
"Avant d’être député, il venait déjà deux ou trois fois par semaine. Souvent dans les émissions de Sonia Mabrouk à midi, des fois dans la matinale et le soir. Les présentateurs l’aiment bien, les gens de la chaîne trouvent qu’il est bon. Il est vite devenu un invité récurrent".
"Le RN n’a pas beaucoup d’orateurs dans ses rangs. Il est considéré comme quelqu’un qui représente bien la ligne du parti, des compétences sur le fond et sur la forme", ajoute Dominique Andolfatto, qui est professeur en Science Politique à l'Université de Bourgogne.
En intervenant régulièrement sur CNews ou BFM TV, Julien Odoul s’offre une tribune médiatique sur des chaînes suivies respectivement par 2 et 3,4 % des téléspectateurs en moyenne (chiffres du mois de mai 2022). Retrouvez ci-dessous notre graphique interactif décrivant le nombre d'interventions par média de Julien Odoul cet été.
"Julien Odoul ? Un bon client"
Mais le député de l'Yonne assure que sa présence médiatique répond aux intérêts de sa formation politique et pas à des ambitions personnelles. "Il y a beaucoup de fantasmes sur ça. Mes interventions sont pour servir le parti. Je suis porte-parole du mouvement. Il est nécessaire que les idées, les avis, les propositions que nous défendons soient relayées dans les différents médias. C'est mon rôle de répondre aux sollicitations et de réagir à l'actualité qui est très riche".
Notre source nous indique d'ailleurs que ce sont les programmateurs de CNews qui le sollicitent et qu'il n'est pas payé pour ses interventions. "On peut avoir des intervenants payés comme Élisabeth Lévy ou Jean Messiha. Mais Julien Odoul lui vient en tant qu’invité politique. Il n’est pas du tout payé", assure la salariée de la chaîne.
Il a le profil idéal pour la chaîne : jeune, réac, qui fait du buzz. Il parle bien, s’exprime bien, il a une bonne tête.
Une salariée de CNews qui souhaite garder l'anonymat
"Il est jeune, ce n’est pas un vieux croulant comme il peut y avoir en général dans nos invités. C’est un bon profil. Il fait du clash, du buzz. Il a du répondant. Tu peux dialoguer avec Odoul mais il n’a pas peur d’y aller. Tu sais que c’est quelqu’un, tu le mets sur un plateau télé, il va y avoir des arguments, une présence et il ne va pas se gêner pour rentrer dans le tas", décrit la journaliste de CNews qui évoque Julien Odoul comme un "bon client" pour la chaîne.
"Je ne fais jamais les choses à moitié, réagit le député de l'Yonne. Je déteste la langue de bois. Je défends mes convictions avec ma sensibilité, c'est peut-être ça qui plait. Je parle peut-être cash, très cash, mais il y a des sujets qui nécessitent de dire les choses. La tiédeur dégoûte les Français du discours politique".
Être sur les plateaux à Paris et élu local dans l'Yonne, compatible ?
Du haut de ses 37 ans, Julien Odoul incarne une nouvelle génération au RN, à l’aise dans l’exercice médiatique. "Il fait partie des figures émergentes, comme Jordan Bardella (ndlr : président par intérim du parti). Ce sont un peu des clones d’ailleurs !", explique la journaliste du groupe Canal.
La politique c’est servir l’intérêt général, défendre ses idées, faire avancer ses conviction et ça passe par les médias. Tous les canaux sont importants mais le terrain est toujours fondamental.
Julien Odoul, député de la 3ème circonscription de l'Yonne
À une différence près, Julien Odoul est élu local. À Sens et dans notre région, il est conseillé d’opposition et dans la 3ème circonscription de l’Yonne, il est député depuis juin dernier. "Julien Odoul a un atout, c’est un député. Bardella ne l’est pas", souligne Dominique Andolfatto. D'ailleurs, le député bourguignon garantit que ses passages à la télévision nationale ne sont pas incompatibles avec son mandat local.
"C'est complémentaire. J'ai la capacité de faire les deux pleinement. Je le vois sur les marchés, je reçois un certain nombre de félicitations sur mes différents passages". Julien Odoul explique même que ses échanges sur le terrain servent ses interventions en plateau. "Le terrain, le réel permettent d'avoir des prises de parole d'autant plus percutantes et sincères".
Rendre visible le RN
"Quand on fait de la politique, il faut être sur ces chaînes et participer aux grands débats à la radio. Longtemps au RN, la parole médiatique était monopolisée par les Le Pen. Le parti gagne désormais en surface électorale. Il veut faire émerger des personnages médiatiques. Ça rentre dans la stratégie de dédiabolisation. Julien Odoul y participe à sa manière", décrypte Dominique Andolfatto.
Le temps où certains médias refusaient de donner une tribune au Rassemblement National semble donc révolu. Encore plus depuis les Législatives 2022 qui ont vu le parti emporter 89 députations. "Le RN développe une stratégie de présence médiatique pour montrer qu’il est dans la même cour que les autres partis. L’idée, c’est de rompre le cordon sanitaire qui l’isolait et le mettait à la marge", résume le professeur de Science Politique.
En multipliant les interventions en plateau, Julien Odoul répond aussi à la volonté du parti d’extrême droite de se démarquer des figures de La France Insoumise. "Ça se traduit même au niveau de l’apparence. On a eu l’épisode des députés qui sont arrivés en cravate à l’Assemblée nationale. Là, on a des élus en plateau qui ont des allures de premiers de la classe et de bons élèves. Julien Odoul incarne ça".
Et comme tous les bons élèves, le député n'a pas raté la rentrée, mais médiatique dans son cas. Il était présent sur le plateau de CNews le 30 août dernier pour débattre entre 10h30 et 12h00.
