Après le passage des orages sur toute la France ce week-end, c'est l'heure du bilan pour les agriculteurs. Dans l'Yonne, certains ont perdu quasiment toute leur récolte.
Le cauchemar ne finit pas. Les orages qui ont frappé la France, pendant le week-end des 4 et 5 juin, ont éteint l'espoir qu'avaient certains agriculteurs de réaliser une bonne récolte cet été. Un aléa d'autant plus catastrophique que 2022 semblait s'annonçait comme une bonne année pour les producteurs.
"On partait vraiment avec une récolte très correcte, avec des prix très intéressants pour nous", affirme Thierry Bierne. Il est agriculteur à Maison-Dieu, dans l'Yonne. "On espérait une récolte satisfaisante pour couvrir l'augmentation des charges l'année prochaine. Nos produits agricoles ont doublé de prix, les carburants aussi, l'engrais a triplé, les phytosanitaires ont pris 20%... Donc c'est compliqué."
Une double peine pour les producteurs
Il est environ 21 heures samedi soir lorsque l'orage s'abat sur l'Avallonais, dans l'est du département. Si les dégâts liés aux intempéries ont été relativement limités dans le reste de la Bourgogne, ce secteur fait partie des plus touchés.
"Ça a duré une dizaine de minutes, à peine", décrit Thierry Bierne. "C'était un épisode de grêle avec des vents violents, et des grêlons de la taille d'une noix. Pour moi, il y a un minimum de 80 % de pertes à la récolte."
Assuré contre les aléas climatiques et la grêle, l'agriculteur sera indemnisé, même si la somme perçue risque d'être insuffisante. Car en février, il a vendu, en avance, une partie de ses récoltes, alors que le prix des céréales était alors inférieur au prix actuel. Or, pour honorer ses contrats, il devra racheter les quantités manquantes... au prix fort.
Pour le colza par exemple, on a vendu à 550, 600€ la tonne en début d'année. Aujourd'hui, c'est de l'ordre de 700, 750€ la tonne.
Thierry Bierne, agriculteur dans l'Yonne
"C'est une double peine pour les exploitants qui ont précommercialisé", poursuit-t-il. "Les conséquences ne vont pas se limiter à cette année. Ça va être des investissements qui vont être reportés et une agriculture qui va patiner, car elle ne pourra pas se mettre au goût du jour technologiquement."
Vers un nouveau système d'indemnisation en 2023
En visite en Gironde lundi 6 juin, le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau a annoncé des mesures d'urgence pour soulager les agriculteurs. "On va activer très rapidement les dispositifs d'allègement des charges sociales, défiscalisation de la taxe sur le foncier non bâti", a-t-il indiqué. L'État débloquera également 300 millions d'euros pour aider les exploitants agricoles à prendre des assurances. Beaucoup n'en possèdent en effet toujours pas.
"Les assurances ne sont pas obligatoires", précise Arnaud Delestre, président de la Chambre d'agriculture de l'Yonne. "Pour schématiser, il n'y avait que les personnes sinistrées qui s'assuraient. Comme la base d'assurés n'était pas suffisante, les cotisations ont augmenté de plus en plus."
La part que coûtait l'assurance dans le budget par rapport aux risques n'était pas intéressante pour l'agriculteur.
Arnaud Delestre, président de la Chambre d'agriculture de l'Yonne
Mais avec des crises à répétition, le système d'indemnisation ne convient plus aux producteurs. Pour pallier ce problème, une refonte dudit système est prévue pour le 1er janvier prochain. Il se déclinera en trois niveaux :
- en dessous de 20% de pertes : les dégâts sont laissés à la charge de l'agriculteur.
- entre 20 et 50% de pertes : l'assureur prend en charge le manque à gagner.
- au-delà de 50% : les aides sont abondées par l'État.
Pour autant, le représentant appelle à ne pas uniquement compter sur ce nouveau système. "Le changement climatique impacte forcément l'activité agricole. Il faut s'adapter. Certes, contre la grêle on ne peut pas grand chose. Mais il faut chercher des réponses pour être plus résistants face au changement climatique. Il faut construire la résilience des exploitations agricoles."