Dans l'Yonne, une jeune chatte forestière s'apprête à retrouver sa liberté. Trois mois plus tôt, elle avait été heurtée par une voiture et gardée - temporairement - chez un couple qui l'avait prise pour un "simple" chat de gouttière.
"Un chat forestier, c'est très mignon, mais quand ça se sent pris au piège, ça attaque." Et ça griffe ! Cette mésaventure a été vécue par un couple de bons samaritains, en août dernier, lorsqu'ils ont secouru ce qu'ils pensaient être un simple chat de gouttière. Le félin s'est avéré être un chat forestier, redoutable prédateur, totalement sauvage mais physiquement assez similaire à un chat domestique. Ce vendredi 24 novembre, la petite femelle sera relâchée en lieu sûr, dans la forêt d'Othe (Yonne).
"Le chat devenait fou"
L'histoire est contée par Dominique Crickboom, directeur capacitaire du CSOS 89, un centre de sauvetage d'animaux sauvages basé à Fontaine-la-Gaillarde, près de Sens. En août 2023, un couple en voiture traverse une forêt près de son domicile de Provins (Seine-et-Marne). "Soudain, un chat saute sur la route et se fait heurter par la voiture. Comme le couple avait déjà deux chats, ils connaissaient un vétérinaire. Ils ont récupéré le chat accidenté qui était en mauvais état." La petite femelle souffre d'une fracture du fémur.
Le vétérinaire opère l'animal, puis le rend à la famille. "Il leur a dit : c'est un chat de gouttière, mais il me paraît un peu bizarre !" relate Dominique Crickboom. Le couple ramène alors la bestiole à domicile.
"Sauf que le lendemain matin, quand l'anesthésie a cessé de faire effet... Il a vu les deux autres chats de la maison et a commencé à les agresser. Les gens ont voulu intervenir, ils se sont fait agresser aussi !"
Dominique Crickboomdirecteur capacitaire du CSOS 89
Décontenancé, le couple arrive tant bien que mal à attraper la chatte et à l'enfermer dans le poulailler familial - après avoir enlevé les poules, bien sûr. "Puis, ils se sont rapidement rendus compte qu'ils ne pouvaient plus rentrer dans le poulailler ! Le chat devenait fou", poursuit Dominique Crickboom.
"Forcément,on ne manipule pas un chat forestier comme un chat domestique..."
Dominique Crickboomdirecteur capacitaire du CSOS 89
Le couple parvient seulement à nourrir le chat, totalement sauvage. Finalement, après un mois environ de cohabitation agitée, ils contactent le CSOS 89 qui s'aperçoit, après examen, qu'ils sont bien en présence d'un chat forestier. Il faut dire que la distinction peut être difficile : "cinq critères physiques permettent de déterminer à 90 % l'espèce, mais pour les 10 % restants, il faut réaliser des tests ADN tellement ils peuvent ressembler à des chats domestiques", explique Dominique Crickboom.
Totalement sauvage
En septembre, le centre de sauvetage basé à Fontaine-la-Gaillarde récupère donc la petite femelle et l'installe dans un enclos spécifique. Depuis, elle est nourrie de proies vivantes (des souris notamment) et vit cachée la plupart du temps.
"C'est un animal sauvage, c'est dans sa nature de se cacher tout le temps. On ne peut jamais la voir. Le seul moyen, c'est grâce aux caméras que nous avons installées dans sa cage." Les soignants du CSOS 89 ont pu déterminer son âge approximatif : une juvénile d'environ 6 à 8 mois.
Aujourd'hui, la convalescense de l'animal est terminée. Ce vendredi 24 novembre, la chatte sera relâchée en forêt d'Othe, le plus grand bois de l'Yonne.
"On a choisi cette forêt domaniale parce qu'on la connaît bien et qu'on sait que des chats forestiers y vivent", justifie Dominique Crickboom. Il y a quelques années, le CSOS 89 a aperçu des chats forestiers sur place, à l'occasion du tournage d'un documentaire animalier réalisé avec l'ONF.
Très difficile à distinguer du chat domestique
Le chat forestier est une espèce pas forcément rare, mais difficile à observer car très discrète, note Dominique Crickboom. "En 40 ans depuis la création du CSOS 89, on a dû en récupérer 4 ou 5 seulement."
"Il n'y a pas grand-monde qui connaît le chat forestier"
Dominique Crickboomdirecteur capacitaire du CSOS 89
Et ce n'est pas la première histoire de ce type : en Côte-d'Or aussi, un couple a récemment secouru un chat forestier en le prenant pour un chat domestique. "Les mâles forestiers sont très imposants. Globalement, le chat forestier a de plus grosses pattes et une queue épaisse, mais pour les néophytes c'est hyper compliqué de faire la distinction. Certains chats domestiques ressemblent énormément à des sauvages." En cas de doute, n'hésitez pas à contacter un centre de sauvetage de la faune sauvage : le CSOS 89 par exemple, ou encore le Centre Athénas du Jura.