Loi travail : Les modifications annoncées par Manuel Valls coincent toujours sur le front du refus

Suppression du plafonnement obligatoire des indemnités prud'homales, contrôle accru du juge sur les licenciements économiques, plus de formation pour les non diplômés: Manuel Valls a annoncé lundi 14 mars des modifications au projet de loi Travail, le front du refus est toujours opposé au projet

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Indemnités prud'homales: un barème seulement "indicatif"

La précédente version du texte prévoyait le plafonnement obligatoire des indemnités prud'homales en cas de licenciement abusif (de 3 mois de salaire à 15 mois maximum selon l'ancienneté). Unanimement rejeté par les syndicats, ce barème obligatoire
est supprimé au profit d'un barème "indicatif". Il sera fixé par décret et devrait être identique à celui de l'avant-projet de loi.
Il est censé donner davantage de prévisibilité, en créant une sorte de "guide" pour accompagner les juges, selon Manuel Valls.

Licenciements économiques: critères maintenus mais davantage de contrôle pour le juge

La réforme des licenciements économiques prévoit d'incorporer dans la loi les motifs reconnus par la jurisprudence, en précisant les critères des difficultés des entreprises. Ces critères restent les mêmes que dans le texte initial, notamment quatre trimestres consécutifs de baisse du chiffre d'affaires et deux trimestres consécutifs de perte d'exploitation.
L'appréciation des difficultés économiques au seul niveau national pour les filiales françaises d'un groupe - et non au niveau de l'ensemble du groupe comme aujourd'hui - est également maintenue pour attirer les investisseurs étrangers.
C'est l'un des points les plus controversés de la réforme: il fait craindre la facilitation des licenciements "boursiers". La nouvelle mouture prévoit donc un rôle accru du juge: s'il est établi que l'entreprise a organisé "artificiellement" les difficultés économiques, le licenciement économique sera requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Forfait-jours: pas de nouvelle souplesse pour les PME

La projet de loi corrigé réduit le champ laissé aux décisions unilatérales des dirigeants de petites et moyennes entreprises.
Les PME devront notamment passer par un accord pour appliquer le forfait-jours.
Si elles ne disposent pas de représentation syndicale, elles pourront négocier avec un salarié mandaté par un syndicat, comme le réclamaient les syndicats dits "réformistes". Ou encore appliquer des accords-types de branche.
Le texte initial prévoyait que les entreprises de moins de 50 salariés pourraient proposer un passage au forfait-jours (régime dérogatoire aux 35 heures permettant de rémunérer les salariés en fonction des jours travaillés et non d'horaires hebdomadaires)
sans passer par un accord collectif.

Le niveau du droit supplétif relevé

La nouvelle architecture du Code du travail prévoit une réécriture du texte sur trois étages: l'ordre public, le champ de la négociation collective et les dispositions supplétives applicables en l'absence d'accord d'entreprise ou de branche. Pour
inciter à négocier, le projet initial avait calé ces dispositions supplétives un peu en-deçà du droit actuel. Dans la nouvelle mouture, elles seront "ramenées au niveau du droit actuel", précise Matignon.

Apprentis: pas d'augmentation du temps de travail

La version amendée du projet de loi renonce à donner plus de souplesse pour augmenter le temps de travail des apprentis mineurs: dans certains secteurs comme le bâtiment, un employeur aurait pu faire travailler un apprenti jusqu'à 10 heures (au lieu
de 8) par jour et 40 heures par semaine (au lieu de 35) sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail. Cette autorisation est réintroduite.
L'annualisation du temps de travail moins flexible Le projet prévoyait la possibilité d'annualiser le temps de travail en l'étalant sur trois ans (au lieu d'un actuellement) à condition qu'il y ait un accord d'entreprise.
La modulation au-delà d'une année ne sera finalement possible que via un accord de branche.

400 heures de formation pour les non-diplômés

Le plafond du compte personnel de formation (CPF) sera relevé de 150 à 400 heures pour les salariés sans diplôme, ce qui leur permettra "d'accéder à un niveau supplémentaire de qualification tous les 10 ans", selon Manuel Valls.  Le CPF, entré en vigueur
en janvier 2015 pour les seuls actifs du privé, sera progressivement étendu aux indépendants, professions libérales et fonctionnaires.
Un compte "engagement citoyen" est par ailleurs créé et couplé au compte personnel d'activité (CPA).

La garantie jeunes élargie

Le nouveau projet prévoit une généralisation de la garantie jeunes, qui deviendra un droit personnel et universel pour tous les jeunes sans emploi ni formation.
Le gouvernement souhaitait initialement atteindre 100.000 jeunes en 2017.
Ce dispositif expérimental offre, pour une durée d'un an, un accompagnement renforcé, des périodes en entreprise et une allocation mensuelle d'environ 450 euros

Les congés spéciaux

Les entreprises ne pourront pas, par accord, passer en dessous du nombre de jours de congés fixés par la loi pour les congés spéciaux (mariage, naissance, décès), contrairement à ce qu'envisageait la version précédente.

Les réactions des syndicats, recueillies par Michel Gillot et Jean-Louis Saintain

Intervenants :
  • Franck Laureau, FO Côte d'Or
  •  
  • Aleth Poupon, Union Départementale CGT 21
  •  
  • Théo Sainte-Marie, Président de l'UNEF Bourgogne
Le projet de loi sur le Code du Travail. A Dijon, les annonces de Manuel Valls et Myriam El Khomry ont été suivies de près par la CGT FO et l'UNEF, et les trois organisations n'ont pas été convaincues par les modifications proposées par les ministres. Reportage Michel Gillot et Jean-Louis Saintain




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