Une cultivatrice de choux-fleurs de Plouguiel (Côtes-d'Armor) a demandé au tribunal administratif de Rennes ce jeudi 13 juin de condamner l'État à l'indemniser à hauteur de 17 000 €. Sa récolte avait été détruite par une attaque de choucas des tours en 2021.
Près de Tréguier, une agricultrice installée à Plougrescant (Côtes-d'Armor) a vu sa récolte de choux-fleurs ravagée à l'été 2021 par des choucas des tours, des oiseaux cousins des corbeaux. Elle demande aujourd'hui au tribunal administratif de condamner pour cela l'État à hauteur de 17 000 euros, après avoir constaté "des dommages importants" sur son activité.
Entre le 19 juin et le 2 août 2021, l'agricultrice bretonne avait planté des pieds de choux-fleurs sur quatre parcelles. Mais le 23 août suivant, elle avait constaté que "l'ensemble des plans avaient été déterrés". Elle avait alors fait le lien avec "une importante population de choucas", une espèce d'oiseaux "protégée" et "omnivore" présente sur "tous les continents" hormis l'Amérique du Sud et l'Antarctique, a recadré la rapporteure publique lors de l'audience de ce jeudi 14 juin.
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Comme elle n'avait pas pu "replanter" ses choux-fleurs car "la date de plantation était largement dépassée", l'agricultrice avait donc introduit un recours devant le tribunal administratif de Rennes pour obtenir réparation. Elle évalue son préjudice financier à 17 469 €.
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Un minimum de pragmatisme
"Il vous appartient d'apprécier si ce préjudice est anormal et spécial", a donc expliqué la magistrate aux trois juges rennais : il faut pour cela "démontrer que les plants ont effectivement été arrachés par les choucas". Mais en l'espèce, "aucune pièce du dossier ne permet de l'affirmer" puisque la présence du choucas des tours n'a pas été "signalée dans les semaines et saisons antérieures" aux abords de la parcelle de la requérante, a fait remarquer la magistrate administrative.
De plus, "les corneilles se délectent tout autant des choux-fleurs que les choucas", et "même si cette destruction leur est imputable", la requérante "ne justifie pas que son préjudice est lié à la prolifération de cette espèce". "En matière d’espèces protégées, c'est plutôt rare de retenir un préjudice anormal et spécial", a d'ailleurs fait savoir la rapporteure publique, qui a par conséquent conclu au "rejet" de la requête indemnitaire.
Mais pour l'avocat de l'agricultrice, la "gravité" du préjudice paraît "assez évidente" au regard des "caractéristiques de l'exploitation" qui a "spécialement fait l'objet de dégâts" : "des choucas sont présents en population importante dans un bois situé à quelques dizaines de mètres" des parcelles où la destruction a été constatée par la plaignante.
D'ailleurs, "un représentant de la Chambre d'agriculture est venu le constater", en veut pour preuve l'avocat, qui a réclamé "un minimum de pragmatisme" dans cette affaire où "l'évidence est étayée par des éléments objectifs". Les juges, qui ont mis leur décision en délibéré, se prononceront dans les prochaines semaines.