1052 éleveurs publient un "manifeste des éleveurs hors la loi". Comme Marie-Edith Macé installée près de Rennes (35), ils utilisent des huiles essentielles pour prévenir les maladies de leurs animaux ou bien pour les soigner. Une pratique souvent illégale.
De l'extrait de géranium pour soigner les mammites (inflammations des pis), de l'hélichryse italienne contre les saignements. Depuis 2008, Marie-Édith Macé, éleveur bio installée à Melesse près de Rennes (Ille-et-Vilaine), utilise des huiles essentielles pour soigner ou prévenir les petits problèmes de ses cinquante vaches laitières. C'est seulement quand la pathologie est plus grave, qu'elle leur administre des antibiotiques.
Si Marie-Edith Macé n'a pas encore signé le "manifeste des éleveurs hors la loi" comme 1052 de ses collègues, elle y souscrit complètement. Adhérente à l'association Adage35 (Agriculture Durable par l'Autonomie, la Gestion et l'Environnement), l'agricultrice milite pour que soit légalisé l'usage des plantes à titre préventif ou curatif.
Sous le manteau
Car actuellement, la plupart des huiles essentielles à usage vétérinaire sont interdites pour soigner. Comme pour les humains, les médicaments vétérinaires sont soumis à une autorisation de mise sur le marché (AMM) après être passés par une série de tests. Or ces examens plus complexes que pour des médicaments chimiques sont aussi plus onéreux. Seules 21 formules d'huiles essentielles sont donc autorisées.
N'empêche. Face aux antibiorésistances, leur usage se répand dans les élevages.
Selon l'Institut technique de l'agriculture biologique, les 3/4 des éleveurs bio utiliseraient ces thérapies alternatives en catimini pour leurs veaux, vaches, poules, principalement à titre préventif.
500 tonnes d'antibiotiques vendues en 2017
En 2017, 500 tonnes d'antibiotiques vétérinaires auraient été délivrés en France. Dans le même temps, l'État a déjà lancé deux plans Écoantibio sur cinq ans chacun (en 2012 puis 2017) visant à réduire la consommation antibiotique dans les élevages. Enfin, le cahier des charges européen pour l'élevage bio préconise de favoriser les "produits phytothérapeutiques, homéopathiques".
Des traces dans le lait ?
Vétérinaire à Saint-Grégoire (35), Julien Daspet reconnait prescrire de plus en plus de médicaments à base de plantes. "Certaines sont autorisées en tant que complément alimentaire mais pas à usage thérapeutique". Mais attention ! Traitements à base de plantes ne signifie pas inoffensif, rappelle-t-il. "La difficulté pour les huiles essentielles non autorisées pour soigner, c'est qu'on ignore dans quelle mesure les molécules passent ou non dans le lait et la viande".
Dans leur manifeste, les éleveurs utilisateurs réclament donc que l'État définisse "en urgence [...] un cadre réglementaire spécifique pour pouvoir utiliser les plantes en élevage et mette un terme à cette situation."