"C'est un déclin généralisé". Sternes de Dougall, hirondelles, reptiles. Quelles sont les espèces menacées en Bretagne

76 espèces d'oiseaux communs nichant en Bretagne sont menacés. 45 % des reptiles et amphibiens présents sur le territoire breton sont en déclin avéré. Le constat est sans appel. L'agriculture intensive, l'urbanisation croissante et l'artificialisation des sols, autrement dit l'activité humaine, pèsent lourd sur la faune sauvage dont l'espace de vie se réduit comme peau de chagrin.

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43 % des oiseaux nicheurs en Bretagne sont en danger. La nouvelle liste rouge publiée par Bretagne Vivante en octobre dernier est sans appel. "76 espèces sont menacées en 2021, contre 69 en 2015, constate l'association. La situation s'aggrave".

Le courlis cendré, la sterne de Dougall, le busard cendré, la sarcelle, pour ne citer qu'eux, figurent même parmi les oiseaux en danger critique. Cette liste rouge, qui s'appuie sur la méthodologie développée par l'Union internationale de conservation de la nature (UICN), est le fruit du travail mené sur le terrain par l'Observatoire régional de l'avifaune et les experts ornithologues de Bretagne Vivante.

16 espèces d'oiseaux éteintes en Bretagne

Le bilan montre également que 16 espèces d'oiseaux sont désormais considérées comme éteintes dans la région. Le pic cendré, la bécassine des marais ou encore le Tarier des prés ont disparu du paysage breton. "Déjà en 2012, l'atlas des oiseaux nicheurs de Bretagne dressait un constat alarmant de la baisse drastique des populations de pic cendré. Sa disparition est aujourd'hui actée" indique Bretagne Vivante.

Plus l'humain s'étale, moins la faune sauvage a de l'espace

Barbara Deyme

Bretagne Vivante

Le goéland argenté, le Gravelot à collier interrompu sont, eux, en situation de vulnérabilité. Autrement dit : les populations et leur aire de répartition diminuent. "Plus l'humain s'étale, moins la faune sauvage a de l'espace, relève Barbara Deyme, responsable communication à Bretagne Vivante. La sterne de Dougall, par exemple, est à 95 % concentrée sur l'île aux Moutons, dans l'archipel des Glénan. C'est le seul endroit où elle peut trouver de la place pour nidifier tranquillement, loin du dérangement humain et de la prédation. Or, ce n'est pas idéal puisque cette aire de répartition réduite l'expose plus facilement à d'autres problématiques, comme la grippe aviaire, les tempêtes qui balaient les œufs. Elle est aujourd'hui sous la menace d'une extinction".

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Hirondelles, moineaux, martinets en chute libre

Les oiseaux marins ne sont malheureusement pas les seuls à subir l'activité humaine, au point de disparaître. Les oiseaux des zones humides, des forêts ou des champs ne se portent pas mieux. "Les modes d'exploitation agricoles, l'utilisation des intrants chimiques qui polluent les sols, l'air, ont des répercussions sur la biodiversité, explique François Siorat, chef du pôle nature et paysage à l'Observatoire de l'environnement en Bretagne (OEB). Il y a moins d'insectes, donc moins de nourriture pour les oiseaux donc moins d'oiseaux. L'alouette des champs est en risque de disparition critique".

Le naturaliste cite également le cas des hirondelles qui disposent de moins de ressources alimentaires et de moins en moins d'endroits pour faire leur nid. "À Rennes, dit-il, les populations d'hirondelles, mais aussi de moineaux et de martinets, sont en chute libre. L'habitat moderne ne leur permet plus d'avoir des nichoirs sur les maisons. C'est dommage que dans nos politiques publiques on ne parvienne pas à injecter des réflexes pour protéger la biodiversité".

"Quand les bâtiments sont rénovés, on comble les trous, souligne Barbara Deyme. Sauf que, pour les mésanges, les rouges-gorges et tous les oiseaux de jardins, ces trous sont leur habitat naturel".

45 % des reptiles et amphibiens en danger

Chez les reptiles et les amphibiens, "on assiste à un déclin généralisé" déplore Stéphane Wiza, herpétologue à Bretagne Vivante. L'association, via son observatoire herpétologique, suit à la trace l'évolution des 24 espèces présentes sur le territoire breton, lesquelles sont très sensibles au moindre changement dans leur environnement. D'autant que leurs capacités de déplacement sont faibles.

Destruction des habitats, artificialisation des sols, réchauffement climatique sont autant de facteurs qui bouleversent l'existence du triton crêté, de la couleuvre d'Esculape, de la grenouille rousse ou encore de l'alyte accoucheur. "45 % des reptiles et batraciens sont soit en danger, soit vulnérables soit quasi menacés, précise Stéphane Wiza. Si on ne met pas en place des mesures de conservation immédiates, ils vont disparaître à moyen et long terme. C'est une éventualité très forte".

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La couleuvre d'Esculape, qui est un serpent arboricole, a disparu du Finistère et du Morbihan mais reste présente en Ille-et-Vilaine. Tout comme le triton crêté qui aime les mares profondes et ensoleillées pour se reproduire. L'herpétologue de Bretagne Vivante signale encore que la vipère péliade est en danger d'extinction. "Les reptiles sont à l'interface des milieux ouverts et fermés, détaille Stéphane Wiza. Ils ont besoin de haies, de boisements, de bocages. Ils prennent de plein fouet le remembrement et la simplification des paysages".

Les amphibiens, eux, se retrouvent très vite "limités" avec la baisse des zones humides et l'augmentation des pollutions organiques. "Sans oublier l'artificialisation des sols, remarque l'herpétologue. Entre 1985 et 2005, en Bretagne, 800 km2 ont été artificialisés, soit la superficie de Paris et de plusieurs départements d'Ile-de-France".

Conséquence : ces phénomènes engendrent une fragmentation des populations qui se maintiennent, "mais elles ne sont plus connectées entre elles pour survivre". 

La formation, "un levier sous-exploré"

L'espace pour ces reptiles et batraciens se réduit comme peau de chagrin, comme pour tous les autres animaux vertébrés ou invertébrés. À cela s'ajoute le réchauffement climatique, "perturbant pour des espèces obligées d'évoluer dans des zones en perte de naturalité".

Il y a des tas de choses à faire pour protéger ces bestioles-là. À commencer par la formation

Stéphane Wiza

Bretagne Vivante

Pourtant les serpents et autres crapauds sont de bons indicateurs de la qualité du milieu et de sa biodiversité. Des espèces parapluies, en quelque sorte, "garantes que les compartiments en dessous sont bien remplis".

Stéphane Wiza l'affirme : "Il y a des tas de choses à faire pour protéger ces bestioles-là. À commencer par la formation de tous ceux qui interviennent dans le cadre de l'aménagement. Un exemple simple : vous tondez votre pelouse, il y a un arbre, il faut laisser l'herbe pousser autour du tronc. Quand on fauche une prairie ou un roncier, on laisse un ourlet qui va servir de refuge". Il estime que la formation est "un levier sous-exploré".

Depuis les années 1960, Bretagne Vivante a développé un réseau d'espaces protégés. L'extension de la réserve naturelle du Venec, dans les Monts-d'Arrée, en est un exemple. "Mais ces espaces protégés sont encore trop peu nombreux pour enrayer le déclin de l'avifaune régionale" note l'association.

En Bretagne, le schéma régional de cohérence écologique, qui vise à préserver la faune et la flore, a été adopté en 2015. Il dessine "une trame verte et bleue" pour freiner la dégradation des milieux naturels, réduits et morcelés par l'urbanisation et les activités humaines.

Le constat est pourtant là. Ce n'est pas parce qu'une espèce vit toujours sur le littoral, dans les landes, les forêts, les marais ou les champs que la faune sauvage est en bonne santé. Les défenseurs de la nature tirent la sonnette d'alarme. "La biodiversité doit être placée au-dessus du panier, insiste Stéphane Wiza. Les animaux n'ont pas à s'excuser d'être là".

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