Des tempêtes, l'île de Sein en a essuyé de nombreuses. Celle qui s'annonce dans la nuit de mercredi à jeudi en Bretagne réveille forcément des inquiétudes. Cette étroite bande de terre, située à 1m50 au-dessus du niveau de la mer, subit les assauts répétés de l'océan conjugués à la montée du niveau de la mer. La tempête Ciaran, les Sénans s'y préparent. Et font le dos rond.
Sur l'île de Sein, au large de la Pointe-du-Raz, la tempête Ciaran est attendue, un peu comme à chaque fois qu'une tempête balaie la Bretagne. "On fait le dos rond" dit le maire Didier Fouquet. Lui, ce qu'il surveille surtout, c'est la digue près du phare : elle s'est écroulée sur 50 mètres en mars dernier, sous les coups de boutoir de la mer.
L'ouvrage, construit en 2011 à l'ouest de l'île, a été fragilisé par les vagues et les tempêtes successives. Il protège l'usine de dessalinisation qui fournit les Sénans en eau potable, ainsi que l'écloserie à homards. Les travaux de réfection ont démarré en octobre. "Ça a tenu le week-end dernier, on espère que ça tiendra cette fois. Rien n'est jamais sûr" note l'élu.
"On a vu pire !"
Le passage de la tempête Ciaran va s'accompagner de rafales de vent à plus de 150km/h sur le littoral breton et de vagues pouvant atteindre jusqu'à 10 mètres de hauteur. "Avec le coefficient de marée qui sera faible, la mer ne devrait pas nous envahir, rassure le maire de l'île de Sein. Ce qui nous inquiète, c'est le vent. Mais on a vu pire !".
Pire, dans la mémoire de François Spinec, c'est la tempête de février 2014. "La plus grosse mer que j'ai vue, avec une succession de dépressions qui nous a mis une houle énorme" raconte l'ancien pêcheur. La tempête Qumeira n'avait pas épargné cette étroite bande de terre plate, inondant les habitations et mettant hors service l'usine de dessalinisation. Cet hiver-là, l'île de Sein avait essuyé une dizaine de tempêtes.
3 kilomètres de digues protègent les habitants et les installations en cas de gros coups de tabac. "On a une île qui se trouve à 1m50 au-dessus de la mer, rappelle François Spinec. Elle est particulièrement vulnérable. En plus de l'augmentation du nombre de tempêtes, on est également confrontés à la montée du niveau de la mer. On voit que ça monte ici car on a des repères".
"Coupés du monde"
Le maire sait déjà que l'île sera isolée lorsque la tempête Ciaran touchera la Bretagne. "On va être coupés du monde pendant 4 jours, souligne Didier Fouquet. Les liaisons par bateau sont annulées ce jeudi et il y a une probabilité d'annulation pour les vendredi, samedi et dimanche". Sur son site, la compagnie Penn-ar-Bed, qui assure les traversées, annonce également que le dernier départ pour Sein, le 1er novembre, se fera depuis Douarnenez (au lieu d'Audierne).
Les 250 habitants se préparent. "On est tellement habitués, remarque François Spinec. On fait avec. Quand la mer est haute, il y a des risques". "Tout le monde rentre ce qui pourrait s'envoler et a anticipé l'absence de ravitaillement par bateau" ajoute Didier Fouquet.
La houle, au large de Sein, devrait atteindre entre 10 et 14 mètres, ce jeudi. "Elle s'oriente à l'ouest-sud-ouest, selon la direction du vent, indique Météo Bretagne dans son dernier bulletin. L'événement semble plus important que la tempête Johanna du 10 mars 2008 qui reste une référence en Bretagne". Et, surtout, ici, sur cette île posée à fleur d'eau : des vents conjugués à un fort coefficient de marée avaient fait rugir l'océan, provoquant l'effondrement d'une digue et submergeant le bourg. Même si Sein a depuis renforcé ses défenses, elles restent très sollicitées face à la montée du niveau de la mer aux assauts répétés des vagues par gros temps.