En Ille et Vilaine, les équipes du 115 appellent à l'aide : elles sont submergées par les appels et ne parviennent pas à faire face à toutes les demandes d'hébergement d'urgence. Celles des familles avec enfants ont augmenté de 30% au cours des six premiers mois de 2022.
"Le 115, bonjour !"
Au bout du fil, un homme cherche un endroit où dormir ce soir. Il décline son identité. Pour lui, c'est jour de chance, il obtient une place pour un semaine. Pourtant "quotidiennement, on doit recevoir une centaine d'appel de personnes qu'on ne peut pas orienter en structure d'hébergement faute de places", témoigne Nevena Pinsard, travailleuse sociale au SIAO 35.
85 % des appels des familles au 115 reçoivent une réponse négative
Très peu de places, notamment pour les familles nombreuses. Au cours des six premiers mois de 2022, leurs demandes d'hébergement d'urgence ont augmenté de 30 %. Dans 85 % des cas, leur demande reçoit une réponse négative.
Une situation de crise inédite selon les représentants de la SIAO. C'est ce qui les pousse aujourd'hui à tirer la sonnette d'alarme :
On n'a jamais eu autant de familles dehors depuis aussi longtemps, depuis plusieurs mois
Sophie RanduineauDirectrice du SIAO 35
"Ce sont des familles qui ont été sous tente, qui ont été dans des gymnases. On n'a pas assez de solution. Elles sont dans une grande détresse."
Comme cette mère de deux enfants qui a trouvé un abri pour dix jours aujourd'hui dans un centre d'hébergement dédié aux familles. Mais elle sait qu'elle devra sans doute repartir la semaine prochaine. Demain, ce couple d’Albanais et leurs cinq enfants devront libérer leurs chambres … et composer à nouveau le 115.
40 % de places en hébergement d'urgence supplémentaires
Pourtant, selon la Préfecture d'Ille et Vilaine, le nombre de places d'hébergement d'urgence qu'elle finance est passé de 864 à 1 1502 entre 2019 et 2022, soit une augmentation de près de 40 %. La Préfecture assure qu'en 2022, l'Etat "consacre 16 millions d’euros pour héberger, accompagner socialement, y compris avec l’appui de maraudes sociales."
La directrice du SIAO reconnaît les efforts de l'Etat et des collectivités mais ne peut que constater leur insuffisance : "On a effectivement des perspectives de création de place mais pas forcément sur Rennes alors que c'est là où on a le plus de besoins."
On demande également la régularisation de familles sur Rennes qui travaillent qui sont investies dans le réseau associatif et qui sont dans l'impossibilité aujourd'hui d'accéder au logement.
Sophie RanduineauDirectrice du SIAO 35
Car dans le pays de Rennes, la plupart des familles et des mineurs isolés qui vivent dans la rue sont en situation irrégulière. C'est ce qu'affirme Guillaume Girard, responsable d'un centre d'hébergement d'urgence de 42 places, géré par l'association Saint-Benoît Labre.
Pour les familles sans droit ni titre, les solutions qu'on peut activer sont très limitées. Tant que la question administrative ne sera pas levée, autrement dit, tant qu'ils n'auront pas obtenu un titre de séjour, il va être très compliqué de les sortir durablement de la rue.
Guillaume GirardResponsable d'un centre d'hébergement d'urgence - Association Saint-Benoît Labre
"Après il y a deux réponses à apporter : soit une logique répressive, soit une logique plus intégrative. Je laisse les politiques répondre à cette question."
Après l'ouverture d'un centre d'hébergement dédié aux familles d'une vingtaine de places à Betton, l'association Benoît Labre devrait en ouvrir un autre à Chateaubourg l'année prochaine.
En attendant les appels des familles au 115 se multiplient et leur errance se poursuit.
Lundi une vingtaine de personnes se sont installées dans un gymnase de la ville de Rennes.
En septembre en Ille et Vilaine, 5 400 demandes d'hébergement d'urgence ont été enregistrées. Seules 28 % d'entre elles ont reçu une réponse positive.