ENQUÊTE. "Modes d'emplois". Pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre, l'illusion de la parité

Et si la mixité femmes-hommes permettait à certains secteurs de résoudre leur pénurie de main-d'œuvre ? Cette piste fait son chemin dans les discours, mais dans les faits, le compte n’y est pas. Les femmes salariées dans des métiers masculins sont formelles : les entreprises peinent à s’engager. C'est le 4ème volet de "Modes d'emplois", une enquête qui déboulonne les idées reçues sur le monde du travail.

Une quinzaine d’hommes reviennent de leur pause cigarette. Ils se faufilent dans les couloirs pour rejoindre la salle de cours de l’entreprise PromoTrans à Yffiniac (Côtes d’Armor). Ces futurs chauffeurs de poids lourds plaisantent au passage à propos de leur formatrice : “Vous savez qu’elle est célibataire, hein !”

Vanessa Guillaume ne cille pas. À quarante-huit ans, dont vingt-trois passés dans le transport, elle s'accommode des petites réflexions qui fusent autour d’elle. Grâce à son “fort caractère”, cette ancienne conductrice au carré blond et au pull rose pétant a réussi à évoluer dans le secteur en devenant professeure. Elle a rencontré beaucoup d’obstacles dans sa carrière mais une seule chose compte : sa fierté d’avoir su s’imposer.

Le climat dans lequel travaille Vanessa Guillaume, c’est aussi le quotidien des autres salariées que nous avons rencontrées pour notre enquête : Mélina Durieu, ancienne camionneuse devenue peintre en bâtiment qui veut se reconvertir dans le numérique, Tatiana Quéré, apprentie électricienne, ou Marion Pocher, ingénieure dans la cybersécurité. Qu’elles soient en poste depuis moins de deux ans ou plus de vingt ans, toutes ont subi des remarques, plaisanteries ou attitudes hostiles de leurs collègues masculins.

Environ un tiers des femmes qui travaillent dans des “environnements professionnels majoritairement composés d’hommes” se disent victimes de harcèlement sexuel au travail, soit 35 %, contre 14 % pour celles qui évoluent dans des secteurs féminins, selon le sondage de l’Institut français d’opinion publique (Ifop) commandé en 2014 par le Défenseur des droits de l’époque, Dominique Baudis.

Malgré cette atmosphère défavorable, Vanessa, Mélina, Tatiana et Marion n’ont pas renoncé. Elles ont réussi à exercer le métier de leurs rêves et à s’engager dans des secteurs qui recrutent. La détermination de ces femmes, et de toutes celles qui veulent travailler au milieu d’hommes, apparaît de plus en plus comme une opportunité pour les entreprises, qui doivent combler des besoins en main-d’œuvre.

Comme l’affirme Emmanuelle Larroque, fondatrice et déléguée générale de Social Builder, une association spécialisée dans l’ accompagnement des femmes dans le numérique, les entreprises auraient tout intérêt à devenir mixtes : “Le sujet de la performance économique se cache derrière la féminisation, puisque les employeurs peinent à embaucher dans certaines professions.”

En témoigne l’enquête Besoins en main-d’œuvre, publiée en avril 2022 par Pôle emploi, qui désigne les métiers où les employeurs considèrent leurs projets de recrutement comme laborieux. Très clairement, ce sont les secteurs les moins mixtes qui sont les plus touchés.

Découvrez ici : En quête d'emplois. Les métiers en tension en Bretagne

Ainsi en est-il des aides à domicile, dont les employeurs estiment le recrutement difficile à 92,6 % en Bretagne. Or, ce métier est à 95% composé de femmes, d’après l’enquête de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) sur l’égalité entre les hommes et les femmes, publiée en 2022.

Dans la liste figurent également les ouvriers de la construction et du bâtiment (11,5 % de femmes et 82,3 % de projets difficiles en Bretagne), les métiers du transport et de l’entreposage (38 % de femmes et 69,9 % de recrutements difficiles), ainsi que ceux de l’informatique et du numérique (18 % de femmes et 75 % des projets de recrutement).

L’enquête Le coût économique des discriminations, menée en 2016 par France Stratégie, enfonce le clou. Selon ce service d’analyse rattaché au Premier ministre, le fait d’être une femme constitue le premier facteur de discrimination en emploi. Cette même enquête affirme que le sexisme contribue à un manque à gagner de cent-cinquante milliards d’euros sur le produit intérieur brut (PIB). Pourtant, depuis 2016, aucun plan d’ampleur n’a été entamé pour lutter contre ces inégalités sur le marché du travail.

"Modes d'emplois"
Le Français n’est plus bosseur ; tout le monde peut s’épanouir en télétravail ; l’intérimaire profite trop du système ; on peut se reconvertir comme on respire ; les femmes accèdent désormais à tous les métiers… Petit florilège d’idées reçues sur le marché du travail, que les étudiant·e·s du master “Journalisme, reportage et enquête” de Sciences Po Rennes interrogent en cinq volets.“Modes d’emplois” tente de démêler le vrai du faux, et prend le contrepied des préjugés.
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“On se prive de 50 % de la population”

La chercheuse Haude Rivoal, autrice de La Fabrique des masculinités au travail, en a fait l’amère expérience. Embauchée comme chargée d’égalité professionnelle homme-femme dans une entreprise de transport et de logistique, elle devait, pour son doctorat, calculer les écarts de salaire entre les hommes et les femmes. “On s’est rendu compte qu’il n’y avait pas beaucoup d’écarts, parce que les femmes étaient cantonnées à des tâches en dehors de la production, comme les ressources humaines ou le secrétariat, ou à des postes de management intermédiaire.”

“La question a été vite balayée : pour eux, s’il n’y a pas de femmes, pas besoin de mesurer des écarts, donc pas de discrimination, remarque la sociologue. Je me demandais pourquoi le directeur des ressources humaines m’avait embauchée s’il ne pensait pas qu’il y avait encore besoin de faire des efforts et j’ai compris qu’il considérait que ça faisait partie de son boulot de se montrer entreprenant et avant-gardiste sur la question.” Selon elle, certains cadres agissent pour la féminisation “juste parce que ça peut affecter positivement la boîte ou leur propre carrière”.

Certains secteurs commencent tout de même à se rendre compte du potentiel inexploité. Camille Durant, chargée de la formation et de l’emploi à la Fédération régionale des travaux publics (FRTP), reconnaît que “les entreprises des travaux publics se privent de 50 % de la population en ne touchant pas le public féminin”.

En des termes plus managériaux, Tristan Arnaud, le directeur du Centre de formation des apprentis (CFA) de Ploërmel, dans le Morbihan, résume : “On a un énorme besoin de salariés, donc maintenant les entreprises cherchent des femmes.”

Pour Jean-Raynald Barbier, le directeur du centre de formation routier PromoTrans, la prise de conscience des difficultés de recrutement a déjà fait changer les choses : “Avant, quand je sollicitais des places pour des jeunes filles en contrat professionnel, les chefs d’entreprise refusaient les profils. Avec la pénurie de candidats, c’est de moins en moins vrai ! Mais il reste du travail à faire.”

La route de la féminisation est encore longue. Tatiana Quéré peut en témoigner. Lorsque la jeune apprentie électricienne a cherché son alternance, elle a envoyé une cinquantaine de CV et n’a jamais eu de réponse, ce qu’elle explique par le fait d’être une femme. “L’entreprise où je travaille aujourd’hui, c’était vraiment celle de la dernière chance”, ajoute-t-elle.

Selon Emmanuelle Larroque, les entreprises ont un rôle à jouer dans la féminisation des secteurs masculins. La spécialiste de l’insertion des femmes dans le numérique estime que “c’est d’abord une question de justice sociale : il faut que les femmes soient formées aux bonnes compétences pour rester dans le marché du travail. C’est aussi un enjeu sociétal car on connaît désormais l’impact néfaste des technologies qui n’ont été conçues que par des hommes”.

Exemple avec les crash test qui utilisent des mannequins aux morphologies masculines pour tester les véhicules en cas de collision. Résultat : selon une étude menée par le Centre de biomécanique appliquée de l’Université de Virginie (États-Unis) en 2019, les femmes ont 73 % plus de risques d’être gravement blessées que les hommes lors d’un accident de voiture avec un choc frontal. Un danger qui aurait pu être évité si elles avaient été davantage incluses dans le processus de production.

Les formations, un chantier à long-terme

La prise en compte des profils féminins est l’une des raisons avancées dans le secteur du numérique pour développer l’offre de formations destinées aux femmes. Les sessions sont de plus en plus nombreuses et pourraient se multiplier si elles disposaient de moyens financiers plus importants.

La société Simplon encourage, depuis 2013, les femmes à se lancer dans ce domaine, qui s’étend de l’assistance informatique au développement web. En ce mois de mars 2023, six curieuses se retrouvent dans la salle Leïa du bureau nantais de l'organisme pour des portes-ouvertes “#WomenInTech”. Elles participent à un atelier d’initiation à la programmation et pour découvrir de nouvelles professions.

Parmi elles, Mélina Durieu, qui souhaite changer de métier. Après avoir travaillé comme coiffeuse, manutentionnaire, conductrice de poids lourds, la quadragénaire, craint que sa santé ne pâtisse de son actuel métier de peintre en bâtiments et cherche de meilleures conditions de travail pour tenir jusqu’à la retraite. “Ici, ils ont des formations parce qu’il y a les postes derrière et ça, c’est rassurant. On part pas dans un truc où il va falloir galérer”, espère-t-elle. Devant son ordinateur, les yeux plissés derrière ses lunettes dorées, elle s’applique à programmer la construction d’une maison inspirée du jeu vidéo Minecraft.

Après avoir assisté à une présentation par des professionnelles du numérique, la future stagiaire confirme son choix de devenir technicienne d’assistance en informatique : “Je me suis rendu compte que tout ce qui est développement, c’est trop lourd et trop long. Le but, c’est quand même de rebondir assez rapidement sur un poste.”

Une bonne stratégie si l’on en croit Aurélie Jouet, conseillère relations entreprises et référente numérique à Pôle emploi, car ce sont les profils de technicien (administration réseaux, support) qui sont aujourd’hui les plus recherchés par les employeurs. Ces formations courtes présentent un autre avantage : elles sont plus faciles à faire financer par la Région ou par le service public de l’emploi.

Les sessions plus qualifiantes, qui permettent aux stagiaires d’accéder à des fonctions valorisées et bien rémunérées, sont encore trop rares. “On a du mal à trouver les financements. On manque de visibilité, donc on avance au gré des enveloppes budgétaires”, déplore Amélie Picquenot, chargée de projet de formation Grand Ouest chez Simplon.

L’antenne rennaise, créée en 2021, propose une pré-formation de six semaines réservée aux femmes pour découvrir les métiers du numérique et construire leur projet professionnel. Elles en ressortent certifiées en réalisation d’application web. La deuxième session s’est déroulée en mars 2023. Alors que plus de quarante femmes avaient postulé, seule une quinzaine de chanceuses ont pu découvrir les différents métiers du secteur, par manque de places.

"Si on veut féminiser, il faut un message clair"

Quand le problème n’est pas lié à une absence de moyens, il peut venir d’un sous-effectif d’encadrants. Depuis quelques années, les cours du centre de formation PromoTrans d’Yffiniac s’enchaînent. Dans la salle “Hongrie”, où les tables sont disposées en U autour du bureau de Vanessa Guillaume, un groupe apprend à se servir d’un chronotachygraphe, la “boîte noire” des véhicules de transport. Trois portes plus loin, une autre promotion passe ses examens pratiques.

“En ce moment, on réalise environ six formations par an. Elles font le plein mais faute d’intervenants, nous laissons des gens sur le carreau”, déplore Vanessa Guillaume. Trois nouveaux instructeurs vont prochainement rejoindre l’équipe déjà constituée de quatorze personnes.

Dans le BTP, ce sont les infrastructures qui font parfois défaut. Alors que 63 % des projets de recrutement étaient estimés difficiles par les entreprises de travaux publics en Bretagne en 2022 – faute de main d’œuvre suffisante – un seul Centre de formation d’apprentis est ouvert dans la région, à Ploërmel (Morbihan).

Ce dernier pousse actuellement les murs pour accueillir tout le monde et projette d’agrandir sa structure : un bâtiment de 2 500 m² devrait sortir de terre pour la rentrée 2025. Le CFA de Ploërmel a investi trois millions d’euros pour accompagner l’augmentation de ses effectifs et l’ouverture d’une licence professionnelle dans le génie écologique. L’objectif : passer de trois-cents à quatre-cents élèves, en attirant quelques femmes au passage.

Mais, même lorsqu’elles parviennent à se former, la question de leur pérennité dans les métiers masculins se pose. Les sociologues appellent cela les "sorties de profession". Après trois ans comme conductrice de poids lourds, Mélina Durieu a dit stop : “Je ne suis pas restée parce que c’était trop stressant pour moi, je l’avoue. Avec la vie de famille c’est trop compliqué, surtout par rapport aux horaires.”

“Dans nos conventions collectives, on n’a pas de jours enfants malades, parce que c’est un travail typiquement masculin donc on considère que les gens ne vont pas rester chez eux quand leurs enfants sont malades, illustre Marc Renault, chargé emploi et formation à la CFDT Transports de Bretagne. Si on veut féminiser, il faut qu’on envoie un message clair, et qu’on puisse prendre quatre ou cinq jours, comme avec toutes les autres conventions.”

Pour lui, l’un des barrages à la mixité dans les transports vient du fait que le métier de routier est “violent physiquement et psychologiquement. Dans l’émission Les reines de la route [qui met en avant des femmes conductrices de poids lourds], on voit le problème des femmes pour aller aux toilettes ou se laver. Les douches, quand il y en a, ce n’est que pour les hommes. On n’est toujours pas à la hauteur avec l’hygiène pour les femmes, sur la route. Pour féminiser, ce serait déjà pas mal de remplir les besoins primaires.”

Après tout, n’est-ce pas le rôle des employeurs d’adapter leur activité aux femmes ? Dans certaines sociétés de transport, les missions des routiers sont organisées avant leur départ et non plus au fur et à mesure de leur trajet, pour concilier plus facilement vie professionnelle et personnelle. Plus récemment, une autre initiative a été lancée. Immo Ouest, une entreprise de transports de la Somme, teste depuis février 2023 le prototype d’un poids lourd équipé de sanitaires pour celles qui ne peuvent pas s’arrêter en route. Une première dans le milieu.

Ces problèmes ne sont pas spécifiques au transport. Visite à Maurepas, quartier de Rennes, sur le chantier du futur espace social, où le code du Travail  impose, comme partout, des sanitaires séparés pour les hommes et les femmes. Pourtant, les ouvriers les utilisent indifféremment. Au premier étage, Tatiana Quéré s’applique à installer des prises électriques. “Dans l’idée, ça ne me dérange pas de partager les toilettes avec mes collègues, mais il y en a qui sont dégueulasses !”, reconnaît l’apprentie électricienne. À côté d’elle, le conducteur de travaux s’exclame : “Je pense que les entreprises font des efforts pour féminiser maintenant !” Vraiment ?

Femmes à l'affiche : publicité trompeuse

Dans le hall du Centre de formation d’apprentis (CFA) de Saint-Grégoire, à Rennes, à l’occasion des portes ouvertes, le mur d’escalade a été recouvert de posters affichant une femme et deux jeunes hommes souriants : “Apprentis du BTP et fiers de l’être !”

Frédéric Delahaye, directeur-adjoint du CFA, présente la communication comme la mesure principale, voire unique, pour favoriser l’inclusion des femmes dans le bâtiment : “On montre qu’il y a des femmes, on les met sur les plaquettes pour les mettre en avant !”

Pourtant, “cela ne suffit pas de dire que les femmes sont acceptées et bien accueillies, il faut aussi que les formateurs travaillent avec les entreprises”, relativise Camille Durant, chargée de la formation et de l’emploi à la Fédération régionale des travaux publics (FRTP).

Tristan Arnaud, le directeur du CFA Travaux publics de Ploërmel, dans le Morbihan, se satisfait de la progression de la mixité dans son établissement : “Ça se féminise beaucoup, on bat des records chaque année ! On a commencé très bas, avec une fille il y a dix ans, et maintenant on est à sept.” Sept femmes sur trois-cents apprentis !

“Les métiers du bâtiment ont évolué, maintenant tout est réglementé pour accueillir des femmes qui ne correspondent pas à l’image du gars”, tente de convaincre Marc Bougeard, le directeur du CFA de Saint-Grégoire. Pourtant, parmi ses neuf-cents apprenants, seulement 5 à 8 % sont des femmes.

Perchée en haut de l’escalier en métal qui surplombe la pièce, sa collègue, Ophélie Peyé, attend patiemment que de futurs élèves viennent visiter l’atelier de peinture. La formatrice, ancienne peintre en bâtiment, est parfois obligée de défendre les quelques jeunes filles de sa classe face aux garçons “un peu bébêtes”. “Quand il faut ranger, je leur dis : ‘C’est pas parce qu’il y a deux filles qu’elles vont faire le ménage !’”

Pour elle, le plus important est de rester “bienveillant avec les jeunes”, peu importe leur genre. Aujourd’hui, Ophélie Peyé est la seule femme professeure du centre. Pour ses collègues, avoir une formatrice dans leur équipe est un atout : sa présence féminine permettrait “d’apaiser les élèves” grâce à son côté maternant.

Plus soigneuses, les femmes ?

Dans la salle de cours de PromoTrans, parmi les stagiaires attendant calmement de passer leur examen pratique de mise à quai de poids lourds, Enora Thouëment, emmitouflée dans une grosse écharpe, reprend mot pour mot le discours de ses formatrices : “Les entreprises disent que les femmes sont plus soigneuses, plus appliquées, qu’il y a moins de casse sur les camions qu’avec les hommes.” Une façon de prouver, comme par nécessité, qu’elles sont tout aussi légitimes dans ce métier, voire plus, que leurs camarades masculins.

En tant que peintre en bâtiment, Mélina Durieu a fait face à ces réflexions valorisant des compétences considérées comme féminines : “J’ai des fois entendu dire ‘vous êtes des femmes donc vous êtes plus minutieuses’. Mais non, j’ai des collègues masculins qui sont beaucoup plus perfectionnistes que moi !”

Complimenter les professionnelles sur des capacités spécifiques part souvent d’un bon sentiment mais, comme le relève la sociologue Haude Rivoal, cela ne leur rend finalement pas service : “Des chercheurs en sciences de gestion montrent que mettre des femmes dans les comités de direction permet d’avoir une autre approche du management et de l’organisation du travail. Ces études veulent bien faire en montrant les apports non négligeables des femmes, mais l’inconvénient c’est que ça les essentialise. On leur prête des qualités dites féminines qui font que, quelque part, elles ne pourront jamais atteindre l’égalité, car elles seront toujours renvoyées à leur statut de femme.”

L’inverse est également vrai. François Diquelou est auxiliaire de vie dans l’entreprise associative Assia depuis dix-sept ans. Il est, lui aussi, confronté à cette logique. Le professionnel, qui affiche en toutes circonstances une bonne humeur communicative, fait partie des 5 % d’hommes de ce métier et s’attache à prouver qu’il est tout à fait capable de l’exercer.

Armé d’un plumeau bleu et d’un aspirateur, il dispose d’une heure pour nettoyer l’appartement de Simone, la première patiente de sa tournée du matin. Habillé dans un style sportif confortable, François Diquelou travaille en sifflotant. Des tables de chevet de la chambre aux contours des portes, des recoins de la salle de bain à ceux de la cuisine, pas une poussière ne lui échappe. La propriétaire, installée dans son fauteuil pivotant rouge, le journal sur les genoux, confie : “Je ne suis pas contrariante tant que le travail est fait. Et avec François, c’est le cas.”

Pourtant, les rares profils masculins qui exercent dans le secteur sont souvent orientés vers l’accompagnement des grands handicaps, réputé comme plus physique et donc comme correspondant aux qualités des hommes. Mais le quinquagénaire se sert de sa casquette de formateur pour prouver à ses collègues que les actes de manutention se basent avant tout sur des méthodes : “Elles me disent que je suis costaud, donc que c’est normal que j’y arrive. Mais je leur montre que non, qu’à 80 %, c’est de la technique.”

Lui-même avait d’abord commencé à travailler auprès de personnes handicapées avant de se consacrer à l’entretien des logements, non sans quelques réticences des patients. Pendant le traditionnel café de 10 h 45, François Diquelou discute avec Colette, son deuxième rendez-vous de la journée. Entre deux gorgées, la propriétaire de quatre-vingts ans se remémore sa rencontre avec l’aide à domicile. “J’étais sceptique sur sa capacité à remplir son rôle, avoue-t-elle. J’avais des a priori, je pensais qu’il n’y avait que mon mari qui était capable de faire le ménage !”

Comme pour se justifier, elle ajoute faire partie de la “vieille France”. Mais ces stéréotypes sont toujours d’actualité et contribuent à enfermer les femmes dans certains métiers. “Quand on regarde leur répartition, elles sont principalement concentrées dans le secteur du soin et des services”, rappelle la sociologue Haude Rivoal.

Les dégâts du "sweat à capuche"

Ces secteurs sur-féminisés souffrent d’un manque considérable de reconnaissance, symbolique et financière, qui affecte directement leur capacité à recruter. Ludovic Chiron, directeur adjoint de l’Union régionale de l’aide et des soins à domicile (Una Bretagne), une structure qui unit les entreprises de l’aide et des soins à domicile, affirme que, pour espérer répondre aux besoins de recrutement, il est nécessaire de travailler sur l’attractivité de la profession d’aide à domicile : “Pour nous, la mixité n’est pas l’enjeu prioritaire. Si on ne s’intéresse pas d’abord à la valorisation du métier, on risque de taper dans le vide en se focalisant uniquement sur le genre des personnes.”

De nombreuses campagnes de communication qui présentent le métier comme plein d’avenir et d’intérêt tentent d’attirer les candidats. Mais pour lui, ces messages manquent leur cible. “C’est un discours qui peut donner des résultats si les demandeurs d’emploi y sont réceptifs. Mais, eux, ce qu’ils veulent, c’est un salaire et des horaires attractifs, ce qui n’est pas évident, vu les contraintes de financement des structures.” Le directeur adjoint met également en garde contre un possible effet pervers de la communication : à trop en faire, cela pourrait rebuter les travailleurs qui comprendraient que, au vu des besoins exprimés, “les difficultés rencontrées par ce corps de métier doivent être importantes”.

Ce travail sur l’image à destination du grand public, le numérique doit aussi s’y atteler. Cela passe par gommer la caricature de l’informaticien, perçu comme le “garçon qui programme dans sa cave”, selon Peggy Vicomte, la déléguée générale de l’association Femmes@Numérique. Pendant la conférence de presse du forum des métiers Hack&Job organisé à l’occasion de la compétition de cybersécurité Breizh CTF à Rennes, Vincent Strubel, directeur général de l’Autorité nationale en matière de sécurité et de défense des systèmes d’information (Anssi), insiste sur les “dégâts de l’image de la personne en sweat à capuche qui fait de la cybersécurité”, soupçonnée de décourager les filles de s’orienter vers ces métiers.

Parmi les six-cents hackeurs réunis dans l’enceinte en pierre du couvent des Jacobins à Rennes, une quarantaine de femmes s’apprêtent à participer au challenge breton de “Capture the flag”. L’objectif est de compléter le plus de défis de sécurité informatique possible entre 21 h et 9 h, le lendemain. Les rangées d’ordinateurs, les emballages de biscuits éventrés et les canettes de boissons énergisantes qui jonchent les centaines de tables alignées résument bien la nuit que s’apprêtent à passer les passionnés d’informatique. Les effluves de bière se mêlent à ceux du café frais à mesure que les clics des souris s’accélèrent.

Dans l’assemblée, une équipe sort du lot : la team 100 % féminine de l’entreprise Orange, dont fait partie l’ingénieure en cybersécurité Marion Pocher. “On a déjà concouru plusieurs fois et on s’est rendu compte qu’il n’y avait pas beaucoup de femmes”, raconte-t-elle. “À l’accueil, on nous a même demandé si on était des participantes !” s’offusque Lucile Lévêque, également membre de l’équipe.

Selon Mathilde Saliou, journaliste tech’, le monde du numérique est encore réticent à la féminisation : “Par exemple, dès que je parle de quotas dans mon média Next INpact, qui est lu par un lectorat très technique, dans les commentaires, les gens s’énervent sur le principe. Beaucoup sont contre.”

Des lois existent pourtant pour forcer la féminisation. Celle du 24 décembre 2021 vise à accélérer l'égalité économique et professionnelle en imposant des pourcentages de femmes. À partir de mars 2026, les entreprises de plus de mille salariés devront atteindre un objectif d’au moins 30 % de femmes parmi les cadres dirigeants et membres d’instances dirigeantes.

“Quand elles ne respectent pas les obligations légales, les entreprises sont soumises à une amende, qui n’est pas dissuasive, souligne Haude Rivoal. Elles préfèrent payer plutôt que de repenser un système qui fait du profit.” Cette amende peut représenter jusqu’à 1 % de l’ensemble des rémunérations brutes des salariés de l’entreprise.

“Il faudrait aussi imaginer des quotas dans les directions des services informatiques et pas seulement dans les instances dirigeantes”, ajoute Peggy Vicomte, de l’association Femmes@Numérique. Mais selon elle, ce fonctionnement ne permettra pas de féminiser le domaine du numérique s’il n’est pas accompagné d’actions : “Ça fait avancer les nombres mais ça ne fait pas changer les mentalités et les comportements.”

Du caractère et des sacrifices pour réussir

La salariée de PromoTrans, Vanessa Guillaume, mise, elle, sur son rôle de formatrice poids lourds pour faire évoluer les représentations. En faisant cliqueter ses ongles manucurés sur son bureau, elle se remémore : “Quand j’ai commencé, j’étais toute seule, il n’y avait pas de femmes. Et maintenant je forme des hommes ; c’est un grand pas. J’ai voulu faire ce travail pour montrer ma passion. J’ai beaucoup de caractère donc ça fonctionne très bien.”

Jean-Raynald Barbier, le directeur de PromoTrans, est conscient de l’exemple donné par son employée : “Avoir une formatrice montre aussi que le métier peut être ouvert. Nous, on est une entreprise de formation, on est une vitrine. Ceux qui entrent chez nous seront logisticiens ou transporteurs, c’est important.”

Parfois, son instructrice rencontre des résistances : “La dernière fois, j’ai eu un stagiaire qui n’acceptait pas de se faire former par une femme. La direction lui a demandé de partir. Mais sinon, il faut accepter la plaisanterie et comprendre les hommes.”

À grand renfort de gestes qui font tinter ses bijoux dorés, Vanessa Guillaume, vêtue d’un pull en laine et d’un pantalon foncé, confie que, pour mieux se faire accepter au travail, elle a renoncé à une partie de sa garde-robe : “Je ne vais pas mettre des jupes et des talons en classe, et je dis aux femmes en formation de faire pareil. Il faut rester féminines, mais sans provoquer les hommes.”

En sortant un gilet jaune de son sac à main pour son examen de conduite, la stagiaire Enora Thouëment acquiesce : “On ne veut pas que les filles soient des bonhommes comme il y a quelques années, mais il y a une tenue pour tout. On n’est pas des poupées Barbie qui se cassent des ongles comme dans l’émission de téléréalité Les Reines de la route .”

Au-delà des représentations médiatiques et collectives parfois caricaturales des femmes dans les milieux d’hommes, la présence de formatrices offre une image plus réaliste des métiers. Avec optimisme, la chercheuse Haude Rivoal souligne “l’efficacité des réseaux de femmes et de mentorat [d’accompagnement individuel par des femmes qui sont déjà en poste] dans les secteurs qui sont très masculins, où on a besoin de femmes qui donnent l’exemple”.

Selon la sociologue, les pratiques de mentorat permettent aux nouvelles arrivantes de se créer un système d’entraide. Il s’agit notamment de modérer l’impact négatif des boys’ clubs, ces réseaux de cooptation informels fondés sur la solidarité masculine et l’exclusion des femmes.

Dans La Fabrique des masculinités au travail, Haude Rivoal montre que les entreprises “fonctionnent sur des valeurs viriles, la compétition, la performance, la productivité”. Carine Ollivier, maîtresse de conférences à l’université de Rennes 2 et spécialiste de la sociologie du travail et des organisations, interroge ainsi la manière dont les salariées peuvent s’intégrer au sein de ces entreprises : “Est-ce que les organisations se féminisent ou est-ce que les femmes doivent développer des qualités masculines, voire viriles, pour réussir dans ces secteurs, par exemple en termes de gestion de leur vie professionnelle et familiale ?”

Pour que les femmes puissent accéder à tous les métiers, le combat se joue dès le plus jeune âge. La Fédération régionale des travaux publics (FRTP) l’a compris et s’est saisie de cet enjeu. Tout au long de l’année scolaire, Camille Durant, chargée d’emploi et de formation à la FRTP, intervient dans des établissements du secondaire pour présenter la profession : “J’aborde la question de la féminisation et de la mixité. Le but étant que, dès leur construction et leur apprentissage, et avant leur entrée sur le marché du travail, les élèves intègrent le fait que le métier est ouvert aux femmes.”

Avec près de quatre-vingts ateliers réalisés entre 2022 et 2023, la chargée de formation croit à l’impact de ce dispositif sur les jeunes, même s’il n’est pas quantifiable pour le moment : “C’est à long terme que nous constaterons son efficacité.”

En infériorité numérique dès l'école

Lors du forum Hack&Job organisé au couvent des Jacobins à Rennes, une classe de première en spécialité Numérique et sciences informatique (NSI) est venue découvrir les métiers de la cybersécurité. Pendant l’atelier d’initiation au chiffrage de données prévu pour les lycéens, le visage caché derrière ses cheveux blonds, Marie écoute la présentation du mathématicien cryptologue Mathieu Cima.

Son professeur, Benoît Fouré, expose avec entrain l’intérêt de la jeune élève pour le monde de la cyber : “Elle a même participé à un stage Girls can code à Epita”, l’École pour l'informatique et les techniques avancées. Dans sa classe, seulement quatre filles pour quinze garçons. En terminale, c’est pire, avec deux filles sur vingt-et-un élèves.

“J’aimerais travailler dans la cybersécurité, donc après le lycée je vais faire une école d’ingénieurs !” lance Marie dans un sourire timide. Elle reste motivée, mais ce n’est pas le cas de toutes les collégiennes et lycéennes. Selon l’ Observatoire des femmes ingénieures, le nombre d’étudiantes dans les écoles n’augmente plus depuis environ dix ans et stagne autour des 29 %.

Depuis la réforme du lycée général de 2019, dite réforme Blanquer, les élèves abandonnent les matières scientifiques, et en particulier les filles. Selon une enquête du collectif Maths&Sciences parue en 2022, le nombre de filles à profil scientifique suivant six heures de mathématiques ou plus par semaine a baissé de 61 % entre 2019 et 2021, contre 37 % pour les garçons.

Pour la journaliste Mathilde Saliou de Next INpact , les réformes qui éloignent les jeunes filles des maths et des sciences créent un “cercle vicieux”. Selon elle, “les filles ne font plus d’études scientifiques donc les entreprises se demandent comment les embaucher à l’étape professionnelle.”

“Mes profs m’avaient découragée d’aller vers l’informatique à cause de mes notes en maths”, se souvient l’ingénieure dans la cybersécurité chez Orange, Marion Pocher. En écartant ses mèches rose vif de ses yeux, la jeune femme poursuit, une note de défi dans la voix : “Pourtant, j’avais la logique qu’il faut. C’était difficile, parce qu’en plus de l’idée que c’est un métier d’homme, un métier de geek, il y avait ce frein scolaire.”

Au-delà de la réforme Blanquer, Marion Pocher déplore également une “absence de contact avec l’informatique dans le secondaire”, renforcée par la disparition imminente des cours de technologie au collège. “Cela pose la question de la responsabilité de l’État”, ajoute-t-elle.

Les réformes et les lois ont un impact direct sur les formations vers lesquelles se dirigent les jeunes filles et les spécialités qu’elles choisissent, comme le confirme Peggy Vicomte avec insistance. Son association, Femmes@Numérique, a organisé les premières assises de la féminisation des métiers et filières du numérique pour “rétablir l’égalité”.

La mixité, c'est du boulot

La déléguée générale estime que le sujet est traité depuis dix à quinze ans par les associations mais que les améliorations se font encore attendre. Pour accélérer ce changement, Femmes@Numérique a soumis un plaidoyer de quatorze propositions au ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, Jean-Noël Barrot.

Parmi les propositions concrètes, Peggy Vicomte insiste sur l’importance “d’évaluer l’impact des actions via la mise en place d’un observatoire qui serait complètement transparent et indépendant sur les données chiffrées”.

L’un de leurs projets phares, “10 000 étudiantes dans la tech’”, a pour objectif “de détecter des jeunes filles qui ont des compétences ou des appétences pour les métiers du numérique, puis de leur proposer un accompagnement avec une aide financière, du mentorat, une insertion professionnelle, etc.”. Il a largement été repris dans le plan interministériel pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2023-2027 annoncé le 8 mars 2023 par la Première ministre, Elisabeth Borne.

Le quatrième axe du plan, consacré à la “culture de l’égalité”, annonce de mystérieux “objectifs cibles de mixité dans les enseignements de spécialités maths et physique-chimie en première ainsi que dans l'option mathématiques expertes en terminale” permettant d’agir pour favoriser une orientation égalitaire dans cette filière d’avenir.

Ces buts flous, qui ne sont pas plus détaillés au sein du plan, pourraient servir à compenser les effets en train de s’opérer à cause de la loi Blanquer, comme le départ massif des filles des matières scientifiques.

“Ces dernières années, les métiers qualifiés, scientifiques et de l’ingénierie, s’ouvrent quand même de plus en plus aux femmes, parce qu’on a beaucoup travaillé sur l’orientation”, rassure la chercheuse en sociologie rennaise Carine Ollivier. Selon l’Observatoire des femmes ingénieures, le nombre de diplômées d’écoles d’ingénieurs serait passé de 10 % à 28 % depuis les années 1970.

“Je suis rentrée en 2002 dans l’entreprise, on était 15 % de femmes. J’en suis partie en 2007 et il y en avait 25 %. Vous avez vu l’évolution en quelques années!”, s’enthousiasme Mélina Durieu, convaincue par les progrès effectués dans son entreprise de transport où elle travaillait comme conductrice. “Ça change encore. On voit plein de petites nanas au volant de gros camions.”

L’impression d’une parité en progression constante reste très partagée mais pas question qu'elle enraye “les dynamiques politiques et sociétales” à l’œuvre dans les entreprises qui, selon Hélène Chinal, chargée de transformation au sein de la société Capgemini, “ne doivent jamais s’arrêter”.

Dans la salle de cours des futurs conducteurs de poids lourds de PromoTrans, Vanessa Guillaume interroge ses étudiants : “Et vous, ça vous dérange d’avoir des femmes dans votre équipe ?” Quelques remarques grivoises fusent, puis une réponse, sur un ton très sérieux : “Une ou deux, mais pas plus !”

Manon Fontaine, Léna Guihéneuf, Bluenn Rioual

Nos sources

L’ensemble des témoignages, informations et propos présentés dans cette enquête ont été recueillis entre novembre 2023 et avril 2023. Nous avons effectué un travail de documentation en nous plongeant dans la documentation en ligne mise à disposition par la Dares, Pôle emploi et l’Insee notamment.

Nous avons d’abord mené des entretiens par téléphone ou en présentiel avec une dimension exploratoire comme avec Hélène Chinal et Ludovic Chiron, pour approcher la réalité de la mixité dans les secteurs du numérique et de l’aide à domicile. Nous avons contacté des sociologues du genre et du travail. Nous avons rencontré Haude Rivoal dans son bureau, à Nantes, et Carine Ollivier à l'université de Rennes 2.

Surtout, nous avons tenu à suivre dans leur journée de travail des femmes et un homme qui évoluent dans des professions non mixtes. François Diquelou, aide à domicile, nous a embarqué dans sa tournée, et nous avons retrouvé Tatiana Quéré sur son lieu de travail, un chantier rennais. Après une interview par téléphone, Vanessa Guillaume nous a accueillies dans son centre de formation de routiers à Yffiniac.

Les chargés emploi et formation Camille Durant et Marc Renault ont confirmé ou non nos hypothèses dans le BTP et les transports, au même titre que des expertes du numérique comme Peggy Vicomte, Emmanuelle Larroque et Mathilde Saliou. Nous avons échangé avec ces spécialistes par téléphone, et avons contacté d’autres professionnels, comme Tristan Arnaud et deux employées de Pôle Emploi, pour compléter les informations récoltées.

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