Un coup d’œil sur la carte de l’observatoire des poissons migrateurs en Bretagne suffit pour comprendre la situation. Sur l’Elorn, le Scorff ou l’Aulne, le nombre de saumons est en baisse, les effectifs sont considérés comme mauvais, voire très mauvais. La Fédération du Morbihan pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique alertait depuis longtemps et demandait que les quotas soient revus à la baisse. L’État a tranché et a décidé de fermer complètement la pêche au saumon en 2025.
"Cette année, les chiffres sont vraiment, vraiment très mauvais," constate la Fédération pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique du Morbihan. Sur les trois stations de contrôle de Bretagne, 643 saumons ont été observés en 2023, contre 813 l’année précédente, 1 073 en 2022 et 2 098 en 2020.
Des saumons quatre fois moins nombreux
"Nous constatons que les individus qui remontent sont moins nombreux, moins gros et pondent donc moins d’œufs" indique la Fédération dans un communiqué. "Le nombre d’œufs dépend du poids du saumon, c’est un cercle vicieux, plus l’espèce va mal, moins elle se reproduit ", explique François Jossec, technicien de la Fédération de pêche du Morbihan.
Les saumons seraient notamment victimes du déplacement de certains courants maritimes. Ils ne trouvent plus les crevettes et autres ressources qui constituaient une part importante de leur alimentation. Ils sont obligés de rester plus longtemps en mer pour atteindre une taille qui leur permet de remonter les rivières et sont donc de moins en moins nombreux à y parvenir.
"En moyenne, les saumons sont quatre fois moins nombreux qu’avant à remonter dans les rivières par rapport à la moyenne des remontées sur les trente dernières années et ce phénomène s’est accentué sur les 3 dernières années avec des résultats catastrophiques."
La pêche fermée en 2025
Lors d’une réunion avec la Dreal, la fédération a présenté ses données. Elle souhaitait que les quotas alloués par pêcheur et par rivière soient abaissés, "qu'il y ait une baisse de tous les quotas possibles". L’État a choisi la manière forte et décidé de fermer la pêche pour 2025.
"Dans le Morbihan, la pêche était pourtant plutôt bien gérée, rappelle la Fédération, les quotas n’étaient jamais atteints… Les pêcheurs ne sont pas responsables du déclin de l’espèce. "
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Que se passe-t-il en mer ?
Avant cette interdiction brutale, les pêcheurs auraient souhaité avoir des réponses à leurs interrogations sur la vie des saumons en mer.
Que deviennent-ils quand ils passent l’estuaire ? Quelles sont les conditions de pêche au large ? Les pêcheurs s’étonnent de l’usage de filets, par exemple, dont la sélectivité n’est pas satisfaite au regard des exigences pour le saumon.
La Fédération de pêche demande donc que des études soient menées.
Quelles conditions pour la réouverture ?
"Avant toute mesure de fermeture, il convient de définir en amont les conditions d’une éventuelle réouverture, s’étonne aussi la fédération. Même si les chiffres n’incitent guère à l’optimisme pour les années à venir, il faut avoir une idée des effectifs nécessaires à la réouverture.
La Fédération rappelle aussi que "la présence des pêcheurs de loisir au bord des rivières est le premier levier d’action contre le braconnage et condamne toute atteinte à ce rôle essentiel de sentinelle."
L’État doit présenter cette mesure au prochain COmité de GEstion des POissons MIgrateurs (COGEPOMI) de novembre pour validation définitive et application.