Tout au long de leur course, les navigateurs du Vendée Globe prennent leurs décisions en solitaire, sans routage extérieur ni aide psychologique. En cas d'incident technique ou d'avarie, ils ont le droit de contacter leur équipe technique restée à terre, qui veille sur eux en permanence.
Ils vivent le Vendée Globe depuis la terre, les yeux rivés sur la cartographie, l'esprit en alerte. Le cœur suspendu aux réussites et infortunes potentielles de leur skipper.
Les techniciens qui accompagnent les projets Vendée Globe sont sur le pont depuis plusieurs années, Leur mission : préparer le bateau le plus performant et le plus fiable possible. Pendant la course, ils restent aux aguets, le téléphone allumé jour et nuit, prêts à répondre à toute sollicitation technique de leur marin solitaire.
Ronan Deshayes et Lucas Montagne accompagnent Thomas Ruyant dans sa quête de performance. L'un est Boat captain du projet, c'est le responsable technique du bateau en quelque sorte. Lucas est expert en électricité. Ils se connaissent bien pour avoir participé tous les trois à la mini 6.50 il y a une quinzaine d'années. Ils travaillent ensemble depuis longtemps. Du premier au dernier jour de course, Ronan et Lucas sont d'astreinte, 24h/24, prêts à proposer des solutions en cas d'incident technique.
Une astreinte 24h/24
"Quand le téléphone sonne - et il a une sonnerie bien particulière quand c'est le bord qui appelle - c'est toujours un vrai pic de stress. Je croise les doigts, pour l'instant on a un Vendée Globe qui se passe mieux que ce que l'on espérait, on a peu d'incidents," confie Ronan Deshayes.
Thomas décrit les symptômes, son équipe définit la solution technique la mieux adaptée. Le skipper dispose à bord de tout le matériel nécessaire pour parer à toute éventualité. L’idée c'est de remettre le bateau en état le plus vite possible pour que "le potentiel de performance soit maintenu le plus longtemps possible, jusqu'à l'arrrivée..." C'est le marin qui décide du moment le plus pertinent pour réparer. En fonction des conditions, de la stratégie de la course.
"C'est un lien hyper important, d'avoir les mêmes personnes. Si j'ai un problème technique, quel qu'il soit, je peux m'appuyer sur eux", confie Thomas Ruyant, depuis son voilier "bien évidemment, je me débrouille sur le bateau pour effectuer les réparations."
Maintenir le potentiel du bateau jusqu'à l'arrivée, c'est ce qui a permis de gagner dans l'histoire du Vendée Globe.
Ronan DeshayesBoat captain de Thomas Ruyant
Informatique, mécanique, énergie, électronique... Huit experts sont prêts à apporter leurs conseils, au cas où. "Ce qui est primordial, c'est d'avoir une connaissance de l'état du bateau en permanence, de savoir dans quelles conditions [Thomas] évolue, s'il fait jour ou nuit, il faut percevoir s'il est en forme ou fatigué. Parce que tout ça conditionne beaucoup les solutions qu'on peut lui apporter," résume Lucas Montagne.
Un soutien rassurant pour les skippers
À l’approche du cap de Bonne-Espérance, Éric Bellion a connu des problèmes de safran occasionnant une sortie de route. Il a aussitôt alerté son responsable technique, Bertrand Delesne, qui assurait la veille. Avec Jérémy Le Floch, ils se relaient à deux toutes les 48 heures. "Je viens de repartir en vrac, le safran s'est relevé », lit le technicien sur son portable. "Pour moi, c'était l'alerte de trop," glisse-t-il.
Réparer avant de gagner les mers du sud était un impératif. Après consultation de plusieurs experts de l’équipe, Bertrand Delesne a guidé le skipper pour résoudre les problèmes au mieux, dans des conditions difficiles.
Il peut ne pas se passer grand chose pendant plusieurs heures, mais ça peut être très intense lorsqu'il se passe quelque chose. Et il faut être là.
Bertrand DelesneRéférent technique d'Éric Bellion
"C'est une aventure où on est tout seul, avec un bateau très technique, dans un environnement très hostile", rapporte Éric Bellion, sur son bateau. "Ce soutien, il me fait chaud au cœur parce que ça fait un contact humain et c'est rassurant de savoir que quelqu'un est à notre écoute et qu'on n'est pas tout seul."
Il confie savoir à peu près tout faire à bord. Mais sur ces bateaux de plus en plus sophistiqués, impossible d'être un expert dans tous les domaines. "Cette aide, elle est déterminante, elle nous permet de régler des problèmes avec des compétences que l'on n'a pas forcément" explique le navigateur, "tout seul, je n'aurais pas trouvé la solution aussi vite ou différemment".
Les marins du Vendée Globe ont encore une longue route pour rejoindre les Sables-d’Olonnes (Vendée). Ils savent que dans leur échappée solitaire, leur équipe garde toujours un œil sur eux, une oreille attentive depuis la terre.