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L'article 1 sur la PMA (procréation médicalement assistée) pour toutes les femmes vient d'être adopté en première lecture par l'Assemblée nationale. Pour Typhanie et Anne-Claire, cette loi arrive trop tardivement.
"On est très contentes" sourient Typhanie et Anne-Claire. "Mais cette loi elle passera trop tard pour nous. Ce sera pour les futures générations." Le 27 septembre dernier, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture l'article 1 relatif à la PMA, pour toutes les femmes. Anne-Claire souligne : "c'est presque passé dans l'indifférence générale. Pour l'instant on n'entend pas trop les intégristes et c'est reposant. J'ai très mal vécu la période des manifestations contre le mariage pour tous."
Pour les deux femmes, en couple depuis cinq ans, cette avancée sur la PMA aurait déjà dû avoir lieu sous le mandat de François Hollande. Leur désir d'enfant pourrait se concrétiser en Espagne, là où elles ont déjà entamé des démarches. "Même si la loi arrive, vu l'âge qu'on a, on ne pourra pas y prétendre. Cela va prendre du temps à se mettre en place. Comment les priorités seront-elles fixées ? Tout ça reste flou. Notre horloge biologique à nous aussi tourne."
La PMA, de l'argent et de la disponibilité
"Le premier obstacle, c'est de trouver un gynécologue en France, qui accepte de suivre la grossesse et qui puisse nous prescrire les examens nécessaires." Pour le couple, c'est le bouche à oreille qui permettra de trouver le bon praticien.
"Après, il faut faire le choix de la clinique, et du pays. En Belgique, il y a plus d'attente. C'est moins cher mais par contre on demande des tests psychologiques. Et pour moi c'était hors de question." lance Anne-Claire. "Aux hétéros, on ne pose aucune question quand ils font des enfants."
"L'Espagne s'est alors imposée. On sent tout de suite le business autour de la PMA, avec les brochures où tout est beau, tout est la vie. Le premier contact s'est fait par mail. On nous a rappelé en français. Un mois et demi après, nous avions un rendez-vous. Avant de venir, on nous a demandé une liste d'examens." Une fois arrivées à la clinique, elles constatent : "c'est rempli de Français, homos, hétéros, parce que la procréation assistée c'est trop long chez nous."
Ce premier contact aura duré 1 h 30, le temps d'un échange, d'une "insémination à blanc" pour voir les réactions physiologiques. "Ils proposent des examens qui ne se font pas en France comme le caryotype, pour vérifier les incompatibilités génétiques avec le donneur." "C'est aussi beaucoup de paperasse" relève Typhanie : "on a signé des contrats de consentement, sur l'anonymat du donneur."
Coût de ce premier "voyage" : près de 800 euros, avec l'avion, l'hébergement, la consultation. L'insémination elle-même coûtera 750 euros, auxquels il faudra ajouter 330 euros pour le don de sperme. "Il faut de l'argent et de la disponibilité." résument-elles. Une fois de retour en France, il faut refaire des examens, entamer un traitement hormonal si nécessaire et sauter dans l'avion pour tenter un essai.
La question du père émise par les critiques n'en est pas une pour elles : "notre enfant aura des tas de modèles masculins." La filiation ne rime pas avec biologie mais par la transmission de l'héritage familiale, des deux côtés.Ce qui est bien avec cette nouvelle loi, c'est que notre enfant aura deux mères, inscrites dans le livret de famille.
Voient-elles d'autres alternatives à la PMA ? "On nous a évidemment fait des réflexions en nous disant d'utiliser "la méthode artisanale' sauf que pour nous ça n'a aucun sens, aucun cadre légal." L'adoption ? "On n'y croit pas du tout, on arrivera en bas de la liste."
Le coût de la PMA, en Espagne, pourrait leur coûter au sens littéral du terme. "Les finances pourront nous empêcher un jour, si ça dure trop longtemps, d'avoir un enfant." "Je le vis comme une injustice, quand je vois à quel point cela peut être simple pour d'autres" conclut Anne-Claire.