A la tête d'une liste EELV-LFI-Génération.s, Charles Fournier souhaite faire du Centre-Val de Loire un modèle de transition écologique. Avec, en ligne de mire, l'impulsion d'un changement culturel en faveur de l'environnement et la création d'un tissu économique relocalisé.
Les écologistes peuvent-ils prendre la tête des forces de gauche, en vue de la conquête de la présidence de la région ? C'est bien le souhait de Charles Fournier, tête de liste Europe Ecologie-Les Verts/La France insoumise/Génération.s, lors du premier tour des élections régionales prévu le 20 juin. Son objectif : faire mieux que le président PS sortant François Bonneau, et imposer l'écologie comme valeur directrice de la politique régionale.
Un engagement de longue date. Romorantinais de naissance, c'est à Tours que Charles Fournier entame sa carrière politique, en menant une liste écologique à la mairie en 2001. Et s'il ne rencontre pas le même succès qu'Emmanuel Denis 18 ans plus tard, cette élection le fait connaître, et lui permet d'intégrer la liste écolo pour les régionales en 2010 et d'être élu conseiller. Réélu en 2015, il a déjà passé 11 ans au conseil régional : cinq en tant que vice-président du groupe écologiste, et six de plus à la vice-présidence régionale, avec le portefeuille de la transition écologique.
Des leviers pour peser sur la transition écologique
Mais, même avec ce portefeuille, le candidat EELV estime ne pas avoir pu faire autant que ce qu'il voulait. Et c'est logique : "On a soutenu le contrat de majorité" au deuxième tour pour garder la région à gauche en 2015 et contrer le Front national. Un projet qui n'était pas vraiment le sien. Il remarque d'ailleurs qu'"on ne nous donne jamais l'économie, la culture ou l'agriculture".
Alors, pour les Verts, plus question que l'écologie soit la cerise sur le gâteau des politiques régionales. Désormais, elle sera aussi la farine et les œufs. Pour Charles Fournier, "la région possède des leviers pour peser" en matière d'environnement :
La région est chargée de distribuer des fonds venus de l'Europe [fonds de développement régional, fonds agricole pour le développement rural... ndlr]. La région est l'endroit où se concrétise ce qui est décidé à l'échelle européenne, en liaison avec les citoyens. Elle peut jouer un effet d'entraînement dans les changements culturels.
Rediriger 10 millions d'euros d'aides vers l'écologie
Son projet réside en premier lieu dans un verdissement de l'économie du Centre-Val de Loire, dans un but environnemental, mais aussi de relance et de résilience. Exemple :
En région Centre, on est obligés d’importer du lait parce qu'on a pas assez d’élevages, mais on exporte en masse nos céréales. On produit du bois ici et on l’envoyer en Chine, où il sera transformé en meuble, pour revenir et être vendu ici. Et ça coute moins cher que le circuit court. Il faut faire du circuit court partout où on peut le faire.
"Pour engager l'agriculture biologique et locale, il faut commencer par ne servir que ça dans nos lycées", qui relèvent de la région. Autre compétence de la région : les aides aux entreprises, pour les accompagner dans la "réorientation de leurs activités". Le groupe écologiste au conseil régional estime ainsi que 10 à 15 millions d'aides distribuées par la majorité chaque année restent sans "aucun effet bénéfique social ou environnemental", car versées "sans exigence" de transition écologique notamment. "On s'est retrouvés à financer une entreprise qui fabrique des toits de piscine dorés pour les Emirats arabes unis", se souvient-il.
Portrait de Charles Fournier par France 3 Centre-Val de Loire :
Pour lui, il serait bien plus intéressant de développer, sur place, des filières qui seraient utiles à la région dans un modèle écologique. En s'appuyant notamment sur le réseau de 400 développeurs économiques, déployés par la région, qui accompagnent les entreprises en animent les filières. "Aujourd'hui, ils sont formés à l'attractivité et la force de nos entreprises. Il faut absolument ajouter à leurs compétences d'être des transitionneurs pour accompagner les entreprises" vers des pratiques plus vertes.
"Rendre l'argent public efficace"
Son objectif : "Rendre l'argent public efficace." Et notamment via la commande publique, qui joue "un rôle très important" en faveur de la transition écologique. L'un de ses chevaux de bataille, c'est les transports. "Un investissement fort dans le ferroviaire, c'est de l'activité économique derrière", ascène-t-il.
En matière de trains, Charles Fournier voit les choses en grand. Dans une région où 90% des déplacements de plus de 5km se font en voiture selon l'Insee, "il faudrait, au minimum, qu'on puisse relier toutes les capitales régionales. Aujourd'hui, il n'y a pas Chartres-Orléans ou Tours-Châteauroux", regrette-t-il. Pour cela, il faut, selon lui, "ne plus être dans une vision à un mandat, mais à 20 ans des transitions qu'on veut engager, et qu'on planifie à l'avance les financements." Mais peut-on réellement forcer la SNCF à réinvestir des lignes laissées à l'abandon par la baisse de fréquentation d'après-guerre, et par des années de politique nationale tout-TGV.
Le gouvernement assure vouloir piocher une somme rondelette parmi les 100 milliards d'euros du plan de relance, et l'injecter dans le maintien des petites lignes. Assez pour investir dans de nouvelles ? Le candidat écolo espère, à court terme, pouvoir relancer la liaison ferroviaire Orléans-Châteauneuf, serpent de fer et de mer stoppé net en 2017 par le véto du maire d'Orléans Olivier Carré, opposé à la création d'une voie ferroviaire supplémentaire en gare d'Orléans à la place d'un parking.
La transition écologique comme moteur économique
D'ailleurs, depuis le 1er janvier 2021, la gestion d'un certain nombre de ces petites lignes peut être transférée de l'Etat vers... les régions. L'occasion, pour les collectivités, de faire valoir "un meilleur rapport de force avec la SNCF" pour encourager le développement de nouvelles dessertes. "La SNCF est notre opérateur sur les TER, et on est autorité de transports", assure Charles Fournier, optimiste. Et si l'argent vient à manquer, le million d'euros annuel de subventions accordé à l'aéroport de Tours pourra être redirigé, puisque contraire au projet culturel porté par les écologistes.
Le développement ferroviaire est, pour le candidat, l'occasion de rendre plus attractive économiquement la région, et ainsi d'inciter l'arrivée d'entreprises sur le territoire. "La transition écologique, c'est à la fois de nouveaux emplois grâce à l'innovation et l'organisation des filières, et encore d'autres grâce au potentiel d'attractivité du territoire", ajoute-t-il. L'innovation et la formation professionnelles relevant de compétences régionales.
Ces affirmations se fondent sur des estimations sérieuses : selon l'Agence de l'environnement (Ademe), la transition écologique pourrait entraîner la création de 900 000 emplois dans le pays d'ici 2050. Et Charles Fournier espère bien que le Centre-Val de Loire touchera sa part.